Aimer Césaire

Je me retrouve ce Samedi après midi, dans la cuisine à taper des mains, à la radio des dizaines de personnes font de même. La radio c'est çà, vous n'êtes que vos oreilles et un peu de ce qu'il y a entre, le reste laissez le à pavaner dans l'éther. Autour tout est absolument semblable et lisse et silencieux et seule aussi dans la boite de plastique branchée sur le secteur, la voix d'un comédien dont j'ai déjà oublié le nom mais n'est-ce pas cela le destin du comédien que l'on ne retienne que ce qu'il dit, même pas non plus le nom de l'auteur d'où temporairement il tire sa présence au monde. rien d'autre, je ne suis, insignifiant moi, que le vecteur de ce que je raconte et ce que je raconte n'est que l'extrait fragile en terme d'éternités de ce que l'humanité produit en pensées, en rêves, en divagations de toutes sortes. Il lui suffit à l'humanité de n'être mise en danger par rien pour qu'elle se mette à bâtir autre chose que des murs et des rumeurs. je suis la plus petite unité de sens possible mais deux de ces unités puis trois puis mille auxquelles s allient les milliards d'unités muettes et réduites et constamment rééduquées  en vue de rentabilité et enfin nous obtenons  le sens  et la paix et le progrès.  Mais avant...  Mais avant  il faut lutter et  parler encore  et saouler  d'inutiles palabres  les coeurs de  nos proches, ceux qui glissent  sans  fin  vers  le paroxysme  de leurs existences si  précieuses  au naufrage collectif.

"Le vote des irlandais ? Mais ça ne sert à rien !" Me disait hier un compagnon de turbin.

"Tu ne serais pas un peu parano ?" Me glissait avant hier une "amie" qui se contente bien entre deux verres de mauvais vin oxygéné, des choses comme elles vont.

"Les gens trouvent que mon prénom est très original !" clamait mon neveu adoré, alors que nous dînions ensemble et que déjà pillé par le système il n'avait plus que cet argument pour me convaincre de sa valeur de très jeune être humain. Déjà pillé et par ses bons parents, en tout premier lieu.

"Non mais tu sais, "il", l'enfant de cinq ans qu'elle a eut avec l'homme qu'elle vient d'envoyer balader... "Il" trouve tout à fait normal que sa maman ait retrouvé un "fiancé"." M'affirme-elle avec l'aplomb des fêlures à mi-chemin. Elle,  cette jeune femme en tout point faite pour le bonheur et qui telle l'aveugle d'un conte cherche dans sa nuit des preuves qu' on lui a donné le jour.

"Les irlandais de Vincennes ?" Le même, celui du vote,  que l'idée d'avoir encore à venir chercher son pain au cul de la machine rend malade d'épuisement.

A France Culture, cette après midi, toute une émission consacrée à Aimé Césaire et cette longue lecture d'un texte où pèle mêle mais avec ce que l'on nomme l'intelligence du monde il amasse l'Europe, la colonie, l'esclavage, la traite négrière, le nazisme, les dogmes religieux, La crasse reluisant au poitrines des uniformes, les dictatures démocrates, les philosophes de la différence des races (les nègres sont de grands enfant !), les penseurs de l'exploitation, les baptiseurs, les réformistes au coeur du système, les élites politiques, le profit et son inventeur la bourgeoisie, la petite et la grande, ces deux prostituées de la haute dont l'haleine pourrit le verbe que leur voix culière déchire comme un hymen manufacturé (là c'est moi qui en remet une couche, que Césaire me pardonne, je n'ai pas son élévation d'esprit.)...

Césaire ? Ils y sont tous allés, il y a peu. De gauche et de droite, en notre nom, ils y sont tous allés du bout du pied dans la dépouille du nègre. Nous sommes bien sûr qu'il n'enquiquinera plus personne. Plus personne ne le lit. Et c'est tant mieux ! Un poète c'est comme un électeur, ça doit fermer sa gueule. parce que tout de même...

"On n'est pas si mal !" me disait un ami qui se demandait pourquoi vu qu'il fait un peu beau, nous n'irions pas à la pêche aux salopes.