Suite de notre article de la semaine dernière sur Etienne Le Rallic…
Un travailleur acharné
A la différence d’Hergé ou de Jacobs, par exemple, Le Rallic n’écrit pas les scénarios des albums qu’il illustre. Mieux encore, selon Marijac, il « avait cette rare capacité d’adapter avec facilité son style au plan que je lui dressais. Sa force d’imagination et de retranscription graphique a toujours fait merveille ». Travailleur acharné, Le Rallic se met à sa table à dessins dès six heures le matin pour ne s’arrêter que vers treize heures. Un rythme qu’il tient tout au long de l’année, vacances comprises.
Son style, reconnaissable entre mille, est net, sans bavure, extrêmement clair. Il suffit de regarder les visages de ses personnages pour s’en rendre compte. Le Rallic dessine vite, sans se reprendre ni retoucher ses planches. Il n’utilise que la plume, jamais le pinceau et travaille presque au format de publication. Cela n’empêche pas son dessin d’être détaillé, rigoureux et précis. Une précision et une exactitude voulues par le dessinateur qui n’hésite pas à accumuler une épaisse documentation pour bien travailler ses sujets.
L’homme
L’engagement syndical
Un autre aspect, moins connu, de Le Rallic est son engagement syndical en faveur des dessinateurs français, inquiets de l’arrivée sur le marché des comics américains. En 1938, il déclare même : « le jour n’est pas loin où nos journaux pour la jeunesse, ne pouvant plus paraître, seront remplacés par des journaux étrangers qui nous arriveront de leur pays d’origine tout clichés et tout imprimés ». Dans le viseur du dessinateur breton et de ses homologues : Tarzan et Mickey. Le Rallic devient donc le porte-parole de la société des humoristes, puis anime avec l’illustrateur André Galland, l’union des artistes et dessinateurs français.
Le cheval…
Mais comme nous l’avons évoquée, sa grande passion restera, toute sa vie, le cheval. Il en dessinera des milliers : chevaux de chasse ou chevaux de labours, chevaux montés par des soldats, des chevaliers, des cow-boys, des chouans, des amazones ou des mousquetaires ; chevaux tirant de légers cabriolets ou de lourdes charrettes paysannes. Durant son service militaire, ses dons de dessinateur sont remarqués par ses supérieurs. Il a donc la possibilité de dessiner des chevaux. Mieux, il peut étudier l’anatomie et la morphologie équine sous toutes leurs coutures en étudiant les cadavres des bêtes. Grâce à cette étude poussée, il réussit à dessiner le mouvement de ces animaux de façon extrêmement réaliste et dynamique.
Lui-même est, comme l’explique Marijac, «un cavalier dans la grande tradition ». Il fait d’ailleurs la première guerre mondiale dans une unité montée. Après une pause de quelques années, il reprend l’équitation grâce à la bienveillance des officiers du bataillon de dragon porté de Saint-Germain-en-Laye. C’est dans cette forêt qu’il monte presque tous les après-midi, après le travail. En 1933, il fait une lourde chute qui lui fait perdre un œil et l’oblige à cesser toute activité pendant un an. Il garde, jusqu’à la fin de ses jours des séquelles de cette blessure, qui diminue la précision de ses dessins.
C’est d’ailleurs un cheval, qui tire son cercueil jusqu’au cimetière de Sorel-Moussel, en Eure-et-Loir, où il meurt le 3 novembre 1968.
Aujourd’hui, les albums illustrés par Le Rallic ne sont que trop rarement édités. On en trouve encore, assez chers, dans des librairies ou sur des sites spécialisées. Dommage…