Fin 2014, Alma nous dévoilait des détails d’un disque protoplanètaire comme jamais. Avec le VLA, une équipe est allée encore plus loin en devisant la structure des anneaux les plus proches de la même étoile, HL Tauri.
Au même titre que les astronomes cherchent à connaître dans les détails toutes les étapes qui conduisent à la formation d’une étoile – qu’elles soient du même type que le Soleil ou plus (ou moins) massive -, beaucoup s’intéressent à l’émergence de leurs sous-produits, les planètes. Comment se prépare une Jupiter ou une Terre ? Comment obtient-on un système planétaire qui ressemble au nôtre ? etc. Pour tenter d’y répondre, les chercheurs vont dans leurs laboratoires (et non leur cuisine) pour essayer de retrouver la recette en préparant des simulations. Certains ingrédients leur sont soufflés, entre autres, par l’étude cosmochimique du milieu interstellaire (nuages moléculaires) et aussi des comètes, lesquelles conservent des traces des conditions qui régnaient aux origines du Système solaire. Bien entendu, les observer en train de naître est très précieux pour comparer les modèles avec la réalité. Mais les différences d’échelles font que jusqu’à présent, il a toujours été plus facile d’étudier des proto-étoiles que des proto-planètes.
Toutefois, cela est en train de changer grâce aux progrès techniques et aux nouvelles générations d’instruments. Souvenons-nous, pour l’une de ses premières observations avec la totalité de ses antennes déployées, Alma (Atacama Large Millimetre/sub-millimetre Array) nous avait émerveillés en novembre 2014 en nous dévoilant le disque de poussière – subdivisé en anneaux – qui entoure la très jeune étoile HL Tauri. Jamais un disque protoplanétaire n’avait été vu avec autant de détails auparavant. Cela ne se passe pas très loin du Système solaire, c’est à environ 450 années-lumière en direction du Taureau, dans le « terreau » encore très sombre d’une pépinière d’étoiles.
Avec le VLA (Very Large Array) basé au Nouveau-Mexique, une équipe est allée encore plus loin dans l’intimité de l’étoile en nous révélant les régions les plus proches. Et là, surprise…
À gauche : le disque protoplanètaire de HL Tauri observé avec Alma (fin 2014). À droite : région centrale observée cette fois avec le VLA. Dans l’anneau grumeleux, on distingue un agrégat de matière (_clump_) qui semble se détacher. Sa masse est estimée entre 3 et 8 fois celle de la Terre. Une super-Terre est peut-être en train de se former — Crédit : Carrasco-Gonzalez et al., Bill Saxton, NRAO, AUI, NSF
Un développement ultrarapide
Dans les premiers « cercles » autour de HL Tauri, on distingue au sein de l’anneau grumeleux de poussière, une motte assez dense qui se détache du reste. Sa masse est estimée entre 3 et 8 fois celle de la Terre, ce qui en fait un très bon candidat pour un embryon planétaire (peut-être une super-Terre, mais il faudra attendre encore quelques millions d’années).
Les chercheurs sont intrigués. Selon les modèles, la fabrication des planètes est un processus très lent au sein d’un disque de gaz et de poussières supposé uniforme. Doucement les particules s’agrègent pour former des blocs de plus en plus gros jusqu’au planétésimal de tailles variables et, par la suite, des planètes. Il y a une véritable course contre la montre, car parallèlement, le rayonnement de plus en plus intense de la jeune étoile balaie les matériaux les plus volatiles dans son entourage, menaçant ainsi de tenir en échec les embryons de planètes. Plus le temps passe, plus il difficile de mettre en œuvre un ou des compagnons planétaires. Aussi, si au bout de 10 millions d’années, rien n’a émergé, cela ne se fera jamais…