Étrange sentiment que l’angoisse, que cet état affectif trouble aux allures de rationalité, mais irradiant et démesuré. Car si nous avons des motifs d’angoisse, il est fréquent qu’elle se nourrisse aussi d’elle-même. L’angoisse, nous avertissant d’un danger, se signale en même temps. Et insensiblement, c’est son propre développement qui devient angoissant. Nous sommes pris alors dans l’engrenage de l’angoisse.
Qu’est-ce donc que l’angoisse ? Une réaction logique liée à la perception d’un danger extérieur ? Ou un phénomène plus complexe, tenant davantage à ce qui se passe en nous qu’à notre environnement ? Tout serait simple, si elle était rationnelle, si elle était fonction de notre situation de puissance ou de fragilité. Tout serait si simple si n’avaient peur que ceux qui n’ont pas révisé…
Mais nous redoutons trop souvent ce qui n’est pas redoutable, pour pouvoir en faire un sentiment banal. Alors, elle donne le sentiment non pas d’être consécutive à un événement effrayant, mais préalable à lui. L’angoisse nous tient et se jette sur tous les prétextes pour se justifier et paraître rationnelle. L’angoisse n’est plus réactive, mais disponible, flottante et aux aguets. Mais alors d’où vient-elle ?
Freud songeait que les grands obstacles sont intérieurs, car on ne peut fuir devant eux. Que la source primitive de l’angoisse est donc constituée par eux, par tout ce qui se presse en nous et que nous ne pouvons ni satisfaire ni éviter. Ce qui angoisse, c’est ce que nous ne pouvons ni supprimer ni exprimer. Cela reste comme une charge, pesante, silencieuse, entravée, finalement détournée…