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Nos belles lectures poches du mois de Mars

Par Filou49 @blog_bazart
07 mars 2016

collagepoche

 Même en pleine sélection "quais du polar",  commencé mercredi dernier et qu'on a bien prévu de continuer tout le long du mois de mars, on n'oublie pas la littérature générale, et notamment les livres de poche qui mettent tous en avant de très belles lectures vues et appréciées par Michel et moi : 

  1. Compartiment n°6, Rosa Liksom ( Folio)

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« Après avoir hésité un instant, elle regagna sa place et s’assit sur sa couchette, face à l’homme qu’entourait un halo de froid. Ils restèrent silencieux, lui la dévisageant d’un air renfrogné, elle fixant, indécise, l’œillet en papier. Quand le train s’ébranla, le quatuor à corde n° 8 de Chostakovitch jaillit des haut-parleurs en plastique du compartiment et du couloir. »

La jeune femme ne sera jamais nommée. C’est une étudiante Finlandaise qui s’installe dans le compartiment n° 6 du train Moscou- Oulan-Bator. Ce voyage elle devait le faire avec Mitka, son amoureux, étudiant comme elle à l’Université de Moscou. Seulement voilà nous sommes en Russie en 1986 et Mitka n’a pas voulu partir en Afghanistan. Elle va devoir passer plusieurs jours dans ce compartiment avec Vadim Nikolaïevitch Ivanov qui lui aussi traverse la Sibérie et la Mongolie pour travailler sur un chantier.

Au bout d’une semaine je redeviens un homme bien et je m’en vais picoler sur un chantier. J’y gagne en même temps un revenu minimum, qui naît comme de lui-même en un maximum de temps.Quand je suis privé de vodka je suis comme un cheval fou. »

Entre cette jeune femme fraiche et ce soudard quarantenaire un lien va se créer, indéfinissable. Vadim parle et en se racontant il raconte l’histoire de la Russie d’après-guerre. La jeune femme écoute silencieuse, elle recueille les mots de l’homme Russe d’habitude taiseux. Tendresse, empathie, reconnaissance, la jeune femme pense à son homme disparu dans un asile psychiatrique.

« J’aime la vodka, comme tous les Russes. Quand je m’y mets, il m’arrive de descendre sept bouteilles en vingt-quatre heures. Je bois jusqu’à plus soif. Puis Katinka vient me chercher, le balai à la main. "

Quelle puissance dans ce beau livre triste, Rosa Liksom retrouve l’âme Russe du grand roman classique et le marie avec une écriture très contemporaine. Nous sommes au plus près des deux héros, dans une description hyperréaliste du  quotidien soviétique et le lecteur sent battre leurs cœurs et vit leurs regrets, leurs envies et leurs espoirs

. Un verre de vodka au poivre,  « Les bateliers de la Volga » de Repine en toile de fond, la mélancolie de Chostakovitch, le voyage peut commencer.

 2. Et je danse aussi; Anne- Laure Bondoux/ Jean- Claude Mourlevat ( Pocket)

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"La vraie vie est foutraque, ce n'est pas à vous que je vais l'apprendre. Continuez de me raconter ce qui vous passe par la tête, j'adore ça".

Le cercle littéraire des amateurs d'épluchures de patates", "quand souffle le vent du Nord, " Inconnu à cette adresse " et j'en passe :  les romans faits exlucisvement sous forme épistolaire réserve souvent de bien belles surprises et jusqu'à présent, à une ou deux exceptions près la littérature française s'y était pas engagée avec énormément de réussite.

 Heureusement, deux auteurs, plutôt au départ spécialisés dans la littérature jeunesse s'y prêtent avec bonheur, avec un échange non pas de lettres mais de mails entre Pierre-Marie Sotto, écrivain prix Goncourt de 60 ans, en panne d'inspiration et désabusé et Adeline, une mystérieuse jeune femme qui lui a envoyé une mystérieuse enveloppe.

 Suspense, rebondissements, situations cocasses, malentendus s'enchaînent au fil de cette correspondance addictive et jubilatoire, qui parvient à tenir en haleine  le lecteur.

Les auteurs ont la bonne idée de relancer la machine roman épistolaire des temps modernes qui pourrait tourner à vide à mi parcours en intégrant d'autres correspondants, comme Josy et Max des amis de longue date de Pierre Marie Soto ou encore Olivier son éditeur, donnant plus de cocasserie e touche d’humour rafraîchissante. avant d'aller vers plus de profondeur, dans les dernières pages.  

 On aime l’écriture enjouée, aérienne, sautillante, qui  donne la pêche et le sourire comme le bon feel good book que ce Et je danse aussi est incontestable, malgré un dénouement un poil attendu. 

3. Le gardien de ellis island, Gaëlle Josse 

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« Il faut imaginer la fragilité, la folle énergie, la détresse et la détermination de toutes celles, de tous ceux qui ont un jour accepté l'idée, pour fuir la misère ou la persécution, de tout perdre pour peut-être tout regagner, au prix d'une des plus terribles mutilations qui soient : la perte de sa terre, des siens, la négation de sa langue et parfois celle de son propre nom, l'oubli de ses rites et de ses chansons. Car seule cette mutilation consentie pouvait leur ouvrir la Porte d'Or. »

Le dernier gardien d'Ellis Island écrit par une certaine Gaëlle Josse que je ne connaissais pas,  fait pas mal penser au dernier grand film de James Gray, The Immigrant qui prenait également pour  toile de fond Ellis Island, cette ile située à New York et qui était l'entrée principale des immigrants aux Etats Unis de 1892 à 1954 ).

Comme le film de Gray le livre de Josse sonde, à travers ce portrait des  migrants en amérique du début du XX siècle,  l'envers du rêve américain et la difficulté pour ne pas dire impossibilité des immigrés à s'y intégrer,  

A travers les souvenirs du directeur  du centre d'immigration d'Ellis Island , juste avant la fermeture définitive du site qui a vu passer tant d'hommes, de femmes et d'enfants ,porteurs de rêves et d'espoir vers cette Amérique qu'ils considéraient comme la terre promise, le livre est une belle et profonde  sur l'exil et l'arrachement à son pays, sur la douleur et sur l'espoir.

Récit court ( moins de 200 pages) mais  dense, et qui parvient à méler avec grande habileté petite et grande Histoire des États-Unis,  Le dernier gardien d' Ellis Island est  un roman à la fois ample et apre sur ce maudit rêve américain qui échappe à tant d'individus...


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