Publié le 19/03/2016 par Frédéric zabalza
Payant de 1979 à 1991 (ici en 1989), le pont d’Oléron pourrait le redevenir après vingt-cinq années de gratuité.© ARCHIVES PHOTOS « SUD OUEST »
Le projet, qui sera validé ou non par le Département ce jeudi, avant une consultation le 26 juin sur l’île, ne trouve pas beaucoup de partisans de l’autre côté du pont.
«C'est une c… ce péage. Quand il pleut, ils viennent chez moi », confiait il y a peu un élu du sud de la Charente-Maritime à ses collègues et voisins, lors d'une réunion à la préfecture. Notons que ces derniers partageaient son avis.Si l'idée de la fin de la gratuité du pont d'Oléron fait son chemin dans l'île, elle est loin d'être populaire sur le continent. En particulier à l'autre bout d'Oléron. Mickaël Vallet, maire socialiste de Marennes et président du Pays Marennes-Oléron, a pris la tête de la rébellion. Comme dans plus de 70 autres communes, le Conseil municipal marennais a voté au début du mois une motion à l'adresse du Département contre l'instauration d'un péage. « Le pont a été créé, financé, puis rendu gratuit pour servir le développement économique de l'île et du continent. Toutes les décisions le concernant ont été votées à l'unanimité par l'Assemblée départementale. Vingt-cinq ans de gratuité ont créé une interpénétration économique totale des deux côtés. On va amputer un territoire. Et ça concerne tous les Charentais-Maritimes », défend Mickaël Vallet.
"Un territoire amputé"
De l'autre côté de la Seudre, Jean-Pierre Tallieu ne mâche pas ses mots lui non plus. « C'est un système hypocrite, déloyal et archaïque pour gratter du fric », estime le maire de La Tremblade (UDI) et président de la Communauté d'agglomération Royan-Atlantique. « J'ai toujours été opposé aux péages sur les ponts, je n'ai pas changé d'avis. Une île avec un pont n'en est plus tout à fait une. Après, je comprends les Oléronnais. L'exemple de Ré est intéressant : le péage permet de limiter la fréquentation automobile, mais pas seulement. Quand les comptes liés à la construction ont été équilibrés, on a inventé l'écotaxe. Elle n'est pas appliquée complètement puisque lorsqu'il y a des travaux de renforcement des digues, ce sont des financements traditionnels qui sont mis en œuvre. »La rédaction vous conseille- Charente-Maritime : un pont d’or pour Oléron… à condition d’accepter le péage
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"Barrage payant"
Il faudra voir aussi quelles conséquences provoqueraient ce « barrage payant » à l'entrée de l'île. Quelques exemples qui donneront matière à réflexion ? L'agence Pôle emploi de référence, qui se trouve à Saint-Pierre-d'Oléron, quand le lycée de secteur est situé à Bourcefranc-le-Chapus. Citons encore les professions médicales, dont les patients passent régulièrement le pont, le Club d'entreprises du Pays Marennes-Oléron, qui serait sans doute scindé en cas de péage, l'Université du temps libre, qui se trouverait écartelée, ou encore l'office de tourisme, qui travaille aussi bien pour les îliens que pour les continentaux.Environ 166 000 touristes passent chaque été leurs vacances à Oléron. Beaucoup d'entre eux franchissent le pont, quand les enfants s'ennuient ou quand la météo est triste. « Lorsqu'on a distribué des dépliants dans les campings oléronnais, on nous en redemande », constate Pierre Caillé, assistant directeur du Zoo de la Palmyre, qui draine un grand nombre de vacanciers de l'île. « Nous sommes plutôt contre le péage, comme tous les acteurs du tourisme en Charente-Maritime. Il y a pas mal de campings sur Oléron, avec des classes populaires en majorité, qui ne quitteront pas l'île si elles doivent payer pour revenir. Ça peut être un frein à la fréquentation touristique du département, ça dépend du montant du péage. Mais on ne connaît pas encore toutes les modalités. »Plus au nord, Nathalie Durand-Deshayes, présidente de La Rochelle Événements, en charge du tourisme dans la première ville du département, garde « un regard vigilant ». « Il faut trouver des moyens pour préserver les espaces naturels de l'île. Mais il y a le risque de sanctionner les flux naturels de touristes entre Oléron et La Rochelle. Il y a beaucoup d'excursions en été, à la fois des gens qui sont en séjour long et viennent plusieurs fois, ou même des vacanciers à la semaine qui viennent passer une journée à La Rochelle. »Quels effets pour les croisières ?« Un péage peut améliorer la liaison maritime entre Boyardville et La Rochelle, mais ça peut aussi avoir un impact négatif pour les croisières au départ d’Oléron pour fort Boyard, Aix ou Ré, car nous avons toute une clientèle qui passe le pont pour aller embarquer à Boyardville », remarque-t-on aux Croisières Inter îles, à qui les élus oléronnais ont confié une délégation de service public pour la navette entre l’île et La Rochelle.Le pont payant pourrait, par conséquent, favoriser de nouveaux départs depuis le continent. C’est déjà le cas à La Tremblade, ça pourrait l’être bientôt à Bourcefranc, où la cohabitation difficile avec l’activité ostréicole n’avait pas permis aux Croisières Inter îles de s’implanter. Guy Proteau, maire de Bourcefranc-le-Chapus (UDI) et vice-président de la CdC du Bassin de Marennes en charge du tourisme, fut pourtant un des premiers élus à dire son refus du péage, « contre le principe et à cause de l’absence de concertation avec les élus du continent ».Le port de Bourcefranc sera de toute façon transformé. « On est en plein chambardement. Les Comptoirs de la mer vont ouvrir un magasin de 300 mètres carrés le 8 avril, et l’aire de carénage sera terminée fin mai. Nous allons aussi accueillir une vedette d’une compagnie de croisière qui se lance, qui fera des tours vers fort Boyard, Aix et la remontée de la Charente. Et puis je me bats (sic) avec le Département pour réhabiliter l’embarcadère. Il faudrait déjà lancer les premières études », espère Guy Proteau.http://www.sudouest.fr/2016/03/19/les-continentaux-mett-ent-leur-vetoces-communes-qui-votent-contre-2306102-1392.php