L'affiche de la pièce, de même que le titre, sont explicites. Ce ventre rebondi d'une femme enceinte et Maybe - Une vie laissent présager que la Naissance avec un grand N en est le sujet. Ce sujet est venu à Sarah Marcuse après qu'elle a accouché il y a peu pour la seconde fois...
Cette comédie, mise en scène par l'auteur, commence par une citation, dite par le seul comédien de la distribution (Thomas Di Genova, qui joue les rôles de Ralph et d'un médecin). Cette citation est tirée de Comme il vous plaira de Shakespeare:
Le monde entier est un théâtre, et tous les hommes et les femmes sont seulement des acteurs. Ils ont leurs entrées et leurs sorties. Et un homme dans sa vie joue plusieurs rôles...
Ralph dit ça, mais il ignore quel est son rôle dans la vie. Pour lui, la vie n'a pas de sens. C'est pourquoi il veut se flinguer. Au préalable, il téléphone à sa mère, Anna (Anne-Schlomit Deonna). Il est libre de se flinguer, lui répond-elle, mais elle est contre...
Comment se fait-il que Ralph veuille régulièrement mettre fin à ses jours? Anna n'aurait-t-elle pas raté sa naissance par hasard? A la réflexion, elle dit que oui. Le spectateur saura pourquoi plus tard, après bien des développements.
Lors d'une tentative de suicide, Ralph fait la rencontre de Tiffany, (Fanny Pelichet, qui joue aussi le rôle d'une infirmière) qui, comme lui, s'apprêtait à se jeter du pont Butin. Or, au lieu de sauter, ils tombent dans les bras l'un de l'autre.
Leur étreinte n'est pas sans fruit. Tiffany découvre un jour qu'elle est enceinte. Elle pousse un cri. Elle a une vie finalement bien remplie et elle fait l'inventaire de tout ce à quoi elle va devoir renoncer. Mais peut-être est-elle tout de même "faite pour toucher du mou"...
Tiffany doit annoncer la chose à Ralph. Elle craint qu'il ne tressaille. De fait sa réaction n'est pas une joie sans mélange. Il va être père - ne faut-il pas qu'il s'en réjouisse? - mais il sera "un père sans repères" - ce qui n'est guère enthousiasmant.
Anna a accouché de Ralph dans la même clinique que deux autres femmes, qui avaient comme elle plus de 40 (Maud Faucherre et Céline Goormaghtigh), l'une optimiste (elle est toujours satisfaite), l'autre pas du tout (le monde actuel est horrible).
Ensemble elles ont connu les affres des examens pré-nataux (ce qui donne lieu à des scènes assez potaches) et des diagnostics médicaux (ce qui pose la question des possibles difformités), et combattu la culpabilité qu'engendre l'état de grossesse.
A partir de ces éléments Sarah Marcuse traite de la Naissance avant, pendant et après. Elle le fait avec les ingrédients qui lui sont chers: la philosophie - on naît un jour avec la perspective de mourir un autre -, l'humour - on rit souvent, sans retenue -, la chorégraphie - on assiste même à un kata...
Bref, dans Maybe, la naissance n'est pas un sujet traité banalement. Cet événement violent et risqué se produit dans la peur et dans la douleur: "Le coeur se fend en deux". Dans le même temps, la venue au monde d'un petit être, d'un petit peut-être, autrement dit d'un petit maybe, ne peut-elle pas s'avérer un heureux événement?
A défaut de se trouver un rôle, lorsque l'enfant paraît, l'homme ne peut-il pas au moins s'apercevoir qu'il a sa place aux côtés de celle qui donne vie à leur petit maybe?
Francis Richard
Adresse:
Théâtre du Loup, Chemin de la Gravière 10, 1227 Les Acacias - Genève
Représentations:
Du 4 au 20 mars 2016:
Mardi, jeudi, samedi à 19h
Mercredi, vendredi à 20h
Dimanche 17h
Lundi relâche
Réservations: