Magazine Info Locale

Charente-Maritime : le Parc naturel marin est "une coquille vide"

Publié le 08 avril 2016 par Blanchemanche
#Parcnaturelmarin
Publiéle 08/04/2016 par Philippe Baroux
Charente-Maritime Parc naturel marin
L'estuaire de la Gironde depuis la plage près du phare de Richard à Jau-Dignac-et-Loirac.© 
AFP JEAN-PIERRE MULLER

Le Parc marin de la mer des pertuis a un an. Son budget n’est pas voté et son équipe permanente se résume à une directrice.

Un an déjà. Au pied de la mâture de « L'Hermione » en partance pour les États-Unis, la ministre de l'Environnement Ségolène Royal annonçait à La Rochelle la naissance du Parc naturel marin de l'estuaire de la Gironde et de la mer des pertuis. En cet anniversaire, osons le parallèle pour interroger le fonctionnement du parc : tire-t-il un cap aussi lisible que le fut le grand voyage de la frégate ?Pour récente que soit l'histoire du parc marin, elle a déjà fourni quelques indications intéressantes. D'abord au niveau des trois réunions convoquées de son conseil de gestion, forme de « parlement » où sont arrêtées les décisions majeures du parc. À l'inverse d'une session du Conseil départemental, de l'assemblée d'un Conseil communautaire ou d'une séance de Conseil municipal, qui sont ouvertes au public, le conseil de gestion du parc marin réunit ses 70 membres à huis clos. Par voie de conséquence, la restitution des sujets passe au filtre d'une communication formatée. Et même si, au terme de la séance, il est toujours possible de recueillir la parole des présents, celle-ci est évidemment dépourvue de la spontanéité qu'offrirait ce même exercice en pleine session.

Étouffer les remous ?

Cette procédure serait-elle un moyen d'écrêter les vagues et d'étouffer les remous qui pourraient ponctuer les débats ? À moins qu'il ne s'agisse de contenir les envolées - que provoque parfois la présence de journalistes dans une assemblée - pour que le travail du conseil de gestion gagne en sérénité ?Sur le fond, si le parc marin a pour mission de gérer le fragile équilibre entre protection de l'environnement et développement économique, il a aussi déjà gravé dans le marbre que sa gouvernance est on ne peut plus politisée. On n'en est pas à encarter les goélands, mais on se rappelle de l'élection de son président, le socialiste girondin Philippe Plisson qui, opposé au départ à l'idée un parc marin, est revenu sur ses positions et dans les bagages de Ségolène Royal pour venir coiffer au poteau trois candidats de la droite charentaise-maritime.
Charente-Maritime Parc naturel marin Un an après la création du parc marin par Ségolène Royal, son président Philippe Plisson dit sa déception, faute de moyens.© PHOTO PHOTO ARCHIVES PASCAL COUILLAUD / « SUD OUEST »
Pour autant, lorsqu'il s'est agi, en janvier dernier, de poser un avis négatif contre le projet d'extraction de granulats marins de l'estuaire de la Gironde, ce même président a su rassembler une large majorité pour formuler un avis « négatif ». Ce qui n'était pas pour déplaire au député-maire de Royan Didier Quentin (Les Républicains).Mais une hirondelle ne fait pas le printemps. Ce n'est pas parce que le conseil de gestion frappait un coup remarqué ce jour-là que le parc est pleinement opérationnel. Un an après le décret signifiant sa création, un épais brouillard nappe toujours le montant du budget de fonctionnement.« Ce que j'avais dit se concrétise », déplore Jean-Louis Léonard. Le représentant de l'agglomération rochelaise au conseil de gestion a été écarté et de la présidence et du bureau. Il n'est donc pas le moins critique de l'institution qu'il juge être « une coquille vide ». « Pas un centime n'est inscrit au budget. Lorsqu'on essaie de joindre le président pour l'interroger, il ne répond pas. Normalement, l'Agence française de la biodiversité devrait alimenter le budget des parcs marins en prenant sur le budget des aires marines protégées. Rien n'est fait. Les élections arrivent et ce n'est pas à ce moment que quoi que ce soit sera fait. Nous allons donc nous donner rendez-vous dans deux ans… », ironise le maire de Châtelaillon.

