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Interview – A State Of Mind (The Jade Amulet LP)

Publié le 03 février 2016 par Le Limonadier @LeLimonadier
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Interview – A State Of Mind (The Jade Amulet LP)

En bons amateurs de hip hop et de bonnes vibes, nous avons eu la chance de rencontrer les 3 membres d’A State Of Mind avant leur tournée hexagonale, pour leur dernier projet en date : The Jade Amulet. Après 2 albums bourrés d’influences diverses et des collaborations avec Wax Tailor très réussies, leur dernier projet est assez atypique, à la croisée des chemins (entre art visuel et sonore). Un pari osé donc, l’occasion pour nous de leur parler de The Jade Amulet et d’un tas de trucs sympas.

Salut ! Je suis Raph du Limonadier et j’ai eu le plaisir d’aborder plusieurs fois votre musique sur notre site

Green T : Salut ! Oui, on a vu ça ! C’est cool !

A State of Mind, c’est votre nom. C’est parce que vous ne faites rien comme les autres groupes ou quoi ? Pourquoi un tel nom ?

Funky Poet : En fait, le nom vient de l’abréviation ASM. Un nom qu’on avait déjà avant, parce qu’on avait 2 crews de graffeurs quand on était ados, AS, MSM. On a choisi ce nom par respect mutuel, et on voulait créer quelque chose de plus grand que 2 crews de lycée. On a fusionné les crews ensemble pour qu’A State of Mind devienne ce qu’on connaît aujourd’hui.
Fade : Ouais, on voulait que ça devienne plus grand, autre chose que du graff et du style : on voulait que ça devienne une manière de vivre qui nous ressemble.

Vous avez commencé votre carrière en 2007 sous ce nom. Comment vous êtes-vous rencontrés, et qu’est-ce qui vous a donné envie de vous lancer ?

Funky Poet : On fréquentait le même lycée, et on était parmi les premiers à être tombés amoureux de la culture hip hop à cette époque en Allemagne. L’Allemagne avait 10 ans de retard sur les USA quand ce genre de hip hop est arrivé. On était ados, accros à la musique et à la créativité, on aimait traîner avec nos potes et faire la fête. C’était une époque durant laquelle la culture hip hop était à son apogée, c’était la meilleure époque, l’âge d’or. On vivait quelque chose d’incroyable, il y avait beaucoup de jams, de skatejams… C’était fou et on adorait ça. On était aussi dans le rock à ce moment-là, et tous les gamins du hip hop.

Vous parliez de culture hip hop ; quels artistes vous inspirent ? Quand j’écoute le projet The Jade Amulet, ça me fait un peu penser au Wu Tang Clan. Toutes ces images autour des samouraïs, les westerns…

Green T : Ouais, je crois que l’une des choses les plus importantes lorsque tu fais quelque chose depuis aussi longtemps, comme nous avec le hip hop et les fans de hip hop, une part importante de notre identité depuis si longtemps, tu dois te servir de ce vécu pour construire quelque chose de plus grand, comme un vocabulaire qui t’es propre tu vois, peu importe ce que tu fais, comme un conscient et un subconscient, et les choses te viennent naturellement… On a écouté beaucoup de Wu Tang et de légendes au début. On était intéressé par tout ce qui se rappait en langue maternelle, dans un esprit positif et libre, tout ça… Comme A Tribe Called Quest, De La Soul, tous les trucs de la West Coast, Souls of Mischief, etc. Dès le début on était de plus en plus dans le sampling, le jazz, la soul, la funk… Et puis, plus récemment, dans les B.O de films des années 70, les B.O de western, les B.O de la blaxploitation, des trucs comme ça. Mais tout le délire autour des samouraïs, bien sûr comme pour le Wu Tang, avec l’histoire sur le subconscient, toute la partie visuelle, comme Samouraï Champloo (un manga animé se déroulant dans le Japon médiéval, sur fond de bande-son hip hop, ndlr)

Et pourquoi vous avez voulu créer cet univers original ? Il y a un message derrière ou c’était juste pour vous amuser et créer une histoire ?

