Je fais un détour par le parc qui jouxte l'imposant Château d'Osaka. L'entrée est payante, 100 ou 200 yens et il n'y a rien à y faire, rien à y voir. Il doit être magnifique au printemps tant les cerisiers y sont nombreux. Mais aujourd'hui c'est l'été. L'herbe verte tend vers un jaune paille, il fait une température caniculaire, le parc est complètement désert. Pourtant je paie et j'y rentre.
Je marche en essayant de trouver un peu d'ombre le long des larges allées de petits cailloux blancs. Peine perdue, il fait une chaleur d'enfer. J'ai plutôt mal géré ma journée. Je me suis baladée dans les rues de la ville et j'ai visité le Musée d'histoire avant de partir pour le Château d'Osaka. Résultat, il est près de midi et je cuis même à l'ombre ! Qu'importe, je supporte plutôt bien la chaleur. Ou disons que je la supporte moins mal que d'autres !
Au fond de l'immense jardin il y a une maison de thé. De maison de thé elle n'a que le nom désignant un style de bâtisse qui servait à la cérémonie du thé autrefois. Ici aussi, personne. Quelques bancs couverts de fins coussins de cuir sont disposés dans la seule pièce, bien que vaste. À la japonaise, tout le flanc de la maison de thé est composé de panneaux coulissants en papier de riz. Ils sont ouverts, donnant le sentiment que la plaine n'est autre qu'une immense terrasse d'herbe s'étendant presque à perte de vue.
Un panneau de bois demande à ce que l'on se déchausse avant d'entrer. Ce que je fais, bien évidemment. Nous sommes au Japon, le respect est de mise. En France certains s'en ficheraient complètement, faisant fi de l'écriteau comme s'il n'existait pas. Mais ici on ne procède pas ainsi.
Alors je me déchausse et bientôt mes pieds parcourent avec plaisir le parquet vernis qui crisse très légèrement sous mes pas.
Personne. Pas un bruit. Seules les traditionnelles et incontournables cigales japonaises donnent de la voix. Et encore... ai-je l'impression qu'elle se font plus discrètes. Peut-être sont-elles, elles aussi, assommées par la chaleur.
Certains endroits sont chargés d'une énergie étrange. Je ne suis pas dans un temple ni dans un lieu qui amène à une solennité particulière. Pourtant je ressens une profonde sérénité, une très agréable quiétude. Ces instants si précieux où rien ne peut arriver, ni de mal, ni de bon. Juste le calme, la sagesse qui fait parfois si cruellement défaut. Alors je reste assise, longuement, à fixer le parc qui semble somnoler sous mes yeux.
Personne ne vient. Personne ne me dérange, ne m'interrompt. Je ne pense pas vraiment. Je suis là, voilà tout.