Des reptiles et des amphibiens toujours plus menacés

Publié le 14 juin 2008 par Anne-Sophie

L’Union mondiale pour la nature (UICN) et le Muséum d’histoire naturelle viennent de publier leurs évaluations sur l’état de l’herpétofaune française. Aujourd’hui, quatorze espèces de reptiles et amphibiens sont menacées de disparaître du territoire métropolitain à moyen terme.

Nos campagnes coasseront-elles encore demain ? L’Union mondiale pour la nature et le Muséum d’histoire naturelle sonnent l’alerte. C’est une espèce de reptile ou d’amphibien sur sept qui pourrait bientôt disparaître de l’Hexagone si aucune mesure drastique de conservation n’est lancée rapidement. Le haut de la liste rouge est occupé par des espèces occupant une très petite portion du territoire français: la Grenouille des champs, par exemple, et le Pélobate Brun, qui trouvent en Alsace la limite ouest de leur répartition européenne. L’assèchement des zones humides et le comblement des mares, s’ils ont diminué depuis le durcissement législatif et un début de prise de conscience par les agriculteurs, n’en demeurent pas moins des phénomènes persistants qui obèrent la survie des amphibiens les plus exigeants. La pollution des eaux par les épandages de toutes sortes voue ces animaux au même sort : contaminées par les pesticides et les engrais chimiques, les mares n’assurent plus le développement des larves d’amphibiens.

Salamandre de Lanza, Queyras, juin 2007 (Richard Gonzalez)

Danger en montagne

Même quand ils ne sont pas directement dépendants du milieu aquatique, les amphibiens pâtissent de l’évolution des pratiques humaines. En témoigne la situation alarmante de la Salamandre de Lanza, un amphibien totalement terrestre. Présent uniquement dans la vallée du Haut-Guil, dans le massif du Queyras, ce petit urodèle noir de jais voit aujourd’hui ses dernières populations fondre comme neige au soleil. Causes principales : la surfréquentation touristique et le réchauffement climatique, particulièrement perceptible en montagne. C’est à ces altitudes aussi que le danger guette plusieurs espèces de reptiles : récemment découvert, le Lézard d’Aurelio, confiné aux Pyrénées ariégeoises, voit sa survie hypothéquée par d’éventuels projets d’extension de stations de ski. Dans les Alpes du Sud, la Vipère d’Orsini doit sa raréfaction rapide à l’embroussaillement de son habitat après l’abandon du pastoralisme, en plus des dégradations causées par la création d’infrastructures routières. Quant à l’une de nos deux Tortues aquatiques, la Cistude d’Europe, la fragilisation accélérée de ses populations cumule plusieurs origines : la dégradation des marais, mais aussi celle des terrains propices à la ponte et la concurrence acharnée avec la Tortue de Floride déversée de nos aquariums.

Des chiffres qui pourraient doubler

Parmi les autres espèces en danger, la liste mentionne le Sonneur à ventre jaune, un petit crapaud inféodé aux ruisseaux champêtres et aux suintements subforestiers, donc très menacé par le réchauffement et les aménagements divers, ainsi que la Grenouille de Lessona, très sensible à la pollution et victime de l’envahissement de la Grenouille-taureau d’Amérique. Etonnamment, le rapport de l’UICN et du Muséum d’histoire naturelle n’insiste sur aucune espèce de triton. Toutes ne sont classées qu’en “préoccupation mineure”. Une analyse à l’échelle régionale aurait permis de contraster la situation de certaines d’entre elles. En particulier le Triton marbré et le Triton crêté restent très vulnérables, respectivement dans le sud-ouest de la France et dans la région Rhône-Alpes, suite au bouleversement des milieux avec l’urbanisation non raisonnée et l’intensification de l’agriculture. Il est à craindre qu’elles ne viennent gonfler la liste des espèces menacées d’extinction en France dans les prochaines décennies : l’UICN prévoit que “ces chiffres pourraient doubler dans les années à venir sans une action efficace pour l’état de nos milieux naturels”.