Magazine Société

L'édito de la semaine: Le royaume des ombres

Publié le 03 avril 2016 par Podcastjournal @Podcast_Journal
Rédacteurs et stagiaires: cliquez sur cette barre pour vous connecter en back-office de la rédaction! En 2002, je n’avais jamais entendu parler d’Imre Kertész. Non pas que j’ignorais tout de la littérature hongroise mais il est vrai que les auteurs contemporains m’étaient plus inconnus. Ignorance et manque de promotion d’un pays qui ne m’était pas assez en valeur ses auteurs hongrois de confession juive? Je ne saurai le dire, un peu des deux j’imagine. Mais en ce début de siècle, l’erreur est réparée et l’auteur hongrois est reconnu à sa juste valeur. D’un seul coup, la presse magyare déborde d’informations sur Kertész et l’on découvre ainsi à travers cet écrivain, un pan de l’histoire de la Hongrie. Juif et Hongrois, Hongrois mais juif, Imre Kertész est déporté adolescent, par les Allemands aidés par les Croix Fléchées vers les camps de la mort. Auschwitz puis Buchenwald, le gamin s’en sortira et reviendra à Budapest où l’appartement où il résidait avec ses parents est désormais occupé par d’autres. Seul, il devient journaliste mais trouve sa vocation après la lecture de "L’Étranger" d’Albert Camus. C’est ce sentiment qu’il ressent au retour des camps, sa famille ayant été exterminée, seul aussi sein de son pays, où nul n’est prêt à reconnaître l’horreur et le déni d’être humain qu’ont subi les Hongrois juifs. Il sera désormais un auteur témoin de la Shoah et sera récompensé pour son œuvre témoignage de ce que vécurent entre autres les Budapestois de confession juive à partir de l’automne 1944. C’est pour "Être sans destin", dont il n’est pas vraiment nécessaire d’expliquer le titre tellement il est parlant, biographie témoignage de l’horreur des camps qu’il fut récompensé en 2002. En Hongrie comme ailleurs, la Shoah n’arrête pas l’antisémitisme, sauf peut-être en Allemagne? Et celui qui fut victime de l’horreur nazie s’installa chez ses bourreaux et y traduisit les plus grands auteurs dans cette langue. Paradoxe.

Si Imre Kertész à travers son œuvre a tenté de montrer l’acceptation passive et ordinaire d’un système par ses victimes, il semble que d’autres en Europe, en Grèce, en Espagne mais aussi en France depuis ce week-end, tentent de résister à celui dans lequel ils évoluent. Nul ne sait ce que cela donnera et il me semble que dès maintenant il est important de savoir que ce n’est pas ce qui compte. Ce qui est important s’est de réagir, de protester en prenant conscience. Il est clair qu’il n’y a pas de bons systèmes, mais qu’il n’y a de bons que la lucidité et la protestation, pendant indispensable à tout autorité. Il semble important de n’attendre rien de particulier, ni de meilleur d’un autre système. La démocratie reste le moins pire. Mais ce n’est pas pour autant qu’il faille l’accepter sans critiques. C’est le rôle de la société civile qui remet en cause ce qui semble être établi. Cette remise en cause n’est jamais suffisante mais à toujours le mérite d’exister. Sur la place de la République ce 1er avril, beaucoup de choses ont été dites et beaucoup avaient un goût de déjà vu, entendu. Qu’importe, car encore une fois, dans la lutte ce n’est pas le contenu qui compte c’est le contenant, c’est la forme. L’utopie est méritante et acceptable lorsque ceux qui la pratiquent acceptent cette idée, sinon il y a danger… comme en démocratie. Ne pas trop attendre de la nature humaine mais y croire car pas le choix, semble être la première des utopies indispensables pour survivre.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Podcastjournal 108031 partages Voir son profil
Voir son blog

Magazine