Présentée lors du MIT TR 35 France, Instent, l'entreprise de Franz Bozsak va transformer le suivi médical de nombreux patients.
Un innovateur?
Terminant des études aérospatiales à Stuttgart, Franz Bozsak a effectué sa dernière année en Californie pour un échange à la UCDavis. “C’est là que j’ai rencontré Abdul I. Barakat, spécialiste de la biomécanique cardiovasculaire, nous avons travaillé ensemble pour la première fois sur un projet lié au biomédical. Alors que j’avais toujours pensé travailler en lien avec l’espace et les étoiles, j’ai finalement décidé d’accepter la proposition d’Abdul de commencer une thèse à Polytechnique sur les stents, ces petits dispositifs métalliques qui sont insérés dans des cavités humaines naturelles afin de les maintenir ouvertes, le plus souvent cela sert pour des artères.”, nous raconte Franz.
Durant trois ans et demi, il planche sur le sujet. Il obtient ensuite un prix de l’Ecole Polytechnique qui lui permet de participer à un programme business à Stanford University. Celui-ci lui permettra d’apprendre en trois mois à être capable de mener à bien un projet d’innovation. “Avec mon équipe, nous avons alors déposer notre dossier pour participer au concours mondial de l’innovation qui nous a permis de décrocher une subvention de 200 000 euros pour lancer Instent le 11 avril 2014.”
Une idée disruptive?
Franz explique: “Suite à l’opération de mise en place d’un stent, il n’est actuellement pas possible de savoir comment évolue la cicatrisation. Un traitement standard de 6 à 12 mois est alors prescrit par le médecin, alors que le patient aurait peut-être besoin d’une plus courte durée. Non seulement, cela augmente les coûts médicaux de prise en charge, mais cela augmente aussi les risques pour le patient qui est plus susceptible de faire une hémorragie quand il est sous traitement anticoagulants, ce qui peut-être tout aussi dangereux et mortel que la crise cardiaque que le stent vise à éviter.” On peut évidemment par imagerie invasive savoir si le stent a bien été recouvert mais cela nécessite une opération et donc des coûts et du temps. De plus cette technique ne permet pas de savoir quel est l’élément qui recouvre le stent, or cette information est déterminante.
C’est en partant de ces lacunes que Franz a l’idée de proposer un stent connecté qui, à l’aide de capteurs miniaturisés, peut déterminer les types cellulaires qui sont en contact avec le stent et de transmettre cette information aux médecins. Les données sont ensuite transmises par RFID afin que le médecin puisse les étudier. En fonction du tissu identifié, on en sait plus sur l’avancement de la guérison et la nécessité ou non de poursuivre le traitement sous anti-coagulants. “A ma connaissance et à celle de l’équipe, ce procédé est unique au monde. Certains laboratoires avaient déjà pensé à miniaturiser des capteurs de pression de flux sanguin mais ces informations étaient moins centrales dans le cadre de l’adaptation du traitement et les capteurs n’ont pas réussi à être miniaturisés. Ils ont donc abandonné ces projets.”
Pourquoi s’intéresser à la biotechnologie?
“Nous sommes maintenant à un stade technologique où beaucoup de choses sont possibles, la miniaturisation par exemple. Nous avons une meilleure compréhension biologique, tout cela ouvre de nouvelles frontières à franchir. Avec le vieillissement de la population, nous sommes de plus en plus confrontés à des problèmes de santé. Notre corps n’était pas fait à la base pour vivre au-delà de 60 ans d’où la prolifération de maladies. Les biotechnologies permettent de traiter ces maladies là, on comprend ainsi toute l’importance de ce secteur.” s’enthousiasme Franz. “On peut espérer que dans 20 ans, on se sentira bien dans son corps à 60 ans comme on l’était jeune.” Etudiant, il explique avoir été attiré par l’espace car il le voyait comme un terrain d’investigation challengeant où tout était possible, mais il a réalisé ensuite que bien plus près de nous déjà, le corps lui-même était tout aussi captivant.
Et à l’avenir ?
Pour ce qui est du développement d’Instent, l’équipe vient de changer sa stratégie. Les capteurs qu’ils ont mis au point peuvent aussi servir pour le traitement des AVC. Ils veulent dans un premier temps sortir un dispositif non implantable pour démontrer l’efficacité de leur capteur avant de mettre sur le marché le stent connecté. Ce premier dispositif devrait être disponible dès 2018. Pour le stent, il faudra par contre attendre dans le meilleur des cas la fin de l’année 2019. Il y a en effet des durées non réductibles à cause des démarches juridiques d’homologations. Franz conclut : “Nous voulons d’abord obtenir le marquage CE pour nous lancer en Europe avant de nous développer internationalement afin d’être utiles au plus grand nombre.”
Visuels crédits Ecole Polytechnique