Green T : Ce qu’on dit toujours quand on nous le demande, c’est que toute histoire raconte à peu près la même chose. C’est ce qu’on appelle le Monomythe (concept développé par Joseph Campbell et qui avance que tous les mythes racontent essentiellement la même histoire, ndlr) : le parcours du héros, l’arc narratif… Ce que tu retrouves beaucoup dans la littérature classique, la mythologie, le Far West, l’Est, l’Histoire Européenne, mais aussi dans des trucs comme Star Wars… C’est la même chose dans toutes les trajectoires narratives, comme les légendes grecques. Toutes les histoires grecques ont une trame similaire : les épreuves, le bien et le mal, la lumière et l’ombre, le fait de ne pas savoir qui est le bon ou le méchant gars… C’est l’épreuve de l’existence humaine. The Jade Amulet est notre vision de tout ça, et la raison pour laquelle on a utilisé cet univers fictionnel spécifique, et non juste la Grèce antique ou le Japon antique ou autre, c’est parce qu’on voulait être dans quelque chose d’intemporel et d’universel. Tout ça nous a permis de récupérer plein de petits éléments pour en faire notre propre histoire : Shalim, le personnage principal, est un nom qui provient de la mythologie égyptienne, alors que l’esthétique est très japonaise. D’autres aspects de cette esthétique sont très italo-western…
Funky Poet : …Ou inspiré par un esprit méditerranéen, de plusieurs parties du monde.
Green T : Exactement. On a donc décidé de créer notre propre univers fictif, notre légende, notre version de la Grande Histoire.

Vous vous inspirez des Comics et autres, comme les films de Tarantino, et vous parliez de Samouraï Champloo aussi… On a donc des Comics, des films : qu’est-ce qui vous a le plus tapé dans l’œil ces derniers temps ? Vos dernières sorties préférées ?

Fade : Vraiment récents tu veux dire ?

Ouaip.

Fade : De manière générale et culturellement, on est inspiré par des choses plus anciennes. Mais s’il faut citer des choses récentes, on est super excité par le nouveau film de Tarantino ! On est évidemment super emballés par le nouveau Star Wars aussi *Green T cite le nom en même temps, rires* ! Mais globalement on a été influencé par des choses plus anciennes sans que ce soit spécifique sur The Jade Amulet. Surtout des choses qui créent des mondes, des films qui créent des mondes à part entière. Et c’est là le point principal : on voulait créer notre monde comme on le ressentait : avec ses petits détails, comme choisir tels instruments pour tel morceau, pourquoi tel personnage est comme il est, les connexions entre les différents personnages et la façon dont ils interagissent avec le monde, et dont tout se recoupe à la fin. Je trouve ça cool.
Green T : Au niveau des animés, je suis bien branché sur les trucs de Miyzaki. C’est un peu du feel good movie pour enfant par certains côtés, loin du délire samouraï, mais j’aime ça.
Funky Poet : Perso, j’aime beaucoup les Boondocks aussi.

OK ! Pour en revenir à votre musique : il y a beaucoup de grands musiciens sur cet album, notamment The Black Knight Chamber Orchestra. Que pouvez-vous nous dire là-dessus ?

Fade : En fait on était entouré de grands musiciens et on a eu la chance d’en rencontrer de nombreux pendant nos voyages. On en connaissait certains depuis longtemps, d’autres avec qui nous avons travaillé pour la 1ère fois. On a donc choisi nos préférés : ça n’a pas été évident, vu que ce sont tous de bons musiciens et de bons amis. Notre choix s’est porté sur des personnes qui ont la même vision que nous sur ce que nous voulions faire, qui ont les mêmes goûts, et qui voulaient jouer ensemble dans un bel esprit. Certains travaillaient ensemble pour la 1ère fois et…
Green T : C’est un orchestre symbolique, on l’a créé de toutes pièces. The Black Knight Chamber Orchestra n’existait pas avant The Jade Amulet.
Fade : C’est le nom de notre crew sur ce projet en quelque sorte.

Ah d’accord ! J’ai cherché, mais je n’ai trouvé aucune info en effet. Je me suis dit sur le moment : « Mais où sont les infos ? C’est quoi ce groupe ? ». Je devenais fou !

Fade : Et non, c’était pas sérieux !
Green T : Non, on a créé le monstre, comme pour la tournée de Wax Tailor. On s’était rencontré quelques années auparavant, et pour lui aussi c’était évident : on était dans le même délire, au niveau des arrangements, et il adorait cette idée d’un monde fictionnel inspiré des mangas et tous ces trucs. Et puis la section cuivre était composée de gars qui jouaient depuis longtemps quand on a monté ce projet. On a commencé à travailler avec lui en 2008 je crois. Et donc ce sont des amis de longue date. Ils font aussi plein d’autres choses à côté ; ils jouent pour des trucs plus mainstream, comme des tournées de groupes pop, etc. Ce sont d’incroyables musiciens, d’incroyables compositeurs. Ils ont donc tout de suite compris ce qu’on voulait faire, partageaient la même vision, et nous ont aidé à faire partager notre histoire, à comprendre et visualiser l’univers, à travailler et à composer tous ensemble. C’était vraiment trippant.

