Un film de Sylvain Chomet (2013 - France) avec Guillaume Gouix, Bernadette Lafont, Hélène Vincent, Anne Le Ny, Luis Rego
Un OVNI dans le paysage cinématographique français. Farfelu, frais et poétique.
L'histoire : Paul est orphelin et muet. Ses parents sont morts quand il avait deux ans et il a été élevé par ses deux tantes, professeures de danse. Lui-même est un pianiste très doué, qui les accompagne pendant leurs cours. Paul est un peu à l'ouest, un enfant dans un corps d'adulte, qui n'a guère qu'une seule passion dans la vie : les chouquettes. Il semble traumatisé par quelque chose de sa toute petite enfance : sur les vieilles photos du couple parental, qu'il n'a que très peu connu, il découpe soigneusement son père et ne garde que l'image de sa mère. Un jour, il découvre une voisine de l'immeuble, un peu par hasard, suivant quelqu'un qui est entré chez elle après avoir perdu quelque chose que Paul veut lui rendre. Il découvre un appartement très très étonnant, et une locataire un peu sorcière... qui décide qu'il est grand temps pour Paul de retrouver ses souvenirs.
Mon avis : Quelle jolie surprise ! Je n'y croyais pas trop mais les critiques étaient bonnes, donc j'ai tenté. J'ai été tendrement accrochée... C'est une sorte de conte, loufoque, plein de fantaisie, d'absurde, de burlesque, avec un personnage muet qui évoque immédiatement le cinéma de l'ancien temps, mais avec une grande modernité. Un conte, disais-je, une fable, une petite leçon de vie. Sans prétention mais d'un charme infini et souvent très drôle.
L'interprétation est fabuleuse. Guillaume Gouix, avec son visage de Pierrot lunaire, et ses petites fringues ringardes, est absolument épatant. Il ne dit pas un mot mais il parle avec ses grands yeux bleus. Il est tout raide, tout pataud, enfantin... on dirait le petit frère de Mr Bean ! Il est entouré de deux merveilleuses actrices, Hélène Vincent et Bernadette Lafont, dans des personnages complètement barges, toujours habillées pareil, comme des jumelles, entièrement dévouées à leur neveu. Anne Le Ny ne dépareille évidemment pas, parfaite dans son rôle de guérisseuse ronchon et écolo.
Une curiosité : son appartement, qui n'a pas une porte comme les autres dans l'immeuble : elle est toute moche et se situe entre deux étages, on l'atteint par les marches des escaliers, comme ces anciennes "toilettes sur le palier" d'autrefois. Et quand on entre, on voit bien... une vieille chasse d'eau ! Mais c'est pourtant bel et bien un appartement qui se cache derrière (inexplicable, architecturalement parlant...), plein de plantes... c'est Alice au pays des merveilles, ou Alice de l'autre côté du miroir !
C'est le premier "vrai" film de Sylvain Chomet, qui s'était précédemment illustrée dans la BD et le film d'animation (notamment Les triplettes de Belleville).
A voir absolument par tous ceux qui aiment la poésie ou qui veulent découvrir un vrai talent à la française.
Les critiques presse sont très enthousiastes, pour toutes les raisons que j'ai pu énumérer ci-dessus, à part une ou deux voix discordantes, si méchantes qu'on y sent un brin de rancoeur (personnelle ?) : "interminable et statique visite de courtoisie chez deux vieilles dames flippantes et leur grand gourdiflot de neveu" (Les Cahiers). Les spectateurs sont un peu plus partagés, mais il y a une grande majorité d'enchantés... c'est le cas de le dire.