Le gombo: crédit photo Guy Muyembe
Depuis une décennie, les institutions financières d’aide au développement semblent avoir compris la nécessité de changer de politique. En matière agricole, elles ne réservent plus leurs aides uniquement aux exploitations de grande taille disposant de moyens techniques plus ou moins importants. La tribune du président de la BAD(Banque africaine de développement) parue sur le site foreign affairs s’inscrit dans ce cadre. De cette tribune du nigerian Akin Adesina j’ai retenu ce qui suit :
-le travail des petits agriculteurs est créatrice de centaines de milliers d’emplois dans chaque pays africain. Contrairement aux grandes exploitations où les moyens techniques tendent à détruire les emplois au fil du temps. D’où on peut légitimement affirmer que cette agriculture,qu’on qualifiait autrefois d’agriculture traditionnelle ou d’agriculture de subsistance, est le plus gros employeur du continent.
-le secteur privé doit désormais être impliqué dans le financement et la fourniture d’intrants. Ce rôle ne doit plus revenir aux seuls gouvernements. Il a été constaté par exemple qu’au Nigeria les aides gouvernementales bénéficiaient finalement assez peu aux petits agriculteurs. En cause il y a la corruption, les détournements et le manque d’efficacité.
-le boom des télécommunications doit être mis à profit pour connecter et faire interagir les différents intervenants du secteur agricole.
Toutes fois le point de vue de Akin Adesina, cet ancien ministre de l’agriculture de son pays, s’inspire visiblement de l’idéologie ultra libérale. C’est inquiétant car les acteurs du monde agricole, dont il est question, n’en sont pas encore au point où ils doivent répondre à une seule logique : la logique du marché.
Le marché impose de ne produire que ce qui a une grande valeur marchande. N’a-t-on pas vu des planteurs de manioc s’adonner à la culture des produits de rente(cacao,café,…) uniquement par recherche du profit ? Il va sans dire que nombre des contrées ont été confrontées à l’insécurité alimentaire à cause de ça.
Par ailleurs, je crains que derrière cette volonté d’impliquer le secteur privé il se cache l’idée d’écarter l’État et toute forme de régulation par voie de conséquence. Certes l’agriculture est une activité économique parmi tant d’autres. Mais à la différence de la finance ou de l’extraction minière, elle a besoin d’être protégée des méfaits de la mondialisation. D’où l’importance de la régulation.
Vive donc les petits agriculteurs. Ceux-là qui ont permis au Nigeria d’être aujourd’hui la première puissance économique africaine devant le pays de Mandela. (1)
(1): d’après les statistiques économiques, la part de l’agriculture dans le PIB nigérian dépasse celle du pétrole.