Note : 3,5/5
L’animation française nous réserve encore beaucoup de surprises. Après avoir travaillé à la conception graphique sur quelques uns de plus beaux films d’animation français de ces dernières années (Kerity, Le Tableau,…) Rémi Chayé passe ici à la réalisation de son premier long métrage d’animation.
Copyright Sacrebleu Productions Maybe Movies 2 minutes france 3 Cinéma Norlum
Nous sommes en Russie à la fin du XIXe siècle où l’on va suivre l’aventure de Sacha, jeune fille de l’aristocratie. Le bateau de son grand père qui fut un grand explorateur a disparu dans un voyage vers le Pôle Nord et n’a jamais été retrouvé. Alors que l’empire russe abandonne peu à peu les recherches, Sacha découvre un document qui pourrait tout changer : la feuille de route du voyage d’exploration, modifiée à la dernière minute. Ne trouvant personne pour l’écouter et croire à sa découverte du document, la jeune fille fugue et de part à la recherche du bateau et de son grand père.
Ce qui frappe en premier, c’est le soin apporté au graphisme. En effet les dessins sont magnifiques, le traitement pictural du film est sa force majeure. C’est un régal pour les yeux dès les premières images. Mais la force graphique ne s’arrête pas là car en plus d’être belles, les images sont intelligentes. Rémi Chayé prend le parti de raconter son histoire principalement par le visuel. Point de dialogues inutiles, ils sont même très peu présents tout au long du film. Ce qui donne lieu a certaines séquences d’animation particulièrement savoureuses mises en valeur par une musique d’une belle richesse. Une belle illustration de ce que Hitchcock appelait le « pure cinema ».
On est immédiatement plongé dans l’histoire à travers le regard de Sacha. Explorateur, bateau disparu : tous les éléments d’un grand film d’aventure sont réunis. La première partie du film se passe à Saint-Pétersbourg et nous prépare au voyage à venir. La caractérisation des personnages marche comme il faut. Au moment venu, on n’a qu’une envie : partir à l’aventure avec Sacha pour retrouver le Davaï, le navire perdu. On pense naturellement à Jules Verne en regardant le film, l’inspiration est évidente et celui-là n’aurait sans doute pas renié l’œuvre. L’individu est toujours au centre de l’intrigue. Rien n’est épargné, et si le film arrive à mettre en avant la magnificence des décors glacés du Pôle Nord, il met également le doigt sur la rudesse d’un tel voyage et des sacrifices nécessaires. En cela, le scénario est intelligent et vient balayer les idées reçues qui veulent qu’un film d’animation devrait adoucir les contours pour ne pas heurter la sensibilité des enfants.
Il est donc dommage, lorsqu’on voit la qualité de travail, de constater un manque flagrant de budget. Car si le film pèche quelque part c’est bien là. Un film avec un récit d’une telle ampleur, avec cette ambition, aurait mérité de profiter de financements plus confortables. L’animation n’est pas aboutie sur certains plans, la figuration est statique. De petits défauts qui n’entachent en rien le plaisir qu’on ressent à la vision du film et qui ne baissent pas vraiment la qualité ; mais qui malheureusement viennent marquer la frontière entre un beau film d’animation et une véritable réussite.
Copyright Sacrebleu Productions Maybe Movies 2 minutes france 3 Cinéma Norlum
Le film n’a pas volé son prix du public amplement mérité au dernier festival du film d’animation d’Annecy. Si vous aimez donc les belles histoires d’aventure, que vous êtes toujours curieux de découvrir les pépites que nous réserve le cinéma d’animation made in France, alors ce film est fait pour vous. C’est un plaisir que sauront partager petits et grands.
Anatole Vigliano
Film en salles depuis le 27 janvier 2016