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SALINE ROYALE D'ARC-SUR-SENANS (Doubs)

Publié le 04 avril 2016 par Aelezig

La saline royale d'Arc-et-Senans est une ancienne saline (production industrielle de sel) du XVIIIe siècle en activité jusqu'en 1895, construite à Arc-et-Senans. Elle compte parmi les plus importantes d'Europe à son époque. Elle a été construite par l'architecte Claude-Nicolas Ledoux. 

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La maison du directeur, à gauche

Au XVIIIe, le sel est utilisé pour la conservation de certains aliments comme la viande ou le poisson et c'est à ce titre une denrée essentielle. Un impôt est basé sur sa consommation, la gabelle. La Franche-Comté est une région relativement riche en gisements de sel gemme dans son sous-sol. En conséquence, on trouvait de nombreux puits salés dont on extrayait le sel par ébullition dans des chaudières chauffées au bois. On construisait les chaudières près de ces puits et on amenait le bois des forêts voisines. Après de nombreuses années d'exploitation, ces forêts s'appauvrissaient et le combustible devait en conséquence parcourir des distances de plus en plus importantes pour être acheminé, ce qui coûtait de plus en plus d'argent. De plus, au fil des années, la teneur en sel de la saumure diminuait. Il fallait trouver de nouveaux puits. 

Claude-Nicolas Ledoux, architecte de la Ferme générale, est nommé « Commissaire aux salines de Lorraine et de Franche-Comté » le 20 septembre 1771 par Louis XV. En 1773, Mme du Barry appuie sa nomination en tant que membre de l'Académie royale d'architecture, ce qui permet à Ledoux de porter le titre d'Architecte du Roi. C'est ainsi que la construction de la saline royale d'Arc-et-Senans lui est confiée.

En tant que commissaire, il a pour mission d'inspecter les différentes salines de l'est de la France. Ceci lui permettra de se forger une opinion quant à la physionomie d'une usine efficace. Cette réflexion lui permet de mettre sur pied un premier projet, avant même que Louis XV ne lui en fasse la demande. Il s'inspire sans doute des autres salines de la région, et en particulier celles de Salins-les-Bains et Lons-le-Saunier. Ce projet sera présenté en avril 1774 au roi. 

Ledoux voit grand : c'est un projet ambitieux, novateur et rompant avec les constructions traditionnelles. En effet, auparavant, les constructions et les bâtiments ne sont pas liés, ils sont construits de manière éparse. Ledoux rompt en mettant en place un projet fait d'une géométrie implacable : l'enceinte est organisée autour d'une immense place carrée. Les différents bâtiments sont placés tout autour de cette cour, reliés par des portiques. C'est justement cette vision grandiose et luxueuse qui mène ce projet à l'échec : aucun bâtiment industriel de l'époque n'est aussi imposant, ce qui étonne les contemporains de Ledoux. Le roi refuse le projet, en précisant : « Pourquoi tant de colonnes, elles ne conviennent qu'aux temples et aux palais des rois ». De même, il est choquant à l'époque de placer une chapelle dans un coin.

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Maison du directeur

Ledoux planche alors sur un nouveau projet, plus sobre. Le lieu de la construction de la saline est défini par une commission technique désignée par la Ferme générale : ce sera entre les villages d'Arc et de Senans. Ce site présente plusieurs intérêts : c'est une plaine dégagée, située à proximité de la Loue et de la forêt royale de  Chaux, de plus de 40.000 arpents. De plus, il se trouve au centre du continent : il peut communiquer avec la Méditerranée par le canal de Dole, et avec la mer du Nord et le port d'Anvers par le Rhin. Enfin, la Suisse est relativement proche, ce qui est à l'époque un atout important du fait de la forte demande de ce pays en sel.

La première pierre est posée lors d'une cérémonie le 15 avril 1775 et les travaux se poursuivent jusqu'en 1779. Le gros œuvre est rapidement réalisé, et les premiers essais de fabrication commencent dès l'automne 1778, avant même l'achèvement des intérieurs. L'exploitation de la saline commence en 1779.

Le réseau routier alentour est étudié par de jeunes stagiaires envoyés sur place par l'Ecole nationale des ponts et chaussées. La route reliant les villages d'Arc et de Senans est lentement empierrée.

Afin d'approvisionner la saline en « petites eaux » depuis les puits de Salins-les-Bains, un saumoduc est construit. Il forme une double canalisation en sapin, longue de 21,5 kilomètres, qui traverse collines, routes et forêts, en suivant le cours de la Furieuse et de la Loue. Cette canalisation est enterrée afin de la rendre moins vulnérable aux dégâts du temps, du gel et des pillards.

