rêverie atelier bric à book numéro 16

Par Eirenamg

© Manue

Ça faisait bien 20 minutes que je déambulais, je commençais à m’ennuyer profondément, toujours les mêmes choses, mêmes habitudes de vie, on a beau aller à l’autre bout de la planète finalement rien de nouveau sous le soleil.

Les couleurs étaient différentes certes, les mouvements aussi tout parait plus exotique quand on n’est pas chez soi. J’aurais mieux fait de rester au lit à lire un bon livre plutôt que de me trainer à cette expo. «  Formidable, novateur, extraordinaire », trop de superlatif j’aurais du me méfier du compte rendu de l’article lu dans le journal ce matin.

Mais bon, j’aimais bien découvrir de nouveaux artistes ou me confronter à des formes d’art que je connaissais moins et cette expo de photo sur l’Asie, je m’étais dis pourquoi pas. Après tout, ça ne faisait pas de mal de se dépayser un peu sans partir vraiment. C’est pour ça que j’errais comme une âme en peine, dans cette galerie, à la recherche, d’une émotion, étincelle en regardant les photos.

Pourtant je n’avais rien à leur reprocher aux photos, mais le cœur n’y était pas vraiment, en ce moment. Tout me paraissait gris, froid, terne, la faute à un temps capricieux et des incertitudes de boulot qui me grignotait l’âme par petits bouts. Et la luminosité des spots et des couleurs sur papier glacé n’arrivaient pas à me réchauffer.

J’allais lâcher l’affaire et faire demi-tour, quand au détour d’une allée mon regard se figea sur ce cliché en noir et blanc. Un homme de dos, agenouillé sur lequel on versait de l’eau, ablution rituelle, scène de rue ? On aurait dit une gargouille, était ce à proximité d’un temple? il me semblait distinguer un mur au fond. C’était étrange, cette photo prise sur le vif, à quel moment ? Qu’avait voulu dire l’artiste ? Pourquoi cette photo me parlait comme si elle murmurait quelque chose à mon âme, je n’arrivais pas à mettre des mots, des pensées cohérentes sur cette sensation, une impression de déjà vu mais où ?

Le monde paru se figeait. La photo n’avait pourtant rien d’exceptionnelle au premier abord mais elle m’apaisa. L’environnement autour disparu et je me rapprochais pour voir si la magie de la photo ; son attraction allait continuer. Au fur et à mesure de mes pas, j’avais l’impression de rentrer dans le cadre, d’être cet homme de dos qui se libérait de ses peurs, de son passé en sentant l’eau dévaler en cascade derrière lui. C’était étrange comme sentiment, d’être plus calme comme un dédoublement, sentir avec plus d’acuité mon corps ; l’espace. Comme si j’avais réellement était projetée dans la photo. Plus rien ne semblait bougeait autour de moi, je me sentis bien.

Soudainement, un bruit sourd résonna, je me levais prestement mon réveil était en train de sonner une 2eme fois et le journal gisait à mes pieds, avec la photo de l’homme qui me narguait.

©eirenamg