J’ai eu le plaisir d’assister à la conférence “Le marketing de la grenouille – Nouvelles stratégies de marques pour nouveaux consommateurs” animée par Philippe Jourdan et avec une introduction de Valéry Pothain.
Pourquoi les auteurs ont choisis le titre “Le marketing de la Grenouille ?”
Tout simplement parce que les marques ne se rendent pas compte que la situation change petit à petit…
Elles savent que les changements arrivent, mais les dirigeants pensent que les consommateurs vont leur laisser le temps de changer, or ce n’est pas toujours le cas… et donc il y a un gros risque de se faire Uberiser si le changement sont trop brusques.
Voici une rapide synthèse de cette présentation.
Le consobattant… le nouveau concommateur – Valéry Pothain
Avant même de parler de “Marketing de la Grenouille”, Philippe Jourdan avait parlé du concept consobattant.
Mais ce n’est pas un simple concept marketing… le consobattant est une réalité d’aujourd’hui.
En effet le consommateur est désormais en conflit avec les marques.
Au lieu d’être un “consommacteur” qui s’agitait auprès des marques, le “consommacteur” a pris acte du manque de réaction des marques.
En effet les marques ont semblé prendre en compte les besoins des “consommacteurs” mais finalement rien n’a changé radicalement…
Le “consommacteur” a pris les choses en main, et il s’est engagé dans un “combat” en affrontant les marques sur leurs terrains car les marques ne lui ont pas laissées le choix.
C’est maintenant le consommateur, devenu “consombattant” qui mène le jeu :
- Il fait jouer la concurrence en magasin et en ligne,
- Il n’hésite plus à négocier
- Il ne veut plus payer plus cher juste pour une marque
- Il est souvent mieux informé que les vendeurs
- …
Les marques doivent prendre en compte ce changement dans l’équilibre des forces…
En effet le consommateur rêve d’une marque qui mettra un peu de bon sens dans ses offres, et qui lui simplifiera la vie…
Valery Pothain donne quelques exemples :
- Lors de l’achat d’un simple paquet de riz, il avait pléthore de choix… Quelle différence entre le paquet de riz à 10 et 20 minutes de cuisson… Sur le paquet aucune différence entre les deux paquets de la même marque… Au final le consommateur part avec un stress sans savoir s’il a fait le bon choix.
- Idem pour le deo, idem pour le shampoing… Les produits se ressemblent tous, mais avec des différences qui induisent un doute sur le choix à faire avec des termes marketing alambiqués (ex : shampoing lait de coton), un surchoix…
Le marques se basent sur le fait que 70% des gens qui rentrent dans un hyper peuvent changer d’avis lors de leur shopping…
D’où la sur-enchère des marques pour attirer les prospects avec des produits plus ciblés, plus divers… Mais au lieu de nous aider, les marques nous déstabilisent et nous perdent…
D’où le besoin d’aller au delà du concept de segmentation et de gamme de produit, et de s’intéresser au consommateur et ne pas se concentrer sur le produit…
Partie 1 – Le marketing des 4P est dépassé.
Nous sommes entrés dans une ère de disruption globale des business modèles, concepts… traditionnels, d’une part grâce à la technologie, mais aussi du fait des changements de mentalités.
En 2016, dans de nombreux marchés, nous sommes dans une inadéquation partielle entre le client et les offres, car il y à une insatisfaction des consommateurs.
Le marketing a failli… Mais c’est aussi une faute commune entre tous les acteurs de l’entreprise.
Les marques sont challengées, 89% des personnes pensent payer plus cher juste pour une marque (sans autre justification), et que les innovations des marques sont là surtout pour acheter plus ou plus souvent…
Ce phénomène a laissé le champ libre aux marques de distributeurs qui ont mis en avant le concept “autant que les marques mais moins cher”.
Il faut donc prendre le compte les nouveaux comportements et la psychologie des clients, en particulier dans le digital… et recentrer ses offre sur les clients et non plus les produits…
On arrive ainsi à distinguer 5 profils de consommateurs français :
- 21% de minimalistes
- 25% de récessionnistes
- 18% de négociateurs
- 21% de touche à tout
- 15% de vigiles
Sachant que l’on peut passer d’une catégorie à l’autre selon le produit, la situation…
Profil N°1 : Les négociateurs
Ils ont dépassé les freins psychologiques naturels, car ils savent qu’ils ont pris le pouvoir, et qu’ils peuvent négocier quand ils veulent avec les marques.
A noter : souvent les négociateurs sont de très bon commerciaux, car pour être un bon vendeur, il faut aimer acheter et négocier…
De plus l’équilibre a changé car désormais le commercial en sait souvent moins que l’acheteur… C’est au vendeur d’expliquer pourquoi il faut choisir son produit.
Quelques bonnes pratiques:
- Best buy qui a redressé la situation, d’une part avec la fermeture des magasins déficitaires, mais surtout via la formation de son personnel à l’Art de la négociation tout en leur donnant une marge de négociation. Pour que cela fonctionne, il faut avoir le même niveau d’autonomie entre l’acheteur et le vendeur (ce qui n’est pas toujours le cas dans beaucoup d’entreprises !). De plus l’identification des vendeurs en magasin et en ligne (via un profil Twitter, Facebook…) permet d’avoir une continuité du dialogue pour ne pas lâcher le client une fois qu’il a quitté le magasin (et éviter qu’il n’aille acheter ensuite le produit sur internet). Grâce à cette nouvelle technique, le vendeur n’est plus anonyme.
