François Hollande participera le jeudi 14 avril à une émission sur France 2 dans l'optique de renouer le lien très largement distendu avec les Français, sa cote de confiance stagnant à moins de 20%. Alors que l'actuel Président de la République pourrait briguer l'année prochaine un 2 ème mandat, co mment son image est-elle structurée auprès des Français, des sympathisants de sa formation politique d'origine ou encore auprès de ses anciens électeurs ? Existe-t-il, à travers l'analyse de cette image, des ferments à partir desquels espérer une qualification au 1 er tour de l'élection présidentielle de 2017 ? Ou assiste-t-on au contraire à une multiplication des signes susceptibles d'indiquer que le Président ne gagnerait pas à se soumettre de nouveau au verdict des urnes ?
Une proximité avec les Français qui s'est étioléeEn 2012, le Président " normal " avait été préféré au Président " bling-bling ". Parmi les raisons évoquées par les électeurs de François Hollande, nombre avaient trait au sentiment que le candidat saurait se montrer plus proche des Français, saurait mieux cerner leurs problèmes. C'était déjà l'une des raisons qui lui avaient permis de remporter la primaire socialiste. A l'été 2011, un Français sur deux (51%) déclarait avoir le sentiment que François Hollande comprenait les préoccupations des Français, soit davantage que Martine Aubry (48%), Ségolène Royal (35%) ou Dominique Strauss-Kahn, alors candidat pressenti (33%). Aujourd'hui, selon un récent sondage Harris Interactive pour LCP, seuls 19% conservent ce sentiment. Même chez ses anciens électeurs de 2 nd tour (39%) ou chez les sympathisants de Gauche (44%), cette perception est devenue minoritaire. Elle est encore légèrement majoritaire (55%) parmi les personnes qui se déclarent aujourd'hui sympathisantes socialistes, mais cela correspond à une baisse de 26 points en cinq ans, auprès d'une population en outre de plus en plus restreinte. Il n'y a qu'en février 2015, dans le contexte de l'immédiat après-attentats de janvier 2015 en région parisienne, que François Hollande avait momentanément enrayé cette baisse, mais cet effet n'avait pas perduré et n'a pas été de nouveau relevé après les attentats de novembre dernier. L'enjeu pour François Hollande est donc aujourd'hui de réactiver cette relation privilégiée avec les Français, et notamment avec les classes populaires (18% seulement ayant actuellement le sentiment dans ces catégories qu'il comprend bien les préoccupations des Français).
Une honnêteté interrogéeAutre point fort du candidat victorieux à l'élection présidentielle de 2012 face à son adversaire : la perception de son honnêteté, terme polysémique recouvrant une forme de probité juridique mais aussi de droiture intellectuelle et morale. Il s'agit en sus d'une des premières attentes formulées par les Français envers la personne qui accède à la fonction présidentielle. Encore en mars 2013, 48% des Français associaient le qualificatif d' " honnête " au Président en exercice. Aujourd'hui, ils ne sont plus que 32%. Certes, c'est toujours davantage que le Président des Républicains, Nicolas Sarkozy (18%), empêtré dans plusieurs affaires de justice. Et c'est toujours un trait d'image qui lui est largement prêté par les sympathisants socialistes (74%). Il n'en demeure pas moins que même sur ce point, l'image de François Hollande s'est nettement dégradée et qu'il s'agissait sans doute d'un des ferments de la confiance à son égard. Aujourd'hui, parmi les qualificatifs spontanément mobilisés par les Français pour décrire François Hollande, on trouve au contraire le terme " menteur ", pour un Président qui n'a pas su tenir ses promesses aux yeux des électeurs.
Une incapacité perçue à décider d'un cap et à s'y tenirAu-delà de la dégradation de ses traits de personnalité, François Hollande est remis en cause dans sa compétence et dans son autorité en tant que Président de la République. Moins d'un Français sur cinq le décrit aujourd'hui comme compétent (19%), sachant faire preuve d'autorité (16%), sachant où il va (15%), ou encore capable de tenir ses engagements (11%). Sur l'ensemble de ces points, son image, déjà relativement peu étayée au moment de son élection, s'est fortement détériorée. Et particulièrement concernant sa capacité à tenir ses engagements. Sa manière d'exercer le pouvoir est directement remise en cause, et les nouveaux louvoiements en ce début d'année 2016 concernant la révision constitutionnelle ou le projet de loi Travail participent sans doute de la large diffusion de ce sentiment dans la population.
De plus, il accuse, à un peu plus d'un an de la prochaine élection présidentielle, un retard important sur ces dimensions à l'égard de son ancien adversaire, Nicolas Sarkozy, qui pourrait de nouveau porter les couleurs de la Droite (14 points sur la capacité à tenir ses engagements, 17 points sur la compétence, 30 points sur la capacité à tenir une direction, 42 points sur l'autorité). Les sympathisants de Gauche, et même les sympathisants socialistes, ne lui attribuent pas majoritairement ces traits d'image aujourd'hui. Alors que le Président des Républicains bénéficie sur ces critères d'une bien meilleure image parmi les sympathisants de sa formation politique. Ainsi, seuls 43% des sympathisants socialistes ont le sentiment que François Hollande sait aujourd'hui où il va et 37% qu'il est capable de tenir ses engagements. En comparaison, 81% des sympathisants des Républicains estiment que Nicolas Sarkozy sait où il va et 70% qu'il est capable de tenir ses engagements, soit des proportions près de deux fois supérieures. Si on élargit la focale, le constat est le même : 33% des sympathisants de Gauche dans leur ensemble perçoivent une direction dans l'action de François Hollande et 28% le jugent capable d'être ferme sur ses promesses. Pour Nicolas Sarkozy, les chiffres recueillis auprès des sympathisants de Droite et du Centre sont respectivement de 66% et 49%. Une des hypothèses avancées pour soutenir l'éventuelle candidature de François Hollande est que si Nicolas Sarkozy est désigné à l'issue de la primaire à Droite et que le Président parvient à le battre au 1 er tour, il se retrouvera réélu au 2 nd tour face à Marine Le Pen. Aujourd'hui, lorsqu'on regarde ces chiffres, ce scénario parait compromis, que le 1 er tour se joue sur le socle des familles politiques restreintes ou d'ores et déjà sur des stratégies de rassemblement.
Si François Hollande n'a jamais bénéficié d'un état de grâce dans l'Opinion, force est de constater que l'exercice du pouvoir a néanmoins entraîné une nette dégradation de son image, aussi bien concernant ses traits de personnalité que concernant ses compétences pour diriger le pays, et y compris sur ses points de force qui lui avaient permis de remporter le scrutin de 2012. Il y a quatre ans, la sympathie, l'honnêteté et la proximité qui lui étaient attribuées avaient pu éclipser les doutes sur son efficacité et lui permettre la victoire face à Nicolas Sarkozy, dont la personnalité était rejetée. Mais aujourd'hui, à un peu plus d'un an de la prochaine élection présidentielle, il apparait bien démuni pour porter de nouveau les espoirs de la Gauche. Il reste un an à François Hollande pour redorer son image, à défaut d'inverser la courbe du chômage, pour espérer être légitime pour représenter sa famille politique et pouvoir conduire un 2 ème mandat. On se souvient que Nicolas Sarkozy avait également vu son bilan largement interrogé mais qu'il avait su, au moins pour partie, remobiliser le peuple de Droite autour de sa personne en 2012. François Hollande espère donc sans doute dès ce jeudi, dans l'émission Dialogue Citoyen avec les Français, réactiver aux yeux de ses anciens soutiens l'image d'un homme honnête et attentif aux préoccupations de ses concitoyens.