Cela devait finir par arriver. Après avoir vu le Parti Socialiste comme parti majoritaire s’éclater en une multitude de courants divers et variés, voilà qu’une partie non négligeable de ses forces vives bruisse. Le projet de Loi de Myriam El Khomri portant réforme du code du travail semble bien être la couleuvre de trop qui finit par briser la fragile allégeance à l’exécutif. En effet, militants, adhérents, secrétaires de section et parlementaires grognent de manière suffisamment significative pour que le recours au 49.3 sur le sujet ressorte de l’ombre, alors même que le texte n’est qu’au stade d’avant-projet.
J’ai été de ses avocats. C’était jusque là vraiment facile de justifier les actions des gouvernements Hollande tant celles menées par le président précédent avaient été dures et brutales pour les petites gens et les précaires. On avait beau se dire que sous une nouvelle présidence de Sarkozy, débarrassé du besoin de popularité pour être réélu, les choses auraient été encore pires. C’est indéniable tant sa nature complexée est mue par un esprit de vengeance et de rancoeur maladives : ces salauds de pauvres doivent payer. Mais la réalité est aussi que cette gauche m’a fait me pincer le nez de plus en plus souvent, de plus en plus fort, évitant d’en parler ici tant les arguments me manquaient.
On va évidemment ressortir tous les poncifs à la mode, sur l’impossibilité des réformer, sur l’immobilisme maladif du français moyen, peu au fait des impératifs économiques dans un espace mondialisé. « Ne rien changer, c’est nous condamner » s’exclame Manuel Valls. Il n’a pas tort. Mais le problème n’est pas le fait de changer, c’est le contenu du changement qui pose problème. Cela me rappelle la campagne de désinformation qui a accompagné le référendum français de 2005 portant approbation du traité établissant une constitution pour l’Europe. Le «non» qui émergeait a été présenté comme un «non» à l’Europe, en l’imageant sur les conséquences surréalistes d’un tel refus. Or les électeurs ont répondu à la question posée en regard du texte : ils étaient européens convaincus, mais ils ont logiquement repoussé un texte technocratique où le citoyen et la démocratie étaient absents. Oui au changement, mais pas n’importe comment.
On est au même point. Le code du travail a certainement besoin d’être revu, mais pas sous la dictée exclusive de Pierre Gattaz qui obtient pour ses congénères au-delà de ses fantasmes les plus fous sans même avoir à le demander. Joli message envoyé aux chômeurs qui sont désormais à la merci des conséquences de la renégociation en cours des modalités d’assurance chômage. Vous comprenez, les déficits sont abyssaux, les assistés doivent aussi payer. Sauf qu’ils vont payer seuls.
Seulement, si tous ces gens importants contribuaient selon leurs moyens comme le font le commun des mortels, si la fraude fiscale, estimée entre 60 et 80 milliards d’euros par an en fourchette basse, était réduite juste des deux tiers, il n’y aurait plus de déficit,on ne parlerait plus du trou de la sécurité sociale, des caisse de retraite et du chômage… Qu’est ce qu’on attend pour réformer le système fiscal comme promis ?
Je suis stupide, on a déjà renoncé.