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La galerie Georges-Philippe et Nathalie Vallois à Paris consacre une 8e exposition à Jacques Villeglé, 90 ans, jusqu'au 13 mai. Les affiches souriantes et lacérées de "l'Opération Quimpéroise" (2006), et le corpus "Pénélope" coproduit avec Raymond Hains au début des années 50.
L'idée avait fait grand bruit voici dix ans : pour célébrer les 80 ans de Jacques Villeglé, le Centre d'art contemporain de Quimper avait placardé 950 affiches représentant le visage souriant du plasticien sur 16 panneaux électoraux de la ville. Objectif: observer le devenir de ces affiches en 40x60 composées en 6 couleurs pop par la graphiste Vefa Lucas livrées aux passants-citoyens anonymes qui n'hésitèrent pas alors à déchirer ce portrait de l'artiste pris par Didier Gicquel.
Ce sont aujourd'hui 28 de ces affiches lacérées, issues de cette "Opération Quimpéroise", prélevées, recadrées et marouflées sur toile que la galerie Georges-Philippe et Nathalie Vallois a la bonne idée d'exposer au 36 rue de Seine à Paris. Les autres étant entrées dans les collections du FRAC Bretagne et du musée des Beaux-Arts de Quimper.
"Je n'aime pas le sourire commercial, ni les slogans politiques... Systématiquement, je vais chercher à les effacer", m'a confié Jacques Villeglé le jour du vernissage à Paris, marquant cette fois son 90e anniversaire. Une démarche qu'Andy Warhol avait initiée en 1962, dénonçant le marchandising du sourire, avec sa série "Diptyque Marilyn", 50 images de l'actrice américaine à partir d'une même photographie, le visuel publicitaire du film "Niagara" (1953). A travers "L'Opération Quimpéroise", c'est son propre sourire que Jacques Villeglé a offert à la lacération, s'affichant pour mieux disparaître. Les 28 toiles qui en sont issues en témoignent: un œil supprimé ici, une bouche arrachée là... Superposition des couleurs, décalage des motifs, sourire mimosa déchiré d'où surgit un sourire menthe. Principe de l'effeuillage: un sourire dévoile un sourire qui dévoile un sourire, comme un empilement de masques.
Derrière cette opération politique, renaît le souvenir des affiches politiques de la Seconde guerre mondiale qui ont marqué à jamais le jeune Villeglé. Le sourire conquérant de la propagande vichyste qui incite au Service du Travail Obligatoire en Allemagne. Jacques Villeglé, placé chez les Jésuites à Vannes, grandit dans cette France au double visage qui oscille entre Pétainisme et Résistance. Bas les masques! Au sortir de la guerre, le jeune Breton sera architecte. Les murs, les palissades, la comédie urbaine deviennent son terrain de jeu, donnant libre cours à sa passion pour la typographie. Amour aussi de la poésie. Ce en quoi le catalogue édité à cette occasion est un formidable témoignage d'affection.
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