- Axa : “Qui a le meilleur service”, est un bon exemple de comment les marques doivent apprendre à déplacer le champ de la négociation (c’est à dire ne pas uniquement mettre en avant le prix !). Le prospect doit être convaincu par l’offre globale et pas uniquement par le prix. Le but est de négocier avec l’offre complète avec tous les options. Ce qui permet de voir qui a vraiment les meilleurs services.
- Moosejaw : met à disposition un iPad en magasin afin de vérifier en ligne le prix par rapport au magasin. Cela permet de simplifier les termes de la comparaison et de la vente, soit pour conclure la vente, soit pour poursuivre la vente après sur le web, par email…
Profil N°2 – Les vigiles
Le vigile ne veut pas pendre de risque dans son achat, donc il peut repousser jusqu’à avoir la certitude d’avoir le meilleur produit.
Cette volonté d’avoir le meilleur produit, peut le pousser même à annuler son achat s’il ne pense pas faire le meilleur choix.
Or plus il compare de produit ou de version, plus il repousse l’achat.
Les stratégies pour séduire les vigiles :
- Comme Darty, intégrer web et la boutique physique avec achat ou la mise en place d’information en ligne pour ensuite proposer d’aller en magasin chercher le produit.
- Enrichir l’expérience en magasin pour inciter le vigile à venir en magasin pour tester le produit ou le voir “en vrai” (et faire que le digital soit complémentaire au physique). Exemple dans un magasin de sport proposer de tester le matériel “en condition réelle” avec une piscine, chambre froide…
- Lutter contre la procrastination via des agents virtuels sur les sites web, mais pas que pour inciter à l’achat, avec aussi de la notion de conseil.
Profil N°3 – Les Récessionnistes
C’est un groupe avec un budget souvent limité.
Pour lui, compter son budget, c’est être à 50€ par mois sur ses dépenses…
Actuellement en France, il y a 8 millions de personnes pauvres (ex: familles mono-parentales…), qui ont une hausse de leurs dépenses contraintes (ex: loyers…).
Or traditionnellement les marketeurs ne s’intéressaient à cette cible avec un très très petit budget (à part via le hard discount).
Il est possible de donner plusieurs réponses :
- Redonner du pouvoir d’achat. Il faut proposer des offres simples et les garantir avec des offres simples (ex : prix fixes, négociés…). L’exemple avec ORPI qui essaient de rétablir son rôle de médiateur entre l’acheteur et le vendeur pour fixer “le vrai prix”.
- Revenir à des packagings plus adaptés aux petits budgets, par exemple via des petits conditionnements. Via ces conditionnement on revient plus souvent en magasin, la dépense unitaire est plus faible…
- Communiquer sur les prix bas sans déclasser via des produits MDD ou low cost sans aller dans le hard discount. Par exemple Monoprix qui cible les étudiants avec sa gamme “les petits prix”
Profil N°4 – Les minimalistes
Pour eux, c’est acheter moins pour vivre mieux !
Ce sont des représentants du “WISE shopping”, c’est à dire savoir si on a vraiment besoin d’un produit (ils se disent “Est-ce que j’ai vraiment besoin de cela ?” avant d’acheter). C’est surtout une posture psychologique que budgétaire.
Les réponses marketing :
- Jouer la simplicité et la transparence, comme Optic 2000 avec les gammes solaires et correction différenciées en magasin.
- Réduire le choix, comme Instacart avec des produits de saisons, des offres simples, avec plus de “bien-être”.
- Ikea avec la gamme “Simplicity Therapy” par exemple avec des meubles pour l’aménagement d’espaces plus petits… Les meubles sont plus simples et plus intelligents (concept de relaxing bedroom).
Profil N° 5 – Le touche à tout.
Il est anti-système, on ne sait pas s’il va acheter, quand il va acheter… Pour lui c’est la commodité qui est le maître mot…
Il veut plus de temps pour plus de loisirs, par exemple via une banque mobile.
Il est aussi fan de communautés d’intérêts par exemple pour des bons plans comme Groupon avec des promos limitées.
Enfin il adapte aussi à montée en gamme / statut social grâce au groupe (ex le cojetage pour utiliser à un Jet).
En conclusion
En conclusion, il ne faut plus penser en termes de produits, mais en profils psychologiques de clients avec les profils de consommateurs.
De plus le mode de création des produits est en train de changer, avec moins de top down et plus de bottom up ou de Co-Création.
Le marketing ne doit plus être défensif mais ouvert vers les consommateurs.
Le marketing ne doit pas être sur la défensive comme la ligne maginot mais dans l’agilité pour s’adapter au marché… Sinon il y a un risque de se faire Uberiser.
Le big data est un moyen pour les marques de mieux adresser les clients via le 1 to 1 comme Facebook sélectionne les éléments affichés.
La limite c’est que les modèles prédictifs sont moins pertinents (on utilise les données passées mais les consommateurs sont de plus en plus imprévisibles).
De plus les outils big Data sont plus compliqués à gérer dans les entreprises.
De même les big data ont leurs limites, car l’enjeu est l’analyse de l’information de-structurée.
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