En Juin 2012, Sony suggérait les 1001 possibilités de la PlayStation Vita en proposant une nouvelle franchise, des idées neuves qui exploitaient les fonctions tactiles et gyroscopiques à leur degré maximal : le jeu s’intitulait Gravity Rush. 4 années plus tard, Sony a enterré sa vie bohème sans renoncer à ses ambitions : est alors née l’idée d’amplifier l’impact d’un jeu portable précis, sans compromis sur sa direction artistique nippone ou son scénario mélancolique. L’écran 16/9e OLED de la PlayStation Vita avait beau être une des prouesses technologiques, c’était bien d‘un espace de liberté dont avait besoin Gravity Rush. Les voeux se réalisent enfin sur PlayStation 4 dans une seconde édition (re)nommée Gravity Rush Remastered, une version mieux définie, plus fluide, plus complète : la meilleure à ce jour.
Gravité de la situation.
« Ève, lève-toi … » Gravity Rush ose le mélange des origines, ne s’en cache pas et parvient à créer un récit original. Son seul défaut ? Être parfois lacunaire … pour mieux préparer la suite. (Gravity Rush 2)
Sous l’angle de la (re)découverte de Gravity Rush, la trame scénaristique retorse parvient à trouver un équilibre entre des conventions agaçantes (Une héroïne amnésique.) et un épuisement mythologique plus intéressant. (Une Ève moderne, souveraine et rêveuse.)
Pour (re)nouer en toute singularité avec l’édition originale, les contenus téléchargeables payants (Renommés « Missions annexes ») s’insèrent tranquillement au flux continu des 21 épisodes narratifs de la quête principale. Les trois packs de contenus téléchargeables étoffent la personnalité de la jeune femme à la mémoire dilettante se répartissent entre les quatre quartiers animés de la seule et unique ville de Gravity Rush pour préciser le contexte urbain. (Des détails sur l’armée sont fournis dans le pack « Missions spéciales », un focus est réalisé sur un groupe de gentils loubards, un complément amène notre héroïne à aider le premier duo père-fils qu’elle croisera en devenant domestique …)
BluePoint Games, studio à l’oeuvre dans la réédition de Gravity Rush Remastered a amélioré une oeuvre déjà excellente. Cela est finalement possible.
Les studios de développement BluePoint Games, devenus experts dans la réédition haute définition, (Uncharted : The Nathan Drake Collection, Metal Gear Solid HD Collection …) ont ennobli une création déjà soignée du point de vue esthétique : la fluidité a été doublée (30 FPS -> 60 FPS), la résolution est devenue légèrement plus élevée (960*544 -> 1080*720). La version définitive de Gravity Rush Remastered n’est pas une transformation radicale : elle fournit un confort graphique subtil et si indispensable qu’elle balaye d’un revers de main tout souvenir de la version PlayStation Vita.
Gravity Rush Remastered échoue finalement sur la console la plus capable de l’honorer. L’expérience donne lieu à un jeu différent (Comme un droit à l’oubli de la version PSVita.) tout en conservant les mêmes commandes, les mêmes repères … Comme autrefois.
Ambition finalisée.
Avec un soin évident, Gravity Rush Remastered conserve sa douceur à renverser son univers. Jouer plusieurs heures ne donne pas le tournis tant chaque geste, même les mouvements rapides, est enveloppé d’une minutie impressionnante.
Gravity Rush, le meilleur élève d’une PlayStation Vita reniée, n’a pas peur d’être transportée sur console : c’était quasi la raison initiale de son développement. Les joueurs PSVita et les nouveaux apprécieront de (re)trouver un pouvoir gravitationnel intuitif une fois la manette en mains : outre la prise en main identique, Sony peut se féliciter d’avoir élaboré un système de jeu clair où l’expression « sens dessus dessous » ne devient à aucun moment un sujet de tournis.
La réticule bleue témoigne du système de gravité. Le joueur n’a qu’à choisir son point de destination : au personnage ensuite d’arriver à ce point avec un défilement non brusque du décor.
L’héroïne, rencontre probable entre Fantômette et du super-héros Marvel Gravity, voyage à l’endroit ou à l’envers du sens commun grâce à un schéma comparable à celui d’une mise au point photographique : notre personnage, fixe grâce à la réticule bleue, parcourt des aires de jeu suffisamment grandes pour impliquer le joueur dans un renversement gravitationnel doux, coloré et net. (A condition d’utiliser les joysticks plutôt que d’avoir recourt à la fonction gyroscopique de la manette PS4.) Gravity Rush Remastered cultive un esprit pragmatique où la palette des pouvoirs (Course, vol, suspension, préhension, rapidité …) se déclinent avec plaisir et goût dans des défis d’éliminations d’ennemis, de de vol chronométrés ou de lancers. (Environ 5h. supplémentaires s’additionnent à la quête principale.)
