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L'art de la Comédie d'Eduardo de Filippo / Patrick Pineau / Théâtre 71 et tournée

Publié le 14 février 2016 par Mes Illusions Comiques @audreynatalizi

"2000 ans de théâtre sur trois planches"

On avait beaucoup aimé son Suicidé lors du festival In d'Avignon en 2011. C'est donc avec grand plaisir que l'on retrouve Patrick Pineau à la mise en scène. Cette fois, c'est à L'Art de la Comédie d'Eduardo De Filippo qu'il s'attelle. La pièce est à découvrir au Théâtre 71 de Malakoff jusqu'au 18 février puis en tournée.

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Photo : Philippe Delacroix

Oreste Campese est le chef d'une troupe familiale itinérante. Ses tréteaux, décors et roulottes ayant pris feu, il vient solliciter le tout nouveau préfet, son excellence De Caro. Non pas pour faire l'aumône, simplement pour le convier à une représentation au théâtre municipal qu'il occupe provisoirement. La présence du représentant de l'Etat lui assurerait une salle comble et le remettrait ainsi à flots. De Caro, dont l'opinion sur le théâtre est à l'opposé de celle de Campese, renvoie prestement le saltimbanque et sa demande, lui proposant plus simplement de payer les frais du voyage qu'il souhaite entreprendre. Mais ce n'est pas de l'argent que Campese veut ! Qu'à cela ne tienne ... Si le Préfet refuse de venir voir les comédiens, ce sont eux qui viendront à lui. D'ailleurs, le nouvel édile ne doit-il pas rencontrer cet après-midi les notables de la ville ? Campese laisse entendre que sa troupe pourrait se glisser dans ces rôles là et défie le préfet de démêler le vrai du faux. Face aux habitants de la région venus conter leur malheur, le doute saisi De Caro.

Dans l'Italie des années 60, la Préfecture n'est qu'une ruine soumise au courants d'air. Patrick Pineau nous figure cela par un décor minimaliste, plus proche d'une usine avec ses passerelles en fer que d'un palais de la République. Le mobilier est sommaire, encore emballé dans du papier bulle. On ressent l'instabilité du pouvoir, la fébrilité de ce représentant de l'Etat ne sachant pas vraiment quelles seront les dispositions de la population à son égard.

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Photo : Philippe Delacroix

La pièce comporte clairement deux partie. La première, longue discussion entre le Préfet et le comédien, voit deux visions de l'art en général et du théâtre en particulier s'opposer. Pour De Caro, le théâtre ne doit être que divertissement. Il ne doit véhiculer aucun message politique ou refléter les problèmes de société. Campese au contraire prône un art qui  reflète le réel, pointe du doigt les problèmes sociaux, montre par "le trou de la serrure" des scènes de la vie quotidienne, qu'elles soient drôles ou tragiques.

La seconde partie de la pièce, penchant plus vers la farce, multiplie les scènes délirantes. Voici le Préfet qui accorde audience à chacun. Un médecin rendu fou par les ex Voto que ses patients déploient à chaque guérison, oubliant son mérite propre. Un curé, aux poches remplies de marrons chauds qu'il sème aux quatre coins de la pièce tout en livrant son angoisse de voir une de ses fidèles, fille mère, accoucher au lieu de l'église. Une institutrice hystérique révélant une histoire alambiquée de disparition d'enfant. Un pharmacien au bord du suicide. Chaque scène, par son intensité et son excessivité, fait la part belle à cet art de la comédie désigné dans le titre. Nous mêmes spectateurs ne savons pas - et ne saurons pas à l'issu de la pièce - s'il s'agit de vrais citoyens ou des comédiens de Campese.

A quoi sert le théâtre ? Voilà donc le cœur de la pièce de De Filippo. Si l'on regrette un peu la longueur du débat très théorique entre Campese et De Caro, les scènes de vie jubilatoires proposées ensuite nous emportent pleinement. Et ne plus pouvoir nous mêmes distinguer le vrai du faux n'est pas cela justement L'art de la comédie

L'Art de la Comédie d'Eduardo de Filippo, mise en scène Patrick Pineau. Avec Nicolas Bonnefoy, Marc Jeancourt, Aline Le Berre, Manuel Le Lièvre, Fabien Orcier, Sylvie Orcier, Mohamed Rouabhi et Christophe Vandevelde. Au Théâtre 71 à Malkoff, jusqu'au 18 février 2016. Réservations au 01 55 48 91 00.

En tournée :
Le 26 février 2016 au Théâtre de l'Arsenal à Val de Reuil
Du 1er au 5 mars 2016 au Théâtre de Dijon Bourgogne
Le 8 mars 2016 au Salmanazar à Epernay.


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