Par Patrick Criqui | 21/03/2016
La quatrième révolution industrielle sera verte ou ne sera pas !
Publié le 24 mars 2016 par Blanchemanche
#Transitionéconomique
Par Patrick Criqui | 21/03/2016
La première révolution industrielle avançait au charbon… Quid de la prochaine ? (Crédits : DR)Le déploiement d’une « quatrième révolution industrielle verte » permettrait la relance durable de l’économie mondiale. Par Patrick Criqui, Directeur de recherche au CNRS, laboratoire GAEL axe Économie du développement durable et de l’énergie (EDDEN), Université de Grenoble AlpesLa première révolution industrielle, au XIXe siècle, aura été celle de la vapeur, du charbon et des chemins de fer ; la deuxième, un siècle plus tard, celle de l'électricité, du pétrole et de l'automobile. La troisième, celle des technologies de l'information et de la communication (TIC), n'aura pas entraîné de transition énergétique, renforçant même les industries en place par des progrès technologiques (notamment pour l'exploitation des hydrocarbures non conventionnels). Quarante ans après le premier choc pétrolier, les énergies fossiles représentent toujours plus de 80 % de l'approvisionnement énergétique mondial.Or l'horizon est aujourd'hui clairement celui de la décarbonation profonde, à atteindre avant 2050. Cette nouvelle transition suppose le remplacement accéléré d'une grande partie du stock d'infrastructures et d'équipements énergétiques. Les efforts pour y parvenir constitueront-ils un frein à la croissance ou, au contraire, le support d'une nouvelle croissance, dans une quatrième révolution industrielle « verte » ?Cette question cruciale se pose alors même que les économistes sont aujourd'hui divisés dans leur appréciation des risques de crise systémique ou de ralentissement structurel de la croissance. Le débat sur la « stagnation séculaire » en témoigne. Évoquer la possibilité d'une quatrième révolution verte nécessite donc de reconsidérer les grandes tendances de l'économie mondiale. On a toutefois toutes les raisons de penser que son déploiement serait la meilleure option, et peut-être la seule, pour une relance durable - dans les deux sens du terme - de l'économie mondiale. Schéma extrait de « L'an 200 de la révolution industrielle » (« L'Expansion », octobre 1982). Author provided
Apparaît parallèlement, pour les pays émergents, le concept de « trappe de croissance » dû à la contradiction forte entre des consensus sociaux fondés sur l'accès à la consommation et la nécessité de maintenir un niveau élevé d'investissement pour les infrastructures nécessaires à la croissance. Dans des pays comme le Brésil, l'effondrement du prix des matières premières depuis 2014 n'arrange rien. Parmi les contributions les plus récentes à ces analyses, on remarquera l'étude que vient de publier France Stratégie sur la croissance dans la décennie 2017-2026. Elle permet d'intégrer de manière très cohérente la thèse des vents contraires, au Nord comme au Sud. Estimations France Stratégie, à partir des prévisions des données WEO., Author provided Schéma extrait de « Catch the wave » (The Economist, 1999). Author providedQuels seraient les ressorts d'une reprise durable de l'économie, une fois la crise surmontée ? Plusieurs rapports, issus du monde des affaires, proposent aujourd'hui des réponses. Le plus récent est celui élaboré par le World Economic Forum : « The Fourth Industrial Revolution » (2016). D'une certaine manière, il répond aux objections de Robert Gordon, qui souligne le caractère finalement très inessentiel de bien des innovations apportées par les TIC (« Entre votre smartphone et le tout-à-l'égout, que choisiriez-vous ? », demande-t-il à ses étudiants).Car la thèse de la quatrième révolution industrielle s'appuie sur l'application possible des technologies de l'information pour une gestion du monde matériel qui soit plus efficace, plus intelligente, plus économe en ressources et environnementalement plus performante : l'intégration massive des énergies renouvelables, les smart grids, l'Internet des objets, les biomatériaux, l'écologie industrielle, sont autant de composantes essentielles de cette révolution à venir.On reviendrait alors, à travers cette nouvelle révolution industrielle, à la perspective évoquée en introduction : celle de la transformation des systèmes sociotechniques à la fois comme opportunité et comme condition d'une nouvelle croissance. Une croissance qui devra être « respectueuse de l'environnement et socialement inclusive » (Ignacy Sachs), sans quoi elle se heurterait aux crises sociales et environnementales ainsi qu'à la raréfaction des ressources. _____Par Patrick Criqui, Directeur de recherche au CNRS, laboratoire GAEL axe Économie du développement durable et de l'énergie (EDDEN), Université de Grenoble Alpes.La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation http://www.latribune.fr/opinions/tribunes/la-quatrieme-revolution-industrielle-sera-verte-ou-ne-sera-pas-558386.html
Par Patrick Criqui | 21/03/2016