Le lean UX favorise la collaboration en entreprise

Publié le 07 mars 2016 par Pnordey @latelier

Développer des produits ou des services selon l’approche « lean UX » renforce l’interaction entre les collaborateurs de l’entreprise et constitue une des clés pour créer une expérience utilisateur unifiée. Entretien avec Christian Égéa, design manager au Stanford Health Care.

D’origine franco-américaine, Christian Égéa a débuté sa carrière en tant que designer au sein du cabinet Attoma, en France, pour rejoindre ensuite Frog, à Austin puis à San Francisco. Après une décennie passée dans le conseil, il intègre il y a deux ans le Stanford Health Care à Palo Alto en tant que design manager de l’équipe du développement des applications. Le Stanford Health Care, renommé récemment Stanford Hospital, a été reconnu comme l’un des hôpitaux les plus connectés des États-Unis selon le U.S. News & World Report. Christian Égéa nous partage ici sa vision de l’expérience utilisateur « lean », objet de ses travaux, et son impact sur l’organisation des entreprises.

Qu’est ce que l’approche « lean UX » (centrée expérience utilisateur) dans la création de produits (physiques ou digitaux) ?

Christian Égéa : La transition que j’ai effectué dans ma carrière, d’un poste en consultant en design vers un poste de designer intégré dans l’entreprise, illustre bien l’évolution de la pensée ayant mené à cette approche du processus de design produit qu’est le « lean UX ».

Le père du « lean UX »  n’est autre que la méthodologie Agile, développée au début des années 2000. Cette dernière prône un découpage du travail en petites séquences de relativement courte durée (en semaines). Le « lean UX » vient en quelque sorte bâtir sur les fondations posées par Agile en y introduisant une méthodologie centrée sur l’humain.

Si on poursuit le parallèle avec mon parcours professionnel, je suis ainsi passé du conseil, soit d’une technique basée sur le rendu de livrables, à une pratique en continu qui s’inscrit dans la durée, en tant que designer au coeur du Stanford Health Care. Et c’est exactement ce que met en avant le « lean UX ».

Quels changements cette approche particulière de la création de produits induit-elle sur l’entreprise ?

Le « lean UX » favorise une collaboration interdisciplinaire, réunissant des équipes qui autrefois travaillaient en silos, selon la division traditionnelle de l’entreprise. En effet, selon l’approche « lean », les collaborateurs qu’ils soient développeurs, designers ou en charge du marketing, sont amenés nécessairement à travailler ensemble car s’il n’existe pas une communication fluide et constante entre eux, des erreurs pourront survenir qui impacteront la chaîne de valeur donc le produit final, au détriment de l’expérience utilisateur.

Enfin, le « lean UX » adopte aussi une vision globale intéressante puisqu’il prend en compte la faisabilité technique d’un projet, sa viabilité économique ainsi que sa capacité à résoudre un problème de l’utilisateur, ce qu’on traduirait par la notion de « fulfillment » en anglais [satisfaction] et qui revient à savoir si l’application ou l’objet créé est efficace, plein de sens, et agréable.

Concrètement comment se matérialise au Stanford Health Care la mise en place de l’approche « lean » ?

À Stanford Health Care, nous essayons d’insuffler une logique d’inclusion et de créer des opportunités de collaboration entre des disciplines qui traditionnellement ne se parlaient pas pour des questions d’organisation ou par souci d’efficacité. Nous créons de petites équipes de travail pluridisciplinaires par exemple.

Rappelons que l’hôpital compte environ 7 500 employés dont le coeur de métier gravite autour de la santé. Toutefois depuis 3 ans, un véritable changement culturel s’opère, qui se manifeste notamment par l’intégration de compétences digitales et de design en interne.

Lors des projets que nous menons, nous tentons de rapprocher la stratégie commerciale, des développeurs et des designers. Cela passe par le partage d’un même espace de travail par exemple. Aussi, nous rencontrons toutes les deux semaines des représentants de la communauté des patients. Nous leur montrons nos travaux, nous les observons en train d’utiliser nos créations puis nous révisons nos projets en fonction de leur retours.

Quels projets vous occupent en ce moment au Stanford Health Care ?

Nous travaillons à l’heure actuelle sur la scénarisation de la relation au patient à savoir comment accueillir, conseiller, simplement comment s’adresser au patient. Nous tentons de formaliser les relations humaines d’humains à humains à Stanford Health Care, créer des standards de communication et notre propre griffe. Cela revient à résoudre la problématique de l’unification de l’expérience selon les différents points de contact, en physique comme en ligne. Nous avons d’ailleurs inscrit la construction de My Health, un portail numérique à destination des patients, dans cette logique. Il s’agit d’une plateforme web qui se décline aussi en application iOS et Android et qui constitue le point de contact numérique privilégié entre les patients et le personnel médical. Il permet par exemple de prendre des rendez-vous, de consulter ses résultats d’examens, payer ses factures, échanger avec un interlocuteur du staff, le tout en ligne.

Nous organisons aussi des entretiens réguliers avec notre équipe du Help Desk : notre centre d’appels pour les utilisateurs de nos applications. Ces agents représentent eux aussi le point de vue de nos utilisateurs. Ils nous aide a identifier des problèmes récurrents et a tester nos hypothèses de solutions avec nos prototypes.

Retrouvez l'interview de Christian Égéa diffusée dans L'Atelier Numérique sur BFM Business par ici !