Fruit de différentes inspirations, Gravity Rush Remastered nous prouve de nouveau à quel point l’alchimie a fonctionné grâce à du bon sens et une simplification de certaines idées.
Gravity Rush Remastered réaffirme son statut de produit 100% nippon. A la différence de l’hermétisme du jeu El Shaddai (2011 – Évoqué sur le Blog il y a quelques années.), Gravity Rush Remastered dose son bestiaire dans une ménagerie de bizarreries (Les ennemis nommés Nevis ont des formes improbables et abstraites d’animaux …) et estompe ses références bibliques par une mécanique de jeu réglée minutieusement et une simplification d’idées complexes.
Pour illustration, la carte de jeu de Gravity Rush Remastered représente une ville aux dimensions importantes … Scindée en 4 quartiers reliés entre eux ou accessibles en vol ou par les égouts de la ville. Chaque quartier est spécialisé pour une ambiance spécifique.
A la somme des inspirations de Gravity Rush, les us et coutumes de la plate-forme sont dépassés par la liberté par de mouvement du protagoniste. Les pièces sont remplacées par des gemmes violettes dédiées à l’amélioration des pouvoirs gravitationnels et à l’entretien des 4 zones principales de jeu. La boucle des références est close par une fragmentation de l’aventure principale en 21 missions-épisodes (D’environ 30 mn. en moyenne : un format honorable pour un jeu portable.) reprenant la tension et la direction artistique très prononcée d’un manga.
Visuellement, les débuts et événements importants d’un épisode bénéficient de cinématiques dessinées. Que l’on apprécie ou pas le style manga, l’idée est en parfaite adéquation avec l’ambition du jeu.
L’exemplarité de Gravity Rush repose sur des commandes facilement mémorisables et une perpétuelle sensation de découverte. (Défis, dialogues, zones d’ombres dans le scénario …) Gravity Rush Remastered, né dans l’ambition, vise les grandeurs au moyen d’une écriture digne d’un conte subtil.
« Perdu(e)s dans l’espace temps ? »
L’héroïne en recherche de son passé morfondra probablement certains joueurs dans une déception profonde à cause de la lourdeur du cliché. Pourtant, le personnage permet de gagner du charisme. Si bien que Sony n’hésite pas à multiplier les apparitions de son personnage dans des jeux annexes. (Battle Royal All-Stars, multiplicité de publicités …)
Au-delà des comparaisons, Gravity Rush dégage une sensibilité capable d’émouvoir les plus jeunes et les joueurs plus expérimentés. Sans académisme, Kat officie en tant que super-héroïne en recherche perpétuelle de ce qui a été perdu : sa propre identité et celle d’une ville systématiquement et mystérieusement divisée. Si les dialogues sont d’une limpidité quasi enfantine, les images chargent l’aventure d’émotions mêlées avec une réussite espérée. (Découverte d’une société d’enfants rappelant l’oeuvre Sa Majesté des Mouches, L’Arche en tant que vaisseau dans le temps et l’espace, chaque quartier dispose d’une identité musicale, la ville change au fil des événements …)
Pour les joueurs un peu plus confirmés, Gravity Rush émaille son récit d’images oraculaires. Prédites, perçues en rêve et dans l’intériorité du personnage, la limite entre illusion et réalité n’est pas toujours très claire pour les personnages eux-mêmes …
Parfois abstrait, souvent exhaustif dans l’intérêt d’un Gravity Rush 2, Sony s’arroge les droits sur une exclusivité consistante. Les différentes aires de jeu, toutes abouties, ont l’exigence de divertir et d’offrir des moments plus énigmatiques. Ces deux composantes contribuent à (re)vivre une aventure enviable de 15h. où certains passages méritent d’être rafraîchis à notre mémoire. La durée de vie est un temps moyen suffisant pour délivrer une sensation de complétude, donner l’envie de graviter dans les différents espaces (8 au total.) à la quête de boss secrets et d’apprécier la fluidité émotionnelle d’une franchise définitivement autonome.
On a aimé :
+ Trois contenus qui étendent les 4 quartiers de Gravity Rush.
+ Un jeu à double énonciation : pour les plus jeunes et les joueurs plus âgés.
+ Le principe de gravité, définitivement plus clair et plus agréable.
+ Pour les joueurs PSVita : le jeu gagne en détails (Principalement dans les décors.) et double sa fluidité.
+ Environ 15 h. de jeu : une durée de vie suffisante comblée par quelques réponses laissées en suspens.
On a détesté :
-: Certaines lourdeurs et certaines récurrences dans le scénario. (L’amnésie, la fin du jeu …)
– : Le parti-pris du bestiaire très japonais provoquera l’ire de certain(e)s.