"Tout le monde ment dans cette histoire. Tout le monde a ses raisons de mentir. Parfois, tout le monde sait que tout le monde ment. Ça vaut mieux pour tout le monde. On sait à quoi s'en tenir."
Peter Matteus mène une vie équilibrée à première vue : publicitaire, il bénéficie d'une vie de famille harmonieuse. Jusqu'au jour où son passé le rattrape : il reçoit d'abord des photos de sa femme et de leurs enfants accompagnés de la clé d'une consigne, et la consigne le mène droit vers son histoire trouble qu'il avait tenté d'occulter. Quand sa femme reçoit des billets d'avion pour qu'ils s'envolent tous deux vers la Costa de Sol, le doute n'est plus permis, Peter n'a plus le choix, il doit revenir sur ses pas pour affronter les démons de sa mémoire.
Peter se trouve pris dans une machination diabolique, payant les erreurs ou errances de son passé. A l'heure de régler ses dettes, il met la vie de sa femme et de ses enfants en danger.
Le style d'Edwardson se met au diapason des sentiments suffocants de Peter, comme si les phrases courtes imitaient les pulsations du coeur qui s'accélère, le point venant ponctuer un manque d'air prégnant. Attentif à ses sensations, Peter se concentre sur ce qu'il voit, sur sa présence au monde, pour éviter de ressasser ses souvenirs traumatisants, ou de penser au futur angoissant. A côté du couple acculé, la vie continue, leur faisant ressentir encore plus durement leur décalage :
"Ils vont au bar près de la piscine. C'est l'happy hour. Ils commandent une bière pour lui et une eau minérale pour elel. Deux verres pour le prix d'un. Ils restent au bar. Il pose la petite glacière sur le comptoir, à côté de son verre de bière." p. 189
Ce rendez-vous à Estepona sera comme un rachat des fautes passées pour Peter qui comprendra pleinement l'impact de ses actions sur le présent. Pour protéger ceux qu'il aime, il aura dû leur mentir, en oubliant que rien ne s'efface ici-bas.
Un épisode loin de la série des Winter mais tout aussi puissant...
Rendez-vous à Estepona, Ake Edwardson, traduit du suédois par Rémi Cassaigne, 10/18, septembre 2015, 7.50 euros