Lorsque je manque de lumière,
la lumière me paraît impossible.
Lorsque je me trouve hors du poème,
le poème me paraît impossible.
Lorsque je cesse de te regarder,
tu me parais impossible.
Lorsque je perdrai la vie,
la vie me paraîtra impossible.
Et si je pouvais ne pas penser,
penser me paraîtrait impossible.
Du dehors d’une chose,
cette chose est impossible.
Et du dehors de tout,
tout est impossible.
Mais il y a une exception :
moi-même, du dedans,
je suis aussi impossible.
*
Cuando carezco de luz,
la luz me parece imposible.
Cuando quedo afuera del poema,
el poema me parece imposible.
Cuando dejo de mirarte,
tú me pareces imposible.
Cuando pierda la vida,
la vida me parecerá imposible.
Y si pudiera no pensar,
pensar me parecería imposible.
Desde afuera de una cosa,
esa cosa es imposible.
Y desde afuera de todo,
todo es imposible.
Pero hay una excepción:
desde adentro de mí,
yo también soy imposible.
***
Roberto Juarroz (1925-1995) – Douzième poésie verticale (Duodécima poesía vertical, 1991) – Traduit de l’espagnol par Fernand Verhesen