Yann Gourvennec, les médias sociaux… suite et fin

Publié le 12 février 2016 par Chahidhamza @ChahidHamza
Suite et fin de notre entretien avec Yann Gourvennec. Notre expert constate que l'utilisation des médias sociaux par les marketeurs pour changer le marketing, leurs produits, l'expérience clients et le parcours clients, est décevante. Troisième axe de progression vis-à-vis des médias sociaux : donner un sens à l'utilisation des médias sociaux en entreprise.

Le principal enjeu des médias sociaux était de changer. C'était la promesse. Changer la relation avec les clients, les prospects, le public etc ...

Quand vous êtes sur un média, vous êtes mono directionnel. Je vous envoie un message. La masse écoute 'en gobant' au mieux. Ils tweetent éventuellement sur le côté, mais c'est minimal. En gros, j'ai une audience passive. Encore une fois s'ils font autre chose à côté, ils restent quand même passifs. Ils n'agissent pas sur le contenu ou peu.

Alors que sur les médias sociaux c'est différent. Ils peuvent agir sur les contenus. Le contenu en l'occurrence, peut être le produit, le service. Cela peut être l'interaction avec l'entreprise, l'expérience client, le parcours client, le support client, après ce sont des médias. Force est de constater que l'utilisation des médias sociaux par les marketeurs pour changer le marketing, pour changer leurs produits, l'expérience clients et leur parcours clients... Eh bien, c'est décevant !

C'est très décevant. Je ne vais pas dire que ce sont des outils qui sont parfaits et qui peuvent remplacer à 100% des outils classiques de sondage ou d'études de marché. Mais ce sont des outils qui peuvent être d'ailleurs couplés aux études de marché.

Vous pouvez prendre un survey monkey. Maintenant on a la possibilité depuis de nombreuses années de pouvoir intégrer ces études de marché dans les médias sociaux, de les relayer. Cela permet l'interaction directe. Les médias sociaux ont un outil qui est fabuleux ! C'est le commentaire direct.

Est-ce que vous trouvez que Linkedin et Viadéo sont bien utilisés en France ? De façon efficace ?

Viadéo dans les professions du marketing et de la communication où l'on est, on les voit même plus. Il n'est plus utilisé du tout. Il reste néanmoins utilisé par des populations qui sont différentes, plutôt plus provinciales et plus bas de marché et pas dans les professions du high tech, de la communication et du marketing. C'est fini, c'est terminé. C'est Linkedin qui a remporté la bataille.

Il ne reste donc plus que celui-là. Tout comme il ne reste plus qu'un réseau social grand public : c'est Facebook. Il n'y a plus qu'un réseau social, type média, Twitter. Et ce dernier, je ne suis même pas certain qu'il reste. Je ne suis même pas sûr qu'il survive. Donc, il en restera plus qu'un à la fin.

Est-ce qu'on les utilise bien en France ? On est très largement en retard.

Jacques Froissant, il y a 3 ans, quand il a sorti son livre, disait que 90% des recrutements au Canada se passait via Linkedin. On en n'est pas encore là en France.

De toute façon, c'est simple. Quand on se compare aux autres pays, vous pouvez toujours faire la même réponse. On est moyen élève. On est en milieu de tableau. On n'est pas complètement mauvais comme les italiens ou les espagnols. Quoique les espagnols sont bons sur certaines choses comme les mobiles. Mais on est au milieu de tableau. J'ai regardé le commerce électronique, on fait 5 fois moins qu'en Angleterre etc... Tout est comme cela. Donc on est au milieu, on n'est pas mauvais. On a de très bons professionnels mais la population en générale suit mollement. Donc il en va de même pour le B2B. C'est mou !

Cela fait quand même 12 ans qu'existe Linkedin. C'est vieux ! Voilà...

Quand je vous ai vu à la CCI en 2013, vous disiez que les entreprises françaises n'étaient pas à l'aise avec la communication digitale. Est-ce que vous trouvez qu'il y a eu un changement positif depuis 2 ans ?

Oui c'est certain qu'il y a beaucoup de changement. Après cela dépend d'où on met le curseur encore une fois. Il y a le " paid " et le " earn ".

" Paid ", il n'y a pas de problèmes. Ils ont bien compris. Cela ne me pose pas de soucis pour tout ce qui est marketing payant. Comme dit mon ami François Laurent qui est président de l'Adetem, qui doit être bien placé pour le savoir ; il dit : " que sait faire un marketeur ? C'est dépenser de l'argent ". Là, il n'y a pas de soucis.

Pour la logique du " Earn ", " du bouche à oreilles ", du média mérité, il y a un progrès : le content marketing depuis 2013 est devenu un sujet central.

Là je parle pour ma partie en B2B, il y a même des secteurs qui viennent et qui étaient complètement réfractaires au marketing comme les SSII par exemple. Les SSII commencent à s'équiper en marketing, ce qui est étonnant. C'est normal parce que leur marché se durcit. Donc ils ont besoin de se démarquer.

Il y a des choses qui bougent beaucoup dans le B2B autour de l'inbound marketing, des changements de comportement d'acheteurs qui se rapprochent de plus en plus des comportements de consommateurs. En gros, on ne veut pas tellement qu'on vous vende, mais on aime bien acheter. Donc on vient se renseigner soit même. On fait beaucoup de " peer to peer " pour savoir ce que l'on doit acheter et prendre les avis des autres.

Et cela va être la tendance dans les 4 - 5 années qui viennent. C'est l'évolution vers le e-commerce B2B qui est aujourd'hui embryonnaire. Sauf dans certains cas, comme Amazon Web Services par exemple qui ont montré que c'était possible.

Est-ce que les entreprises sont moins frileuses ? Oui il y a des progrès. Est-ce qu'elles ont tout compris ? Pas encore mais il y a des progrès, c'est certain. Moi je fais du content marketing depuis 20 ans. Et c'est vrai qu'on n'a jamais eu autant d'échos sur le marché que depuis 2-3 ans. Quand j'ai créé ma société il y a 2 ans, un an après que vous m'ayez vu, j'avais pris comme hypothèse : le content marketing va enfin décoller. Et je pense ne m'être pas trompé.

Un grand merci à Yann Gourvennec pour avoir pris le temps de répondre à mes questions.

Vous pouvez le suivre ici :