Babel Med Music- Dock des Suds à Marseille ( seconde journée) le 18 mars 2016
Hier, les salles étaient principalement occupées par des professionnels qui observaient et discutaient des groupes qu'ils pourraient faire tourner en Europe. Ce soir, le grand public est présent et se fait entendre.
ALIF NAABA ( Burkina Faso) - Chapiteau
Issu d'une famille princière et descendant du Mogho Naaba Konkis du village de Konkistenga au Nord-est du Burkina Faso, Alif Naaba nous délivre une musique folk avec des textes en français et en mooré, langue voltaïque de la famille nigéro-congolaise. Sa lignée royale remonte au 12e siècle à la fondation du royaume Mossi.
Consolez-vous, nos rois et princes au Moyen-âge profitant du droit de cuissage ou droit de jambage avaient des relations sexuelles avec la femme d'un vassal ou d'un serf la première nuit de ses noces.
Il y a une probabilité que du sang bleu coule dans vos veines.
C'est un prince aux pied nus qui revisite les traditions musicales. Ses chansons évoquent l'Afrique de l'Ouest d'aujourd'hui.
Manita: Il explique avant d'entamer cette chanson que les musiciens n'ont pas facilement de relations stables sous la pression des familles. Qui veut d'un homme qui n'a pas les moyens de s'acheter une paire de souliers?
ll est un chanteur qui a une voix claire de griot comme Baaba Maal, Salif Keita.
Alif Naala, notre prince milite pour la paix et le développement.
AUTOSTRAD (Jordanie) - Salle des Sucres
Autostrad, un groupe en autoproduction qui affirme son indépendance. Il fait sensation dans les pays du Proche-0rient et de l'Afrique du Nord avec sa formule de reggae, rock, latino et rock alternatif.
Les musiciens composent essentiellement sur un mode de gammes occidentales, mais les paroles sont dans l'arabe dialectal de leur région. L'un des deux chanteurs parle quelques mots de français.
Ils ont créé une polémique en jouant à Ramallah, sur les hauteurs du Golan, dans la vieille ville de Jérusalem car ils avaient besoin d'un visa octroyé par l'ambassade d'Israël à Amman, la capitale jordanienne pour passer le Jourdain. Ils brisent les tabous et représentent les aspirations de la jeunesse qui désire des textes reflétant la vie quotidienne et non de la poésie à l'eau de rose leur cachant la vérité.
Estann Schwai: une jolie chanson pop avec un rythme lent de reggae qui me fait penser à Chris Rea ou 10CC. Une mélodie super relax se terminant avec un jeu de saxophone.
Habeetak Bel Turki: de jolis solos de guitare avec un son jazzy ou s'apparentant au style de Carlos Santana, accompagnent toute la chanson.
Le terme "Arabic Street Mediterranean indie" convient bien au groupe.
BREABACH (Ecosse) - Chapiteau
Nous sommes serrés comme des sardines pour assister à la prestation de Breabach. Le groupe écossais, créé en 2005 est depuis longtemps sorti de ses frontières et parcourt le monde entier.
Les musiciens montent sur scène dans une obscurité totale. Nous entendons une flûte, puis une voix.
Les projecteurs s'allument, des cris et des sifflements dans la foule et nous voilà partis pour 45 minutes de concert. Le travail collectif se remarque sur scène, les musiciens présentent à tour de rôle les compositions.
Les spectateurs ne peuvent maintenir leurs émotions et sautent sur le plancher du chapiteau. Nous ne sommes pas au Far West américain, mais l'ambiance propulsée par la rythmique et l'énergie contagieuse de Breabach est au rendez-vous.
Monday night at Ricardos's: une mélodie entraînante qui incite les festivaliers à frapper des mains.
Proud to play a pipe: une composition datant de plus de 300 ans affirmant leur identité écossaise. L'excellente voix de Megan, également chanteuse principale du groupe, accompagne durant les derniers couplets et refrains.
Gig face: un instrumental avec Megan Henderson au violon, Ewan Robertson à la guitare, James Lindsay à la contrebasse et Calum MacCrimmon et James Duncan Mackenzie aux flûtes.
Ils invitent le public à les accompagner durant le refrain. Le pari est gagné et la joie vibre sous le chapiteau
Un micro est attaché avec des bandes adhésives au plancher de la scène. Étant debout au premier rang, collé contre les barricades, j'ai bien observé les pas de danse de Megan durant deux morceaux.
Derrière les morceaux festifs se cache la crème des musiciens écossais avec un solide bagage universitaire musical et la passion de créer. Ils sont heureux d'être à Marseille, souriant durant une grande partie du concert.
Marseille a réservé un accueil très chaleureux à nos musiciens écossais habitués au rude climat des Highlands.
TEMENIK ELECTRIC (France) - Salle des Sucres
Temenik Electric, cinq musiciens sur scène pour nous faire (re)découvrir leur Arabian Rock. Le groupe s'est construit sur les apports culturels des membres mélangeant la musique occidentale, le reggae, le funk et des racines nord-africaines. Ils chantent en arabe dialectal du nord-ouest d'Oran, mais font parfois des incursions dans la langue française ou anglaise.
Le concert s'ouvre avec une longue intro de chants d'incantation ou de transe. Ensuite nous passons au hard rock et des riffs incisifs de guitare électrique. A la fin du morceau, les musiciens dansent avec des petits pas.
Denia: un chant soutenu par une rythmique énergique, soutenue par une puissante ligne de basse ronflante. Le claviériste intervient avec des sons de synthé oscillants et des arrangements ingénieux. Entretemps, le chanteur interpelle la foule "Salam aleikoum, je vous salue".
Durant le dernier morceau "Ouesh Hada" (qu' est-ce qui se passe? en arabe), l'ambiance est nettement plus orientale.
Temenik Electric est un groupe concerné, mais non engagé, sans revendications politiques ou philosophiques. Son discours est celui de l'universalité.
Il n'est pas étonnant que Justin Adams (Tinawiren, guitariste de Robert Plant) s'est intéressé à la production de leur dernier album "Inch Allah Baby" vu les nombreuses qualités du groupe.
Charles Eloy.