Un film de : Jeff Nichols
Avec : Michael Shannon, Kirsten Dust, Adam Driver, Joel Edgerton, Sam Shepard
Fuyant d'abord des fanatiques religieux et des forces de police, Roy, père de famille et son fils Alton, se retrouvent bientôt les proies d'une chasse à l'homme à travers tout le pays, mobilisant même les plus hautes instances du gouvernement fédéral. En fin de compte, le père risque tout pour sauver son fils et lui permettre d'accomplir son destin. Un destin qui pourrait bien changer le monde pour toujours.Les voyageurs du temps
Il y a dans la création contemporaine comme un nouvel élan, engendré par tous ces réalisateurs dont la naissance entoure les années 80, biberonnés aux rêveries des Spielberg, Carpenter, Joe Dante, Coscarelli et Bernard Rose. Jeff Nichols, peut être le plus célèbre des " Millenials ", use à pleins poumons du principal trait esthétique de cette bande de jeunes ; un naturalisme fantastique, teinté de mélancolie, comme le souvenir un peu triste d'une enfance au cœur des 70´s. C'est une mémoire fantasmée, brodée de champs de blé et de couchers de soleil. Comme dans un rêve, on y trouve l'architecture, l'esthétique de ces années-là, et leur étrange apaisement, d'où ont disparu tous les protagonistes, exception faite d'une poignée de spectres ; pères, fils, soldats et enseignants, autant de figures jungiennes semées au creux d'un univers solitaire dont la barrière ne sera jamais franchie. Le mariage entre les grands fantasmes de Spielberg, leurs solitudes mythologiques, et la mémoire de ses successeurs, mémoire dont le maître fait bien évidemment partie. L'idée d'un cinéma qui, si on le disait cantonné aux années 80, prouve qu'il peut exister sur le long terme, pour peu que ses nouveaux dépositaires en nuancent les facteurs selon leurs propres règles ; ça n'est qu'ainsi que les contes survivent au temps qui passe. Pour sa dernière œuvre, Jeff Nichols s'attaque enfin à un genre dont chacun rêvait de le voir s'emparer. Pas le fantastique démesuré des grands studios, mais celui des Carpenter et Spielberg d'autrefois, drapés d'une texture plus proche de notre monde, préférant aux travellings imposants le mouvement des herbes, l'odeur des tissus et des vieilles voitures. Un fantastique naturaliste, moins voyageur peut-être, mais à coup sur, plus immersif.
Solitude enchantée
Fort de son nouveau statut, Nichols s'offre un plaisir de gosse, bardé de référence, sans trop en faire, préservant ce naturel sobre et élégant qui fait l'essence de son cinéma. Une fusion qui, si elle soulève quelques doutes à ses débuts, a tôt fait de convaincre de son bien-fondé, tant l'impression qu'elle dégage est unique et agréable. La mise en scène est bien là, tissée d'élégance, de structures superbes, et de ce rythme si particulier entre la lenteur des facteurs naturels, lumière ou jeux d'acteurs, et les fulgurances fantasques, qui conservent dans leur simplicité la patte de leur auteur. On y trouve certains effets, tirés du kitsch d'autrefois, ponctuant un scénario comme il les aime, minimaliste et mythologique, et ce brin de nostalgie qui l'accompagne partout par où il passe. Même lorsqu'on le place aux commandes d'un aussi beau jouet, Nicholson est un de ces types qui ne peuvent se défaire de leur mémoire. Pendant quatre films, il a parlé du passé. La question se pose : où ira-t-il ensuite ? Pour l'instant, il en reste là, et ça marche toujours aussi bien.
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