D’après le Professeur Gil Tchernia

Publié le 20 mars 2016 par Halleyjc

L’article de Henriette Sarraseca me semble insuffisamment informé et dangereux pour deux raisons :
– 1) il donne de faux espoirs aux malades
– 2) l’achat de médicaments inutiles grève le budget des familles et retentit sur leur pouvoir d’achat pour des médicaments essentiels et la nourriture. Il est donc important de donner un autre éclairage au débat.

Dès 1999 des médecins spécialistes de la drépanocytose ont été alertés sur ce produit prôné par Monsieur Ménégan Fagla, en particulier le Pr Orsini à Marseille et le Pr Girot à Paris.
Monsieur Orsini, mis en cause par Monsieur Fagla qui l’a présenté comme une caution scientifique écrit le 16 décembre 1999 : »Je ne pouvais évidemment pas cautionner un médicament dont j’ignorais la nature, l’origine et les effets et qui n’avait pas fait l’objet d’une étude clinique et biologique rigoureuse.. J’avais proposé au Docteur Fagla de l’aider à la réalisation de cette enquête indispensable. A ce moment là le Dr Fagla a disparu… »

Le 21 mai 1999, le Pr Girot écrit « Je pense qu’il s’agit d’une escroquerie de plus concernant les médicaments contre la drépanocytose.. »

Le 5 novembre 1999, le Dr Solange Kouo Epa, représentante de l’OMS écrit « J’ai moi-même, en ma qualité de représentante de l’OMS recommandé itérativement au Docteur Ménégan-Fagla de présenter le dossier du VK500 à l’OMS officiellement pour étude….. A l’heure où je vous écris je n’ai pas reçu de dossier de la part de notre collègue… »

En novembre 2001, malgré l’absence de dossier scientifique valide, l’AMM est obtenu pour ce produit au Bénin avec le soutien d’un groupe français.

Entre 2002 et 2003, lors de réunions de l’Organisation Internationale de Lutte contre la Drépanocytose, nous avons plusieurs fois été interpellés par des représentants de ce groupe sur notre silence vis à vis de ce médicament et notre soi-disant indifférence vis à vis de la pharmacopée africaine traditionnelle et donc des malades.

En octobre 2003, après avoir rencontré des représentants de deux sociétés françaises et Monsieur Ménégan, j’ai signé un accord de confidentialité d’un an pour expertiser ce médicament.

Cette expertise devait portersur 3 points :

– 1) analyse des observations cliniques fournies par Monsieur Ménéganconcernant des drépanocytaires traités et suivis par lui.

– 2) essai de réversion de la polymérisation in vitro en présence de VK500 à différentes concentrations, par l’analyse des indices érythrocytaires (Advia 2000), de la déformabilité cellulaire en gradient osmolaire (ektacytométrie) et par l’analyse de la polymérisation de solutions d’hémoglobine.

Les deux premières parties ont été réalisées dans mon laboratoire au CHU de Bicêtre et la troisième dans l’Unité INSERM 299 (Mike Marden).

-3) un budget avait été dégagé par l’un des partenaires français pour compléter cette étude par une étude in vivo sur des souris rendues drépanocytaires par manipulation génétique. Il s’agissait du modèle dit Berkeley de souris drépanocytaires et cette expérimentation devait avoir lieu au laboratoire du Children’s Hospital de Oakland.

L’analyse des dossiers a montré que le caractère jugé favorable des effets du traitement ne reposait sur aucune méthodologie clinique sérieuse et sur aucun critère objectif.
Les essais in vitro ont été entièrement négatifs.
Monsieur Ménégan venu pour en discuter s’est montré très abattu, a considéré que probablement nous n’avions pas reçu le bon lot du produit et a proposé de revenir lui-même assister à de nouvelles expérimentations avec les échantillons adaptés de son produit, ce que j’ai bien entendu accepté. Je ne l’ai jamais revu et l’expérimentation à l’aide du modèle murin n’a pas eu lieu.

Je ne mets pas en doute l’effet possible de Fagara zanthoxyloïdes sur certains aspects de la drépanocytose. Cet effet reste à démontrer.

En revanche je puis affirmer que le VK500 est dénué des effets que lui attribue Monsieur Ménégan. L’effet clinique n’est pas démontré par un essai conduit selon les bonnes pratiques médicales. La réversion de la falciformation ou de la polymérisation n’a pas été observée in vitro.

Les différents partenaires ont refusé l’expérimentation animale.

Professeur Gil Tchernia
Centre d’information et de dépistage de la drépanocytose
37 Bd Saint Marcel
75013 Paris
0142171300
27 juin 2007