Superbe réalisation, sous tous points de vue. L'odyssée d'un migrant, d'un réfugié, d'un survivant, racontée de façon visuelle et musicale, avec beaucoup d'invention et d'intensité. Ce spectacle bouleversant nous fait suivre le périple d'un jeune homme qui a quitté sa terre natale pour se retrouver dans un monde étrange et froid. Mais un monde où il pourra - peut-être - renaître à la vie. Plutôt que de nous livrer une description réaliste et analytique, les auteurs ont opté pour un traitement poétique du sujet, nous plongeant en plein dans les tourments psychiques qui assiègent le jeune fugitif.
La pièce est dense, superbement chorégraphiée et mise en scène. Le spectacle dure à peine une heure, il file à toute allure, sans temps mort, constamment tendu comme la corde d'un arc. A travers une succession de courtes scènes ciselées avec précision et constamment sur le fil fragile du funambule, on voit défiler devant nous les étapes obligées par lesquelles passent des milliers de personnes qui fuient la guerre, la barbarie et la misère. Tour à tour : la déchirure de devoir quitter ceux qu'on aime, l'effroi et la peur quand il faut traverser mers et frontières, la perte de tout sentiment d'individualité, la négation de la dignité humaine, puis le désarroi quand on se retrouve dans un pays nouveau, face à des interrogateurs, des regards qui se détournent ou se méfient, des contraintes, des gens qu'on ne comprend pas et qui ne comprennent pas. Il y a aussi les rêves et les cauchemars, les souvenirs d'un bonheur brisé, et les cauchemars ressassant à l'infini les outrages que l'on a subis... Et il y a aussi, au bout du chemin, une lueur annonçant la fin de l'orage.
Il y a tout ça dans Home Sweet Home, et bien plus encore. De la poésie, de l'onirisme, de la rage. La fin est un mix d'espoir et de questionnement. Quelque part, j'ai songé au "Brazil" de Terry Gilliam.
La représentation intègre de la danse, du théâtre, du chant et de la musique, fusionnant tous les éléments dans un ensemble hyper-cohérent que l'on suit les yeux grand ouverts. Et le coeur aussi - grand ouvert.