Au rang des films nommés cette année aux Oscars, Brooklyn ne fait certainement pas office de favori mais dispose néanmoins de sérieux arguments. Son casting, tout d’abord, emmené par une Saoirse Ronan toujours aussi talentueuse, et qui n’a absolument pas à rougir de sa filmographie (Lovely Bones, Les Chemins de la Liberté, Hanna, Lost River…) depuis son éclosion remarquée, à 14 ans, dans le superbe Reviens-Moi. Son réalisateur, ensuite, à qui l’on doit notamment la petite pépite Boy A, sortie en 2007, qui a révélé au grand jour le talent d’Andrew Garfield. Deux atouts majeurs qui permettent finalement au long-métrage de largement dépasser le stade de simple mélodrame calibré pour les Oscars qui lui semblait destiné au départ. Malgré un récit classique traitant de la vague immigrante irlandaise des années 50, le film se distingue en effet par un traitement d’une extrême délicatesse, ainsi que par un propos dont la pudeur n’a d’égal que la subtilité. Avec retenue et élégance, le cinéaste irlandais nous immerge profondément dans le quotidien du personnage et décuple littéralement les émotions qui en jaillissent, tellement que les larmes ne sont d’ailleurs jamais bien loin.
Au travers d’une romance éclatée aussi belle que sincère, le scénario aborde avec brio une multitude de thèmes tels que la quête identitaire, l’émancipation, le rêve américain, les attaches familiales ou encore l’intégration. Autant de sujets qui font écho à notre propre réalité au regard de l’immense sincérité qui émane de l’histoire. Difficile en effet de ne pas se prendre d’affection pour les personnages, incroyablement attachants, et surtout de ne pas ressentir la détresse ou la joie qu’ils vivent. Au-delà de la formidable interprétation de Saoirse Ronan, tout en sensibilité, il faut d’ailleurs relever les excellentes performances de ces partenaires. En particulier Emory Cohen, totalement bouleversant en jeune immigré italien éperdument amoureux d’Eilis. Malgré la trajectoire relativement classique de son personnage, il dégage un charisme indéniable et illumine chaque plan de son sourire transi. Au point de faire de l’ombre au toujours très bon Domhnall Gleeson. Pour terminer, un mot sur la très belle photographie d’Yves Bélanger, qui magnifie littéralement les personnages et les costumes, ainsi que sur la superbe composition musicale de Michael Brook, qui renforce considérablement la puissance émotionnelle du récit.Entre drame poignant et romance enivrante, Brooklyn s’avère donc être un film d’une grande justesse, à la beauté foudroyante et à l’histoire bouleversante. Emmené par une Saoirse Ronan d’exception et porté par un scénario infiniment sincère, il se savoure jusqu’à la dernière minute. Un des plus beaux films de ce début d’année !