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Afin de le sécuriser plus fortement, 10 postes de garde sont construits le long du tracé du saumoduc, formant ainsi le « chemin des gabelous ». L'écoulement et la teneur en sel de la saumure sont mesurés à chaque poste, et les résultats sont relevés chaque samedi et portés à la saline. Les gabelous sont à l'époque des douaniers responsables du commerce du sel, et donc responsable de la gabelle. Ils doivent faire face à des « faux-sauniers », qui percent les canalisations afin de récupérer une partie du liquide chargé de sel.

Malgré les nombreux travaux effectués sans interruption sur le saumoduc, de nombreuses fissures apparaissent, cause de nombreuses fuites. Ainsi, des 135.000 litres de saumure envoyés quotidiennement depuis Salins, une partie non négligeable est perdue. À partir de 1788, les conduits en bois sont progressivement remplacés par des conduits en fonte. 

Les bâtiments

Le bâtiment de graduation a été détruit en 1920. Il avait pour objectif à l'époque d'augmenter la concentration en sel de la saumure par évaporation. Il était à l'époque formé d'une immense ossature ouverte en bois, longue de 496 mètres, haute de 7 mètres, ce qui permettait le passage du vent. On trouvait à 5 mètres de hauteur un tuyau percé de trous qui laissait s'échapper l'eau salée qui pouvait alors se répandre sur de très nombreux fagots d'épines. Une évaporation avait alors lieu et était facilitée par le passage du vent. Chaque goutte de saumure était alors collectée par un madrier de sapin rainuré légèrement penché. Ce procédé était répété plusieurs fois afin d'augmenter la salinité de la saumure jusqu'à obtenir une salinité d'environ 24 degrés. La saumure était alors dirigée dans un immense bassin de 5 mètres de profondeur et d'une capacité de 200.000 litres (soit 200 m3). Ce bassin était recouvert d'une couverte de 2000 m3, et était accompagné d'un poste de garde.

Les bâtiments des gardes sont de magnifiques bâtiments avec des colonnes doriques situés près des entrées pour pouvoir les contrôler. Elles possèdent des ornements et pas de cheminées comme le reste de la saline. Elles sont très spacieuses et luxueuses. Ledoux attachait beaucoup d'importance à cela.

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La maison du directeur est l'« oculus » (l’œil de bœuf, le centre) de la saline ; c'est pourquoi on retrouvera un rond central sur le fronton du bâtiment. Les colonnes inspirées de l'Antiquité rendent le bâtiment plus prestigieux et lui donnent de l'importance afin de montrer son rôle, sa fonction supérieure par rapport aux autres édifices.

Les jardins sur le pourtour extérieur de la Saline étaient autrefois cultivés par les habitants. Depuis quelques années, ils sont harmonisés avec un thème, et donnent lieu au Festival des Jardins, de juin à octobre. 

Ledoux a conçu l'ensemble architectural en forme de demi-cercle (370 m de diamètre), comprenant les installations techniques et les logements des ouvriers. La maison du directeur avec son fronton et son péristyle impose une certaine idée de l'ordre. Emprisonné sous la Révolution, Ledoux imagine la cité idéale de Chaux, qui devait entourer la saline, projet qui restera dans les cartons de l'architecte tombé en disgrâce.

Nul doute que la saline est l'expression de visions utopiques. Son demi-cercle parfait, l'alignement et la symétrie, quels que soient les points de vue, en font une œuvre architecturale idéaliste. De plus, la plénitude et l'indépendance qu'aurait pu acquérir une telle cité, logeant ses ouvriers, les nourrissant, leur offrant des activités, est une mise en pratique des utopies les plus ancestrales, comme celle de Thomas More (Utopia, 1516).

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La vie après

L'activité périclita, car le rendement n'était pas celui escompté. La concurrence du sel marin acheminé par chemin de fer et la pollution du puits alimentant le village d'Arc amenèrent la fermeture de la saline en 1895, ce qui favorisa sa ruine. Un incendie se déclare en 1918 dans la maison du directeur et dans la chapelle suite à la tombée de la foudre.

Le 10 juin 1927, le département du Doubs fait l'acquisition de la saline et entreprend sa restauration. Le 20 février 1940, la saline et son mur d'enceinte sont inscrits aux monuments historiques.

Aujourd'hui, largement ouverte au public, elle abrite, entre autres :

  • dans le bâtiment des Tonneliers, le musée Ledoux, qui présente par de nombreuses maquettes, des œuvres à la rondeur futuriste, dont beaucoup ne furent jamais réalisées.
  • dans les bâtiments des sels, des expositions temporaires

D'après Wikipédia


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