A quoi voit-on le temps qui passe ?

Par Mpbernet

Voici Mongia, la fée de notre logis parisien.

Elle vient de s'occuper de l'argenterie - de son propre chef car c'est elle qui décide de ce qu'il convient de faire et du moment où il faut le faire dans la maison. Je ne sais pas comment je ferais sans elle.

En regardant cet ensemble de théières et de sucriers (en métal argenté) qui trône depuis près de cinquante ans dans notre salle à manger, je mesure combien le temps nous fuit. Qui aurait l'idée de transvaser le café obtenu avec des dosettes dans de tels ustensiles ?

Ces objets rutilants, nous les avons choisis sur notre liste de mariage, déposée auprès de la maison MARIN, faubourg Saint-Honoré. Ils nous ont été offerts par ma marraine. Elle avait déclaré à ce propos : "Je ne t'ai rien offert pour tes anniversaires, je me rattrappe avec 21 cadeaux en une seule fois !"

J'avais aussi, dans mon trousseau de jeune épousée, un service de table en porcelaine de Limoges, des couverts de cérémonie, et des verres de cristal. La plupart de ces objets ont survécu - du moins partiellement - à nos multiples déménagements de début de carrière ...

Nos modes de vie changent : qu'inscrit un jeune couple aujourd'hui sur sa liste de mariage ? (lorsqu'ils se marient !). Quelle drôle d'idée que de disposer de deux séries d'ustensiles dans des appartements nécessairement exigus ? Où stocker un matériel que l'on utilise rarement, sauf les soirs de fête, à Noël ou à Pâques - et encore ... La plupart des jeunes couples comptent déjà une longue cohabitation derrière eux. Ils ont tout !

Lorsque nous nous sommes mariés, parmi les rituels "marqueurs" de la bourgeoisie, figuraient les dîners en ville, à donner ou à rendre ... Aujourd'hui, toutes les jeunes femmes travaillent. On n'invite plus des séries de couples pour passer une soirée à facilier des rencontres, se faire  des relations professionnelles. On se reçoit entre copains et le décor de la table, s'il reste festif, ne revêt aucun caractère ostentatoire. Les industries des Arts de la Table subissent durement cette tendance ...

Nous devons nous rendre à l'évidence : nous ne sommes plus au temps des diligences, et même plus à celui des taxis étroitement réglementés (comme l'étaient les cochers de fiacres au XIXème siècle). Les styles de vie changent irrémédiablement avec le progrès technologique - que deviendrions-nous sans l'informatique ? -  sauf certains éléments fondamentaux de notre rythme quotidien : par exemple, notre façon traditionnelle encore de prendre nos repas, inscrite dans le marbre de la culture française et de l'UNESCO.

Donc, tout n'est pas noir dans un monde de brutes, adaptons-nous et gardons les traditions essentielles qui nous font conserver des objets inutiles auxquels nos yeux se sont, année après année, attachés.

Merci encore à Mongia de veiller à ce que tout continue ...