Cette guégerre prend des proportions hallucinantes. J’ai découvert que, parmi les lecteurs très assidus de ce blog et de celui d’Oanèse, il n’y avait pas que des gens qui me veulent du bien.
En lisant ce coup de gueule, sur les gourmandises de Philippe (Toinard), j’ai un peu de mal à comprendre sa position… L’article commençait pourtant bien : dé-solidarisation de l’ancienne génération de critiques gastronomiques professionnels qui a abusé et qui ternit l’image de ce métier. Heureusement qu’ils sont en voie d’extinction et de moins en moins lus, il semble que personne ne les regrettera… Très bien! Par contre la seconde partie est un peu triste : selon moi, il en a dit trop ou pas assez.
Les gentils
La nouvelle génération de critiques gastronomiques visite les adresses de manière anonyme, bravo (quoique, quand on a une photo de soi, même partiellement masqué, sur la page d’accueil de son blog, on est un peu moins anonyme). Elle ne paie rien, pas plus que ses ainés, puisque ça passe en notes de frais. Elle est payée pour ce qu’elle écrit et c’est bien normal, parce que c’est son métier. Tant mieux pour elle. Mais il y a tout simplement un biais systématique avec les clients ordinaires.
Par contre elle ne paie toujours pas pour ce qu’elle mange. Avant, c’était le restaurateur qui payait pour la critique, aujourd’hui, c’est le journal pour qui travaille la critique. Tant mieux pour la critique professionnelle, elle n’a pas (plus) besoin d’amadouer, ni d’intimider les restaurateurs. Mais de la à dire que la critique professionnelle publiée dans la presse est indépendante, Léo Fourneau nous a montré que ce n’est pas tout à fait vrai!
Par définition, un critique pro ne sera jamais à la place d’un client anonyme, qui paie pour tout ce qu’il mange et boit et qui se fait offrir, de temps en temps un petit truc (café, digestif, apéro…) par un restaurateur qui trouve que c’est un bon client, ou qui fait un geste commercial. La critique professionnelle s’améliore, certes, mais il demeure encore un énorme fossé avec le client.
D’autres gentils?
C’est pour ça que les amateurs ont leur mot à dire. Des sites comme CityVox, Qype, Mmmm!!! sont une aubaine, puisqu’ils permettent d’avoir l’avis de personnes “ordinaires”. C’est à double tranchant. C’est vrai que le fait de laisser tout le monde s’exprimer (la démocratie participative) a du bon, mais parfois, il y a beaucoup de bruit. Et puis il y a des petits malins, restaurateurs, ou payés par des restaurateurs (que ces derniers soient, ou pas, au courant de ces façons de faire), qui tentent de biaiser le consensus. On fera plutôt confiance à ceux qui ont déjà publié pas mal d’avis et dont on se sent assez proche. Chacun ses préférences, c’est tout à fait normal.
Il y a d’autres sites, dont je suis moins fan, qui ont au moins le mérite d’être clairs : RestoàParis (trop sell side, on ne peut pas suivre les avis déposés par une personne), ParisGourmand (j’ai du mal avec le “coup de cœur”, on dirait de la pub déguisée)…
Peut-être que certains veulent devenir pro, c’est tout à fait leur droit, mais la majorité des personnes que j’ai connues à travers les blogs fait ça comme un loisir. On se prend au jeu, on est très content d’être reconnu, au sein d’abord de son cercle d’amis, puis par une petite communauté de lecteurs et autres “pairs”, des amateurs, passionnés, tenant des sites ayant les mêmes centres d’intérêt : Oanèse, Resto-de-Paris, Coup de Fourchette, Mr. Lung, Blog Culturel, Monica, Shizuoka Gourmet, Echo des Saveurs, Luxeat, les GoT… Il n’y a pas de complot contre les pros.
Mixlamalice et Patrice, curieux, se sont essayés à la critique et ont réalisé que cela prenait un certain temps… Moi je fais ça par plaisir, par curiosité et parce que je trouve qu’il y a un manque d’informations, que j’essaie de combler, en espérant que d’autres feront la même chose. Si je me permets d’être critique vis à vis des professionnels, ce n’est pas parce que je veux prendre leur place, juste parce que j’ai des attentes élevées et que, si les critiques sont vraiment indépendants, ils ne devraient pas avoir peur de dire qu’une adresse ne leur plait pas, à condition que ce soit pour de vraies raisons, pas des querelles personnelles ou des questions d’égo.
Pas si gentils?
D’ailleurs, on m’a fait la leçon parce que j’avais dit que certaines adresses ne m’ont pas plu et que je les trouve sur-cotées. On m’a dit que je mettais en péril des emplois. Je redis que, de toute façon, je n’ai pas tant d’impact que ça et que, dans mon vrai boulot (analyste quantitatif, en finance de marché), je peux avoir des impacts bien plus importants sur certaines sociétés. Comme je fais ça honnêtement et de manière raisonnable, ça ne m’empêche pas de dormir. Et je dis surtout à mes détracteurs que eux ne se privent pas de dire qu’ils n’aiment pas certaines adresses. Il y a surement des contradictions dans ce que je dis, mais je ne suis pas le seul.
Un méchant
Voilà pour la première partie de ce coup de gueule. Dans la seconde partie, Philippe décrit le “casseur de métier” en action. C’est bien de crever l’abcès, mais on donne de l’eau au moulin de ses détracteurs en prouvant que ces méthodes n’ont pas disparu. Pourquoi ne pas assumer et donner ses sources et le nom du lieu et de ce mauvais élève? Pourquoi ne pas mettre sa photo et lancer un wanted, comme d’autres le font (et je trouve ça un peu limite, mais bon)? Si l’on dit la vérité et que l’on est de bonne foi, il ne faut pas hésiter. L’endroit? D’après la description, je dirais que le restaurant, c’est le Gaigne. Mais qui est cette personne dont on parle? À suivre.
Je ne peux pas m’empêcher de penser à ce vieil article…