À propos de ça justement ; vous n’avez pas utilisé de « méthode classique » pour faire cet album… Pas de samples, juste des instruments…

Fade : Toute cette histoire a commencé parce qu’on a écrit le scénario en premier. On ne voulait pas faire les choses de façon classique. On a travaillé dans de nombreux projets hip hop et dans la musique en général, et ça se passe souvent du genre ; tu as une petite rythmique, et là tu te dis : « OK, j’aime comment ça sonne, j’écrirais bien une chanson là-dessus ». C’est bien aussi, mais ce n’est pas ce qu’on voulait, on avait déjà écrit une histoire complète, qu’on voulait diviser en différents chapitres. Chaque chapitre est représenté par un morceau sur l’album, et on s’est à chaque fois posé la question : « Sur cette chanson, qu’est-ce qu’il se passe ? Quelle émotion se dégage ? Quel sentiment inspire ce morceau ? Qu’est-ce qu’il se passe narrativement ? L’action… Dans quel endroit ? Est-ce que c’est dans la jungle, dans un château ?.. ». Et du coup on se disait entre nous : « OK donc, quelle chanson, si on devait en choisir une, nous ferait ressentir ça ? ». On a donc dû trouver des chansons qui collaient à l’histoire et aux sentiments qu’on voulait faire passer. Et dès qu’on trouvait ce qu’il nous fallait, on se disait : « Ouais c’est ça, c’est cet arrangement aux cordes, cet accord-là qui nous permet de ressentir le truc. OK, on va prendre un bout de ça, telle idée, telle autre idée, capter des influences de différents lieux ». Et on a écrit toutes les musiques, autour des émotions dégagées par l’histoire, les actions, sur ce qui se passe, tu vois, comme pour les scènes de guerre, on a mis des tambours de guerre…

OK. Et juste pour préciser, sur les titres « Passion » et « Masking », vous avez collaboré avec Laura Maine des Native et le grand MF Doom, s’il vous plaît ! Pourquoi vous avez choisi ces chanteurs pour Ashira et Dumile ? Et LiliBoy (du groupe Deluxe, ndlr) par exemple ?

Funky Poet : Quand on a écrit l’histoire, on savait déjà les personnages qu’il y aurait dedans, et qu’il y aurait besoin qu’ils soient joués par d’autres gens. Et pour chacun des personnages, une personnalité : on écrit l’histoire avec cette idée en tête, qu’ils avaient tous une personnalité, ils ont une manière d’être, ils agissent d’une certaine manière, et chaque personnage a quelque chose de particulier, dans son style… Par chance, on savait déjà par qui seraient joués certains personnages, comme Mr Mattic ou Astrid Engberg, qui sont des amis de longue date. Et leurs rôles ont été écrits spécialement pour eux. Mattic allait forcément être le Général Rongon, c’était clair et net. Donc, quand on a écrit l’histoire, on avait déjà le matériel ; son style, sa façon de parler… Idem pour Astrid Engberg, avec sa voix douce pour l’Oracle. Mais le plus gros nom avec lequel on n’avait jamais travaillé avant, c’était Doom. C’était un gros coup de chance ; on avait des rôles pré-écrits, comme la petite amie de Shalim et le père de Shalim, le Roi, mais on ne savait pas qui les joueraient…
Fade : Mais quand tu penses au Roi du Mal, dans le hip hop : Doom ! *rires* Il n’y a rien d’autre !
Green T : On voulait avoir Doom depuis le début ! Cette partie était pour lui, en espérant que ça pourrait se faire.

Cool ! Il y a des inspirations diverses, et ce dans tous vos albums, pas simplement dans The Jade Amulet. C’est la voie que vous avez choisi dès le début, ou vous étiez plus hip hop pur et dur ?

Fade : Depuis qu’on en fait nous-mêmes, on a toujours écouté différents styles de musique. On peut écouter de tout, mais la plupart du temps ce sont des trucs des 70’s ou le hip hop des 90’s. Et… On a jamais voulu se cantonner à une seule chose dans notre manière de faire de la musique, du genre : « On peut pas faire ça, parce que c’est pas hip hop. ». On a jamais pensé que c’était une obligation, et avec The Jade Amulet on a eu une liberté totale, on a tenté des choses. On s’est dit qu’avec cet album, dès qu’on l’a commencé, qu’on n’allait pas se poser la question : « Peut-on faire ça ? Est-ce que ça va passer en radio ? ». Avec cet album, on voulait faire ce qu’on voulait, et raconter notre histoire de la meilleure façon possible. C’est la seule chose qu’on avait en tête, pas du genre : « Oh non, pas de percus dans ce morceau ! ».
Green T : Ouais, on s’est pas posé la question : « Est-ce que ça va marcher en radio ? », et toutes ces conneries.
Funky Poet : Si un morceau doit durer 10 minutes, et bien ce sera 10 minutes. Comme dans un film.

