15 avril 2016
© Christophe Magdelaine
Les micro-plastiques pourraient bientôt menacer les huîtres et d'autres mollusques marins, selon une étude de l'Ifremer publiée le 2 février 2016 dans le magazine américain PNAS (Proceedings of the National Academy of Sciences). Faut-il encore présenter les micro-plastiques ? Ils ont littéralement envahi nos océans, au point qu'il est désormais impossible de les nettoyer ou les extraire. Les micro-plastiques font moins de 5 millimètres de diamètre, 80 % d'entre eux proviennent de déchets plastiques terrestres qui ont migré vers les océans, au grès du vent et du réseau hydrographique. Ils sont issus de la fragmentation de déchets plus gros (sacs, bouteilles, mégots, emballages, textiles...), sous l'effet du rayonnement solaire et de l'abrasion par les vagues, un processus qui se poursuit ensuite en mer et qui, au fil du temps, les rend invisibles à l'oeil nu, mais bien présents. Les micro-plastiques sont également issus de rejets industriels du secteur cosmétique (exfoliants, dentifrices) et vestimentaire (fibres synthétiques) qui en utilisent en grande quantité. Une étude récente (M. Eriksen, PlosOne 2014) estime qu'au total 5 000 milliards de particules flottent sur les océans de notre planète. Actuellement, 4 à 12 millions de tonnes de plastique se déversent chaque année dans l'océan et les perspectives sont sombres puisque 10 fois plus de plastique seront déversés dans les océans en 2025 (Jambeck, Science 2015). La reproduction des huîtres est contrariée par les déchets de micro-plastiques Or, l'Homme tire une substantielle partie de ses ressources des océans, surexploités. Avec l'invasion des micro-plastiques, c'est toutes les ressources halieutiques qui sont menacées et notamment les huîtres et autres mollusques comme le suggère une nouvelle étude de l'Ifremer. "Pendant deux mois, dans des bassins expérimentaux, nous avons exposé des huîtres à des microparticules de polystyrène. Nous avons utilisé des micro-plastiques de la même taille que le plancton dont se nourrissent les huîtres habituellement" souligne Rossana Sussarellu, biologiste à l'Ifremer, membre du Laboratoire des Sciences de l'Environnement Marin (LEMAR) pendant la réalisation de l'étude. "Après deux mois d'exposition à cette pollution, les huîtres produisaient moins d'ovules et ceux-ci étaient de plus petite taille. De même, leurs spermatozoïdes étaient nettement moins mobiles comparés à ceux des huîtres mises dans des bassins sans micro-plastique", explique Marc Suquet, biologiste au Laboratoire Physiologie des Invertébrés, Centre Ifremer Bretagne à Brest, membre du LEMAR. "La fécondité était en forte baisse avec des conséquences sur la génération suivante", relève Arnaud Huvet, biologiste au Laboratoire Physiologie des Invertébrés, Centre Ifremer Bretagne à Brest, membre du LEMAR. "Le taux de fécondation par rapport à des huîtres non exposées était inférieur de 41%. Les larves produites accusaient un retard de croissance d'environ 20%." Ce qui signifie que les huîtres pourraient être moins nombreuses et en moins bonne santé, sans parler du fait qu'elles contiennent probablement déjà des micro-plastiques qui les rendent bien moins appétissantes...
Quelles sont les solutions face à cette marée de plastique ? C'est maintenant officiel, nous ne pourrons pas nettoyer les océans. Mais nous pouvons encore éviter d'empirer la situation. Pour les chercheurs du LEMAR, "Il faut améliorer le recyclage du plastique" souligne Arnaud Huvet. Mais c'est bien le consommateur qui reste le levier d'action le plus puissant. Comment ? En modifiant nos comportements, notamment en refusant les produits suremballés et les produits jetables. "Les normes de traitement de l'eau devraient également évoluer. L'interdiction des sacs plastiques est un premier pas dans la bonne direction", soulignent les scientifiques. Notes L'étude a été réalisée par le LEMAR / Laboratoire des Sciences de l'Environnement Marin (UMR CNRS-UBO-IRD-Ifremer), le Cedre et l'ILVO (Belgique). Auteur: Christophe Magdelaine / notre-planete.infoRéférencesOyster reproduction is affected by exposure to polystyrene microplastics.
Laboratoire des Sciences de l'Environnement Marin, UMR 6539 CNRS-UBO-IRD-Ifremer,
Instituut poor Landbouw en Visserijonderzoek (Ostende, Belgique)
Centre de documentation, de recherche et d'expérimentations sur les pollutions accidentelles
des eaux (Cedre).
Source : notre-planete.info, http://www.notre-planete.info/actualites/4461-micro-plastiques-huitres