(note de lecture) Jacques Ancet, "Les livres et la vie", par Christian Hubin

Par Florence Trocmé


   Où reprendre aux côtés de l'auteur le long parcours qui fut le sien : sa quête de l'imperceptible, d'une parole qui entend sortir de la détermination des mots (François Jullien).
   À quoi répond ce début si voué, si définitif: C'est là. Ça n'a pas d'image. Incipit qui est signe et fin : toute la parole convoquée, étranglée dans sa condition native, sa chute muette pour commencement.
   Vive, aérée : la souplesse de ces pages voguant en mémoire, précédées, comme guidées par instinct, par échos ; leur écoute au loin, d'une bande magnétique — ses coupures, ses fonds limpides ou confus.
   Arborescence aussi, alliant l'image aux ondes concentriques, spirales. Double durée d'une voix et de la narration.
   Lent, secret, y tourne le vertige du monde (Jean Wahl).
   À travers recueils, proses, traductions, la quête reprend, se relance — entre intériorité et force disruptive.
   Plus qu'un parcours rétrospectif s'ancre ici une œuvre en son flux. Son aura, jusqu’à l'ellipse, la brisure même.
   Oui, Ça n'a pas d'image.
   Insatiable, la voix s'envertige, plane. Reprend.
Christian Hubin

Jacques Ancet: Les livres et la vie (Éditions Centrifuges, 2015)