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(notes sur la création) Christiane Veschambre

Par Florence Trocmé

« … en ce moment, ce qui me frappe surtout, c’est qu’écrire, avant tout processus de transformation, appelle une destruction. Ce qui est, aussi, une forme de transformation, mais disons que celle-là n’est pas porteuse des images souvent "positives" que l’on associe à l’idée de transformation, la boue en or de Baudelaire par exemple. Destruction, lutte, guerre. Et l’ennemi c’est soi-même. Ce qui, en moi, cimente, bétonne, jour après jour, l’accès au territoire ignoré, ignorant de l’écriture. Quelque chose en moi m’éloigne sans cesse, pas tous les moyens, de ce lieu qui est pourtant le seul, où, je le sais, le veux et l’oublie, le crains, il y a chance d’être traversée par le vivant. C’est presque comme s’il fallait arriver à un état extrême de cette asphyxie qui se présente d’abord comme l’état normal d’un moi qui vaque aux obligations de ce qu’on appelle la vie, d’un moi qui se dit "bon, je vais écrire cette conférence pour parler du processus de transformation dans l’écriture, voyons voir ce que j’ai à dire, asseyons-nous à la table avec un stylo et du papier, prenons les choses en main et commençons.". Et un moi, par cela, occupant si bien le premier plan, et le deuxième, et l’arrière, qu’on se retrouve étouffant, le cou comme enserré par l’algue morte de l’obligation, du projet, et, au bord de l’asphyxie, parce que vivre ainsi avec l’idée d’écrire est une mort, sentir le remuement sentir le remuement lointain en eau profonde du poisson de la nécessité (qui est l’ennemie de l’obligation). »
Christiane Veschambre, La Ville d’après, Le préau des collines, 2012.
Choix d’Isabelle Baladine Howald


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