Réécoutant l’album, paru en 2013, « Brassens, Échos d'Aujourd'Hui » dans lequel des artistes internationaux de tous styles revisitent Brassens, parfois même sans connaître celui-ci, je me dis que définitivement, une chanson n’appartient à personne, pas même à son auteur ni à son interprète principal. Une chanson existe et chacun peut en faire ce qu’il veut, pour le plaisir de la chanson.
Brassens est à ce niveau un auteur-compositeur extraordinaire. Ses chansons ont été reprises par des dizaines d’interprètes en les amenant parfois bien loin de ce que Brassens proposait, mais justement en les transcendant. Pour n’en citer que quelques uns, Graeme Allwright, Barbara, Agnès Bihl, Georges Chelon, Michel Fugain, Yves Jamait, Catherine Le Forestier, Maxime Le Forestier, Philippe Léotard, Miossec, Noir désir, Kristo Numpuby, Odieu, Renaud, Olivia Ruiz, Les Têtes Raides, Weepers Circus, Gabriel Yacoub… s’y sont risqués, avec plus ou moins de succès. Tout n’est sans doute pas du même niveau, mais qui peut juger de celui-ci ?
Par exemple, moi qui suis un vrai admirateur de Georges Chelon, je n’ai vraiment pas aimé son album « Georges Chelon chante Brassens » paru également en 2013. En fait, j’ai surtout été déçu par ces reprises parce qu’elles n’apportent rien de nouveau. Je ne dis pas que Chelon s’est contenté de faire du Brassens. Mais son objectif n’était certainement pas de revisiter ces œuvres. Juste de les chanter. En soi, il a bien raison et – même si je n’aime pas trop cet album – je ne vais pas lui jeter la moindre pierre.
Dernièrement, Bruel s’est également lancé dans un album de reprises de Barbara. Audacieux, mais assez logique : Barbara n’a-t-elle pas elle-même repris de nombreuses chansons – de Brel, de Ferré, de Montand… – pas toujours à bon escient ? Les puristes de Barbara se sont empressés de tomber à bras raccourcis sur l’artiste. Son crime : ne pas s’être contenté d’interpréter ces chansons à la Barbara, mais avoir osé une réinterprétation. Je ne dis pas que j’estime génial le travail de Bruel, mais j’estime en tout cas qu’il avait bien le droit de revisiter les œuvres de la grande chanteuse et que tout n’est pas inintéressant.
En écrivant cela, je n’espère pas convaincre qui que ce soit. Je veux simplement dire qu’une chanson, une fois qu’elle a été créée, appartient à ceux qui l’écoutent, qui la réinterprètent, qui la chantent… C’est justement à cela qu’elle sert. En soi, une chanson ne sert pas à grand chose. Mais lorsqu’elle touche quelqu’un, lorsqu’un chanteur ou une chanteuse – qu’elle que soit sa qualité – se la réapproprie, lorsqu’elle devient intemporelle et sans espace… alors, elle atteint sa véritable dimension. Celle de l’éternité. Merci à tous ceux qui le permettent.