Après un projet comme celui-là, ça va être difficile de faire mieux non ? C’est un projet tellement grand !

Green T : C’est vrai !
Fade : C’est la peur qu’on a…
Funky Poet : On va peut-être arrêter notre carrière tout de suite ! *rires*
Green T : Même si c’est un peu effrayant, il faut toujours aller aussi loin que possible.
Fade : On préfère tout donner dès le début.
Green T : Une expression anglaise dit : « If you aim to the moon, at least you’ll land on the roof » (« Si tu vises la lune, au pire tu atterriras sur le toit », ndlr). Donc, tu peux pas juste te dire : « Oh merde, on fait quelque chose de trop épique ! On va se planter ! ». Tu peux pas raisonner comme ça, il faut sans cesse évoluer.
Fade : Mais c’est un joli compliment, merci ! *rires*

Après avoir collaboré avec MF Doom, vous rêvez de collaborer avec d’autres artistes comme lui ?

Fade : Oh, il y a plusieurs personnes avec qui on rêve de collaborer. Mais tu sais, je ne sais pas si ça vaut la peine d’en parler maintenant, parce que c’est secondaire pour le moment, donc…
Green T : Adrian Younge. Adrian Younge est une grande référence. Ce mec est un multi-instrumentaliste, compositeur, arrangeur, producteur de Californie, qui a fait des choses très intéressantes. Il a fait 2 albums, qui sont aussi des histoires, des albums avec Ghostface, Ghostface Killah du Wu Tang. Adrian Younge est très porté sur la tradition acoustique, sur des genres comme la gangsta soul, la soul des années 60’s, ce qui se rapporte à Daptone Record. C’est quelqu’un d’extrêmement doué, qui évolue dans la même veine artistique. J’adorerais travailler avec lui, et tout ce qui touche à ce label.
Funky Poet : Ouais, comme Charles Bradley, ce serait génial.
Green T : Ouais, Charles Bradley, Sharon Jones, Menahan Street Band, The Budos Band, tous ces gens qu’on respecte beaucoup.
Funky Poet : Et un nouveau chanteur de soul appelé Leon Bridges. J’adore.
Green T : Après je sais pas. J’aime bien l’album de Kendrick Lamar. Culturellement très différent.

Pour finir, on a une habitude au Limonadier : si vous étiez un cocktail, lequel ce serait ?

Green T : Un Old Fashioned !
Fade : Je pense que ce serait un Long Island Iced Tea…
Funky Poet : Oh…*soupir*
Fade : Parce que c’est un cocktail bien crade, qui mêle différents alcools. Et qui te retourne !
Funky Poet : Moi… Peut-être bien une Margarita.
Fade : Petit joueur… *rires*

Vous avez un dernier mot pour le Limonadier et ses lecteurs ?

Green T : Bonne chance ! *rires*
Fade : Merci ! Merci à vous les gars, de nous suivre et d’avoir suivi ce projet. J’ai vu que vous étiez bien pour les Golden Blog Awards.

Oui, merci ! Et niveau concert, il y a une date le 5 février à La Maroquinerie, c’est ça ?

Fade, Green T et Funky Poet : Ouais !

Merci beaucoup, c’était un plaisir ! Continuez comme ça, c’est un super projet et c’est un plaisir de l’écouter. Il y a beaucoup d’albums de hip hop classique, de trap… J’écoute de la trap aussi, mais il n’y a pas beaucoup de projets originaux comme le vôtre.

Green T : C’est pour les gens comme toi, très engagés qu’on le fait. C’est important pour nous et ça nous encourage à y aller à fond. Ça fait du bien d’entendre les gens nous dire des trucs comme ça. C’est cool mec.

Merci !

La tournée d’ASM The Jade Amulet Tour débute ce 4 février à Grenoble ; retrouvez toutes les dates en cliquant ici ! Et n’oubliez pas d’écouter et réécouter l’album The Jade Amulet, ci-dessous ! Cheers !

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Il était une fois Moi. Jeune, vigoureux et d'une intelligence rare, Moi a longtemps cherché un site et une équipe à sa mesure.
C'est ce qu'il trouva enfin lors de sa rencontre avec les membres fondateurs du Limonadier, où le monde put enfin prendre conscience de tout l'incroyable potentiel qui était le sien.
Passionné par le Rap et plus généralement par la planète Terre, c'est tout naturellement que Moi décida d'écrire et de partager inlassablement ses dernières trouvailles sonores.
Cocktail Préféré de Moi :
Une caïpirinha bien fraîche, cela va de soi.
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