Dans les bras de Mother India

Publié le 19 février 2016 par Podcastjournal @Podcast_Journal
Rédacteurs et stagiaires: cliquez sur cette barre pour vous connecter en back-office de la rédaction! Ce n’est pas un pays où tu passes tes vacances. L’Inde est un endroit ou l’on en ramasse "plein la gueule." Le mode de vie est totalement différent du nôtre, nos sentiments passent d’une admiration pour un monument à la tristesse et la pitié la plus profonde pour des êtres humains. Cet ascenseur émotionnel se répète en permanence 24h/24.

L’Inde mythique "des mille et un dieux" dont parlent tous nos copains routards comme étant un océan de sagesse apaisant. Oui, ce même lieu idolâtré depuis des siècles comme i["le pays qui rend sage"].i Pays paradoxal qui cache une facette bien méconnue aux voyageurs "le syndrome indien". Plusieurs touristes occidentaux en voyage en Inde ont déjà fait l’expérience de ce mal indescriptible. Cet état de troubles psychiques aurait pour principale cause le choc des cultures. Si beaucoup craquent et se perdent, pour d’autres, ces états de délires psychotiques s’arrêtent dès qu’ils sont de retour dans leur pays.

Régis Airault, médecin et psychiatre en poste au consulat français de Bombay et chargé des rapatriements de touristes égarés, tente de décrire et d’analyser parfaitement ces symptômes dans son ouvrage Fous de l’Inde - délire d’Occidentaux et sentiments océaniques. Ce mal qui est associé à une perte de repères et à une vacillation de l’identité qui provoque des maux variés tels qu’une tristesse profonde, des crises de panique, des hallucinations, des peurs (…) certains voyageurs occidentaux font face à des symptômes inexplicables dès leur arrivée sur le sol indien, allant même jusqu’à des états de délires psychotiques prolongés, de manière spectaculaire.

"Alors? L'Inde ne serait-elle qu'un immense hôpital plein de psychotiques cherchant un sens à leur vie - à la vie? Des cohortes d'Occidentaux mystiques, délirants chroniques, se bousculent-ils vraiment dans les halls des aéroports à Bombay, à Delhi, à Madras? Plus qu'ailleurs, le voyageur est soumis, lors de son arrivée en Inde, à un choc culturel qui semble obéir à la loi du "tout ou rien": c'est la séduction ou la répulsion, car, dit-on, on ne frappe pas à la porte de l'Inde: on est aspiré ou rejeté."

Des personnes jusque-là indemnes de tout trouble psychiatrique éprouvent soudain, sans prise de drogue, un sentiment d’étrangeté et perdent contact avec la réalité. Plus curieux: ces troubles sont presque tous sans lendemain. Mais encore plus incroyable, ces personnes qui auraient vécu ce bouleversement émotionnel développeraient une certaine nostalgie envers le pays. Et elles ne chercheraient alors plus qu’une chose: y retourner.

"Ces impressions contradictoires, ces sentiments opposés qui cohabitent à la minute et vous "remuent les émotions", c'est ça l'Inde. Voir sortir de la boue, dans le pire des bidonvilles, un homme vêtu de blanc, d'un blanc immaculé, là où en cinq minutes on serait noir de la tête aux pieds, c'est ça l'Inde: la pureté qui pousse sur l'abject. La vie, la mort juxtaposées."

Qu’est-ce qui nous attire en Inde? Pourquoi sommes-nous si fragiles là-bas? Pourquoi cette expérience peut-elle transformer en profondeur notre vision du monde? C’est une notion psychologique et/ou spirituelle formulée par Romain Rolland. Elle exerce une impression ou une volonté de se ressentir en unité avec l’univers, parfois hors de toute croyance religieuse. Nombreux sont les témoignages de touristes a déclarer que leurs expéditions ont tourné en une recherche de leur "moi intérieur" et leurs parcours se sont donc centrer sur "une quête de spiritualité" avec "l’impression de se fondre avec Dieu" ou bien "une impression de retourner à une condition d’enfant". De plus, la vie n’étant pas chère en Inde, par rapport à la France, c’est aussi le pays où tous les désirs sont permis.

Selon Régis Airault, ce comportement résulte d’une véritable dépersonnalisation, qu’il appelle "l’épreuve de l’Inde." Les voyageurs commencent par égarer leur argent, leurs affaires, avant d’oublier leur nom, leur identité… Puis, ils rentrent dans une forme d’errance ou ils éprouvent des sentiments d’extase violents. L’Inde est une terre qui réveille l’élan mystique des plus rationalistes. "C’est seulement lorsqu’ils renouent avec un symbole fort de leur culture, en consultant un médecin français par exemple, qu’ils reprennent peu à peu pied dans la réalité. La plupart des rapatriés sanitaires retrouvent leur équilibre psychologique dès le retour dans leur pays d’origine. Hormis quelques cas sévères: toxicomanes ou marginaux aux antécédents psychiatriques qui disjonctent parce qu’ils n’ont plus de limites; la plupart des victimes sont des personnalités plutôt équilibrées et structurées. C’est véritablement l’immersion dans le pays qui a déclenché chez eux une décompensation, un effondrement de leurs défenses habituelles", écrit Régis Airault.
Voyager en Inde est comme défier le temps! Nos repères y sont complètement pulvérisés. "Plongés sans repères dans un tourbillon de misère, de surpopulation, d’images et de dieux inconnus, on n’y comprend plus rien", ajoute l'auteur. La dépersonnalisation est en route… Plus qu’ailleurs, cette terre nous oblige à plonger dans l’irrationnel, le refoulé, l’obscurité, les craintes…
De plus, qui va en Inde questionne forcément son rapport au sacré et à la mort. Tout ce que l’on a refoulé, qu’on a tenté de maîtriser jusque-là, vous sautent en pleine face: la mort (honteuse et cachée en Occident) a une place d’honneur dans le pays. Dans la ville sainte de Varanasi, vous pouvez siroter tranquillement un lassi et croiser un cadavre transporté à travers les ruelles. C’est la vie et la mort, la joie et la tristesse, la lumière et l’obscurité, la richesse et la pauvreté qui s’entremêlent… L’Inde, c’est la vie puissance 1000! Votre perception de la vie en est exacerbée, cette confrontation si violente à ce pays ne se fait pas sans heurts.

Bien que pour certains leur voyage ait tourné au cauchemar, l'Inde, "pays aux mille visages et couleurs" ne semble pas à leurs yeux avoir perdu de sa force d’attraction.