« Il est temps de recruter… »

Plus nuancé sur la question du fonctionnement (« elle demeure une incertitude »), le Rochelais Yann Helary dit tout de même qu'« il va être temps de donner des précisions aux collectivités locales, puisque l'idée du cofinancement de certains projets était évoquée à la création ». Le représentant du parc régional du Marais poitevin au parc marin rejoint ceux qui pensent que la vaste échelle géographique, du bec d'Ambès au sud de la Vendée, réclame des postes. « Il faut recruter si l'on veut instruire des dossiers, des demandes. » Mais la modulation n'est pas loin : « Pour avoir travaillé un temps au ministère de l'Environnement au côté de Dominique Voynet (où je m'occupais d'ailleurs du parc marin d'Iroise), une année pour une mise en place opérationnelle n'est pas incongrue. »Pour donner une échelle, le plus ancien des parcs marins français, en mer d'Iroise (créé en 2008), mobilise une quinzaine de permanents, fonctionnaires et contractuels, cadres, techniciens et chargés de missions.Marennes attend les besoinsC’est à Marennes que doit s’installer le siège du parc naturel marin. Mais quels agents occuperont les bureaux du siège ? La directrice qui a pris ses fonctions il y a trois semaines est actuellement hébergée dans les locaux du centre des impôts. À terme, il est prévu que le parc naturel marin s’installe dans les anciens locaux du tribunal de commerce que la commune rachetait au Conseil général il y a trois ans. Marennes financera le chantier de rénovation de tout ou partie de ces 1 000 mètres carrés, avec une réflexion sur une mutualisation avec les services de la commune, explique en substance le maire Mickaël Vallet. La directrice a déjà rencontré l’élu et visité les lieux.La suite ? Que le parc affiche ses besoins en termes d’espace, mais encore faut-il que l’institution soit fixée sur les effectifs qu’elle pourra financer… Cela peut prendre du temps en l’état actuel du manque de précision du ministère. Le maire, lui, attend de disposer de ces éléments pour recruter un programmiste immobilier qui pensera l’aménagement. À quel prix ? Il est trop tôt pour le dire, mais il existe un indicateur : le coût du mètre carré rénové va de 1 000 à 1 200 euros.Avec des bouts de chandellesSur le sujet des déficits en moyens de fonctionnement du parc naturel marin, on pourrait s’attendre à un exercice de langue de bois. Au contraire, son président Philippe Plisson ne se dérobe pas.« Sud Ouest ». Le parc marin a un an, et toujours aucun moyen de fonctionner. Pourquoi ?Philippe Plisson. Nous étions effectivement dans une perspective où nous devions avoir une quinzaine d’agents. À ce jour, nous avons une directrice, plus une directrice et… rien qu’une directrice ! L’Agence des aires marines protégées doit encore mettre à notre disposition un agent, et le recrutement d’un emploi aidé (pour tout l’administratif) est prévu. Le compte n’y est pas ! En l’état actuel, ce parc n’a pas les moyens de ses ambitions. L’État réduit considérablement sa voilure. Il y a l’ambition légitime de la ministre de créer des parcs marins, mais derrière, les moyens budgétaires ne suivent pas.Le parc se résumerait donc à une illusion ?Non, nous allons quand même travailler. Dans la mesure où nous avons signé une convention avec le Smiddest (Syndicat mixte pour le développement durable de l’estuaire) qui va mettre à notre disposition son travail sur le schéma d’aménagement de gestion de l’eau de l’estuaire de la Gironde. Ça correspond pour partie à une problématique commune, et ce sera une base de travail au moins sur une partie du territoire du parc marin. Après, j’attends la mise en place de l’agence de la biodiversité. Elle doit intégrer les parcs marins. Nous verrons alors ce que seront nos moyens de fonctionnement, si nous sommes dans l’affichage plutôt que dans l’action. Mais nous commençons à fonctionner, avec une ambition un peu réduite dans un premier temps. Ne désespérons pas de trouver les moyens de faire mieux…Un an après la création, on entend votre surprise voire votre déception...Je suis dans la majorité, donc un peu entre le marteau et l’enclume. Ce n’est pas comme ça que l’on m’avait présenté les choses. La directrice va travailler sur la rédaction du plan de gestion, document fondateur qui donnera les orientations d’actions concrètes. Nous avons le projet d’aboutir là-dessus courant 2016. Entre-temps, il y a des dossiers sur lesquels nous allons devoir rendre des avis, mais ça sera compliqué. Nous ne le ferons pas au doigt mouillé : donner un avis sérieux, étayé, adossé à une argumentation où l’ensemble des enjeux est soupesé, c’est une responsabilité. D’ici l’été, nous mettrons cela à plat, lors d’une réunion du conseil de gestion.http://www.sudouest.fr/2016/04/08/nappe-de-brume-s-ur-le-parcmarennes-attend-les-besoins-2324654-1391.php

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Blanchemanche 29324 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte