[Critique] Carol

Par Wolvy128 @Wolvy128

Dans le New York des années 1950, Therese (Rooney Mara), jeune employée d’un grand magasin de Manhattan, fait la connaissance d’une cliente distinguée, Carol (Cate Blanchett), femme séduisante, prisonnière d’un mariage peu heureux. A l’étincelle de la première rencontre succède rapidement un sentiment plus profond. Les deux femmes se retrouvent bientôt prises au piège entre les conventions et leur attirance mutuelle. Tel est le pitch de Carol, le dernier film du réalisateur, acteur et scénariste américain Todd Haynes.

Adapté du roman The Price of Salt, de Patricia Highsmith, Carol vaut surtout pour l’incroyable finesse de son scénario, ainsi que pour son extrême sobriété. L’amour naissant entre les deux femmes est en effet raconté avec une simplicité et une rigueur qui contribuent grandement à l’immersion dans le récit. Du contexte de l’époque aux relations entre les personnages, en passant par leur manière de penser, tout est perceptible sans avoir besoin de forcer le trait. En outre, même s’ils ne sont pas forcément développés en profondeur, tous les thèmes abordés au travers de la romance du duo féminin se révèlent riches et intéressants. On regrettera cependant la multiplication des intrigues qui déséquilibre certainement l’ensemble. Effectivement, si l’histoire d’amour entre Carol et Therese s’avère passionnante, la vie familiale compliquée de l’héroïne peine en revanche à captiver. Certes, elle est totalement nécessaire pour fixer les enjeux et comprendre ce qu’elle traverse, mais elle manque néanmoins un peu d’émotion que pour véritablement impliquer le spectateur. Il est d’ailleurs intéressant de constater que si Carol est le personnage central du long-métrage, c’est davantage par celui de Therese que nous vivons l’histoire.

Aussi subtil soit-il, le script ne serait toutefois rien sans les performances prodigieuses de Cate Blanchett et Rooney Mara. Les deux actrices sont de tous les plans et irradient littéralement le film de leur talent. Si la première offre une partition sans fausse note, en proposant une interprétation juste et touchante, c’est surtout la seconde qui impressionne par la formidable densité de son jeu. Contrairement à Carol, Therese traverse effectivement un véritable parcours psychologique, et Rooney Mara parvient avec brio à retranscrire son évolution. Au point d’ailleurs de nous laisser totalement désarmer lors du plan final, riche en émotion. A leurs côtés, Kyle Chandler et Sarah Paulson ne déméritent pas dans des rôles toutefois moins profonds, et même parfois caricaturaux. L’autre grande force du film relève sinon de la réalisation, maîtrisée et élégante, qui peut s’appuyer sur une photographe absolument sublime. Non seulement les images sont d’une beauté absolue mais les jeux de lumière tutoient également la perfection. Enfin, même si le thème principal de la composition musicale se répète souvent, la BO dans sa globalité s’intègre parfaitement à l’ensemble et propose de magnifiques montées en puissance.

En définitive, avec Carol, Todd Haynes signe donc un drame romantique sublime, triste et émouvant. Remarquablement porté par Cate Blanchett et Rooney Mara, le film traite avec élégance d’une histoire d’amour impossible, dont il est bien difficile de ressortir indemne. Dommage que le scénario s’enlise un peu dans ses nombreuses intrigues car le sans faute n’était pas loin.