Ce qui n'était qu'un soupçon est devenu réalité : au cours du championnat du monde Espoirs féminin de cyclo-cross, à Zolder (Belgique) une concurrente a été prise la main dans le sac. Elle utilisait un moteur caché dans le pédalier de son vélo.
Depuis près d’un demi-siècle qu’on baigne dans le milieu cycliste, on croyait avoir tout vu, tout entendu, tout connu, tout vécu : les mafias, les courses vendues, les combines et arrangements entre coureurs, les dirigeants corrompus ou incompétents, le dopage artisanal, puis organisé en attendant le dopage génétique, Virenque-Armstrong-Vinokourov le trio infecte, et d’autres affaires peu reluisantes. Mais avec l’arrivée des moteurs électriques, on passe carrément à autre chose, au dopage mécanique qui préfigure l’entrée dans une nouvelle ère, celle de l’énergie électro-magnétique.
Nous reviennent à l’esprit quelques séquences qui avaient, ces dernières saisons, jeté le doute dans les esprits : les nombreux changements de vélo de Contador, le démarrage fulgurant de Cancellara dans le Mur de Grammont au Tour des Flandres, puis son accélération sidérante à 50 km de l’arrivée à Roubaix en 2010, les mécanismes suspects dévoilés par Cassani et LeMond. Avec l’affaire des mondiaux de cyclocross, à Heusden, la preuve est là et plus personne ne peut nier que le cyclisme est en train de dérailler. A quand des ailes au cul des coureurs, comme l’a imaginé le fameux Leonard de Vinci ?
Les Italiens annoncent déjà que l’énergie électro-magnétique va influencer la puissance de pédalage, avec des roues arrière en carbone équipées de mini-batteries et à 200.000 euros pièce ! Ca promet et l’on ne sait comment le président Cookson et ses services vont s’y prendre pour contrôler et maîtriser ce bordel généré par les nouvelles technologies. Déjà que l’UCI a perdu pied devant l’évolution du record du monde de l’heure et qu’elle a du mal à imposer sa réforme du World Tour et l’introduction des freins à disque sur les vélos de route… Ne reste plus que les paris sur les courses truquées !
Avec le moteur électrique, on passe à la vitesse supérieure. Et l’on ne sait où tout cela va s’arrêter. Pauvre vélo, triste sport cycliste, déjà tombé aux mains des médecins véreux, des apprentis sorciers, des affairistes de tous bords, des entraîneurs-technocrates, des préparateurs physiques et mentaux, des managers à lunettes fumées et maintenant des génies de l’électronique. D’un sport simple, magnifique, sans artifices, on a fait en vingt ans un sport compliqué, dénaturé, soumis aux gadgets, sophistiqué comme la Formule 1 et devenu tellement technique que plus personne ne s’y retrouve. Avec des coureurs transformés en robots sur deux roues, le torse ceint de leur cardio-fréquence/mètre, les yeux rivés sur leur ordinateur de bord et totalement téléguidés à distance par des directeurs sportifs gonflés d’importance et qui se prennent pour des maréchaux d’Empire...
J’en connais quelques uns, des champions du passé reconnus et appréciés, qui doivent se retourner dans leur tombe. C’est le progrès, nous dit-on. Mais quel progrès ? La magouille, le profit, la triche sont partout pour assouvir un rêve de gloire et se remplir les poches d’argent sale. Plus personne dans ce milieu n’a-t-il donc le sens de l’honneur et le respect du sport ? Ou est l’éthique du métier ? Comment un constructeur, un mécano peuvent-ils se fourvoyer et s’abaisser à monter un tel dispositif sachant qu’ils introduisent le ver dans le fruit ?
A trop vouloir rouler vers le futur et faire la part belle aux innovations, le sport cycliste est devenu une pomme pourrie. Il n’y a plus qu’un traitement radical au DDT pour lui redonner l’aspect d’un fruit sain. Mais la dose devra être suffisamment forte pour éradiquer le mal et lutter contre les acteurs malfaisants et les responsables de cette dérive qui mène tout droit le vélo à la catastrophe. Il est à conseiller aux dirigeants de l’UCI de se mettre à l’abri…
Bertrand Duboux