Fuji, Kirishima, Yame, et en début de saison 2015 Wazuka, sont autant de régions de production dont j'ai eu le plaisir de présenter un sencha cultivar Tsuyu-hikari, très apprécié croisement de Asatsuyu et de Shizu-7132. Voilà maintenant un Tsuyu-hikari de Kawane, célèbre zone de production en montagne de Shizuoka.
Masui Etsurô cultive le thé depuis plus de trente ans sans utilisation de pesticide. C'est après avoir pratiqué l'agriculture plusieurs années au Sénégal puis au Etats-Unis qu'il rentre dans son Shizuoka natal et s'engage dans la production de thé. Les cultivars et l'utilisation de la technique du flétrissement sont la clé de son travail. Il exploite bien sûr Yabukita, mais aussi Kôshun, Shizu7132, Mirai et donc Tsuyu-hikari, et produit sencha, thé noir et thé wulong.
Pour ce sencha Tsuyu-hikari, les feuilles sont flétries 14 h avant d'être étuvées. Les feuilles sont un peu brisées, mais le travaille flétrissement puis étuvage (arrêt de l'oxydation) est très propre.
On ne retrouve pas de manière forte le typique parfum floral de flétrissement type wulong vert, mais les feuilles sèches dégagent un parfum subtil mais dense, rond et frais, printanier, avec aussi une touche végétales très particulière, dans laquelle les amateurs reconnaitront sans peine une senteur typique héritée de Asatsuyu.
Eau un peu tiédie, mais pas trop non plus, pour une liqueur équilibrée, douce mais parfumée.
En effet, le voilà, ce parfum si particulier hérité de Asatsuyu : sucré mais très vert, rappelant des arômes de haricots "eda-mame", mais avec une texture également très grasse, très charcuterie. Je dirais même que ce Tsuyu-hikari met bien plus nettement et proprement ces caractéristiques en avant que nombre de Asatsuyu.
En bouche ce sencha est léger. Une pointe d'astringence, mais beaucoup de douceur. Pourtant cette douceur n'est pas un excès d'umami, c'est bien un "sucré" végétal, celui de bon légumes verts. L'umami n'apparaît que discrètement dans la longueur, s'équilibrant avec des arômes frais très agréables. Les saveurs sont bien celles typiques de ce cultivar.
Alors on comprend le pouvoir de cet exercice difficile qu'est le flétrissement (non seulement qu'il reste peu répandu au Japon, mais aussi que le climat s'y prête moins que dans la plupart des autres pays producteurs de thé). Sa maîtrise, son dosage permettent aussi bien comme c'est le cas ici de mettre au premier plan les caractéristiques d'un thé, ou bien, quand cette technique est utilisée plus fortement de faire apparaître ce parfum de flétrissement, les caractéristique du thé deviennent alors nuances.
Sur les infusions suivantes, jamais ce sencha ne se fait agressif. Pourtant c'est le type de thé que je qualifie de rustique, avec des arômes qui sentent la montagne, rappellent la terre, mais s'expriment avec force en after, dans la longueur, avec une douceur qui stimule la salivation.
Les amateurs de ce cultivar apprécieront. Les amateurs de thés simples mais puissants aussi.