Le jardin est celui de Carl Linnaeus, autrement dit Linné. C’est le botaniste suédois qui a classé les espèces, et notamment les espèces végétales, en leur attribuant un double nom latin, au XVIIIe siècle. L’auteur de ce livre est le directeur artistique du Théâtre dramatique royal de Stockholm.
Les paragraphes qui forment l’ouvrage se succèdent donc comme autant de scènes brèves où se jouent les principes du botaniste. Il y a cette opposition permanente avec le premier jardinier, comme si le savant n’acceptait pas ce que la nature produisait, puisque tout est établi depuis l’origine, comme on le croyait ferme à cette époque. Les différences n’étaient que fantaisie, éphémères. Il savait débusquer les fausses mutations et n’acceptait aucune dérogation aux règles qu’il avait édictées sur ce principe : « il n’y a qu’un Créateur ». Mais, peu à peu, ses certitudes vont être ébranlées. Une plante de la famille des Linaria va présenter des particularités qui vont l’obliger à y reconnaître une nouvelle espèce. Autour de lui, des étudiants, un jardinier (le second sera mieux toléré parce qu’il joue de la musique), ses frères et soeurs et d’autres personnages. Ainsi ce Lövberg qui dira au jardinier après lui avoir raconté une histoire à laquelle ce dernier ne croit pas : « tu ne l’oublieras pas, jardinier. Elle existe désormais, tu ne t’en débarrasseras jamais. »
On traverse un jardin (doit-on dire aller au jardin ou dans le jardin ?), on observe des expériences, on partage des rêves, on accompagne un homme du XVIIIe siècle dont le nom nous est parvenu par-delà ses derniers instants où il a perdu de son assurance puis de son vocabulaire même.