Bons ou mauvais, trappeurs bodybuildés ou MC contestataires, les rappeurs et producteurs ne manquent pas dans ce vaste monde, y compris dans notre petit pays, dont le mauvais goût frise parfois (souvent ?) le masochisme.
La France reste une des premières nations du hip hop, et bien qu’elle semble se complaire dans la surmédiatisation de la médiocrit(ayy…), elle peut compter sur toute une génération de motivés pour représenter ce beau mouvement.
Si certains collectifs et artistes ont marqué l’histoire rapologique de notre beau pays, à tel point qu’il n’y ait plus besoin aujourd’hui de les présenter (NTM, IAM, MC Solaar, Dany Brillant…), depuis un certain temps tout un pan est régulièrement négligé voire méprisé par nos amis journaleux (donc par une bonne partie du public), alors qu’ils ont tout autant le droit de citer qu’un Booba ou un Oxmo Puccino.
Ils s’appellent James Delleck, le Klub des Loosers, La Caution, Grems… et certains de ces noms doivent vous parler, car ayant certainement introduit une partie d’entre vous dans le rap jeu psychédélique à partir des années 2000 avec leurs sons novateurs et leurs textes alambiqués/barrés. Il n’en demeure pas moins vrai que ces MC « alternatifs » ne remplissent pas vraiment de Zénith, ne diffusent pas leurs clips sur les grandes chaînes, et ne remportent pas de victoires de la musique. Non. Même s’il n’ont pas tous aujourd’hui une actualité très soutenue, la plupart continue à se défoncer le crâne et à foutre le bordel dans les clubs (salope 😉 ).
C’est peut-être pour cette raison qu’IDOL (Independant Distribution On Line), spécialiste indépendant de la distribution digitale, s’est chargé de faire justice à ces talents aujourd’hui un peu oubliés, ou pas assez connus, en délivrant leur propre vision de l’histoire du rap français, compilation sobrement intitulée : Notre Histoire du Rap Français. Un trip complètement nostalgique qui nous rappelle étrangement nos premiers CD gravés compilant toute cette clique, quand ceux-ci s’obstinaient à sortir des skeuds essentiels (enfin certains d’entre eux continuent quand même à innover dans leur coin). Il y a donc de quoi s’enthousiasmer lorsque l’on voit la distribution du bouzin.
Composé de 15 titres aussi diversifiés que révélateurs de cette scène alternative, Notre Histoire du Rap Français démarre sur les chapeaux de roue avec un gros son du super-collectif L’Armée des 12 (TTC + La Caution) : « Gin & Jus » (en référence à un obscur californien). Tiré de l’album Cadavre Exquis sorti en 2002, ce titre incarne à lui seul tout le charme des « kickeurs keupons », des thèmes abordés à l’humour grivois.
Un humour qui se noircit, lorsque le Klub des Loosers témoigne de son mépris pour le genre humain sur le culte « Baise les Gens », ou lorsque Rocé épingle la société actuelle et ses artistes vendus/égocentriques sur une instru « so 90’s » de Dee Nasty (« Pour même pas un billet »). Un sujet également abordé par Liqid, sur le morceau « La Vengeance du Serpent », dont nous vous avions déjà parlé.
Plus poignants, « La Sphère » (feat. Robert Le Magnifique) de Psykick Lyrikah et « Paris » de Dabazz versent dans l’introspection et la déclamation. Alors que le premier semble se livrer et nous « ouvrir les portes de son monde » sur fond de piano acoustique, l’autre décrit une ville lumière dans toute sa splendeur et ses travers, en posant sa voix sur un beat électronique puissant. C’était la séquence émotion.
« C’était », car entre Les Gourmets, Gérard Baste, Teki Latex & Orgasmic, Grems & DJ Gero, La Caution, A2H & Xanax, le registre change radicalement. On se bidonne sur « Maître Kanter », on bouge la tête sur « Glamour sur le Globe », on tire la langue sur « J’te Baise », on s’interroge (un peu) sur « Trop Jeune pour Mûrir », on s’allume un spliff sur « Notre Manière de Faire », et on sautille (ou pas) sur « The Sixpack Anthem ». Histoire de rendre le tout plus « crédible » encore, Vicelow (feat. Zoxea des Sages Po & Busta Flex) « quasi-termine » le tout avec son « Hip Hop Ninja » remixé, juste avant de laisser ce recueil s’achever sur un bon beat de Guts. Lourd.
Voilà donc un projet unique voire déroutant pour certains, mais qui on espère fera date ! Bel hommage à une époque, à un mouvement qui ont marqué toute une génération de jeunes en manque de sensations et à la recherche d’une musique à laquelle s’identifier. Ce sont d’ailleurs les artistes du « rap alternatif » qui ont été les premiers à exploser les frontières du rap en y ajoutant par exemple de la musique électronique, comme en témoigne cette compil’. En avance sur leur temps, mais souvent décriés, ils ont sans le savoir (?) influencé un bon nombre de rappeurs de la nouvelle vague : Orelsan, Joke, Set & Match. Pour ne citer qu’eux.
Une bande de mecs sympa, presque autant que la team du Limo (mais sans les filles) !
POUR LA VERSION DIGITALE C’EST PAR ICI LES ZAMIS
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Raph
Il était une fois Moi. Jeune, vigoureux et d'une intelligence rare, Moi a longtemps cherché un site et une équipe à sa mesure.C'est ce qu'il trouva enfin lors de sa rencontre avec les membres fondateurs du Limonadier, où le monde put enfin prendre conscience de tout l'incroyable potentiel qui était le sien.
Passionné par le Rap et plus généralement par la planète Terre, c'est tout naturellement que Moi décida d'écrire et de partager inlassablement ses dernières trouvailles sonores.
Cocktail Préféré de Moi :
Une caïpirinha bien fraîche, cela va de soi.
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