Magazine Régions du monde

Jeremie Paul : une écriture poétique et onirique

Publié le 02 février 2016 par Aicasc @aica_sc
Jeremie Paul Pink Panthère Costume

Jeremie Paul
Pink Panthère Costume

Jérémie Paul est né en Guadeloupe en 1983.
C’est un artiste pluridisciplinaire os cillant entre la pratique picturale et la pratique de l’installation. Il étudie à la Villa Arson (où il passe son DNSEP en 2009), il vit entre les Antilles et l’Europe.
Sa carrière débute par un retour en Guadeloupe (2009). Avec le Conseil Général de Guadeloupe, il réalise une exposition,  Herrellà , présentant son monde pictural. L’année suivante, il présente une installation sonore à l’Artchipel Guadeloupe scène Nationale, qui dévoile le côté acoustique de son travail d’installation. Après avoir concrétisé ses premiers projets en Guadeloupe, il fait le choix de retourner en Europe. Il travaille à développer sa technique picturale pendant trois  ans à Leipzig et s’installe à Paris. IL expose jusqu’au 6 février à la Maëlle Galerie.

Jérémie Paul, ÉcumeV, peinture sur soie, 240 x 140 cm, 2015 (détail)

Jérémie Paul, ÉcumeV,
peinture sur soie, 240 x 140 cm, 2015 (détail)

 Quel a été votre parcours depuis votre résidence et votre exposition en Guadeloupe en 2010 ?

Durant les cinq années qui se sont écoulées, l’un de mes principaux objectifs a été d’améliorer ma technique de peinture. C’est dans cette perspective que j’ai choisi de vivre et d’exposer en Allemagne, à Leipzig. C’est là que je pouvais bénéficier au mieux de l’influence du post-constructivisme russe, fortement présent en ex-RDA, et qui me séduisait. J’ai également travaillé au Mexique où j’ai été en résidence deux années de suite, à Oaxaca et à Mexico City. Plus récemment, je me suis établi à Paris qui restera pour les années qui viennent mon principal lieu de travail.

 Vous dites  » je suis actuellement entre Paris, Leipzig, Weimar, où je travaille à la réalisation de nouveaux mobiles sonores en porcelaine. Ils sont fabriqués en collaboration avec l’École du Bauhaus et la manufacture de Karla. ». Pouvez-vous préciser le contexte de cette recherche et ses perspectives?

En 2011, après mon exposition  Peu importe le lieu importe le rythme  à l’Artchipel scène Nationale de la Guadeloupe, j’avais le désir d’enrichir le mouvement de mes porcelaines qui étaient à l’époque de simples bols hémisphériques mus par de l’air brassé. J’ai eu l’idée de les enrichir d’hélices de porcelaine. J’ai travaillé trois  mois en tant qu’artiste invité à l’École du Bauhaus où j’ai tiré une dizaine d’exemplaires de ces  toupies . La série est toujours en Allemagne et je m’en servirai le moment venu, au sein d’un projet prolongeant et renouvelant la  chorégraphie pour ventilateur et jerricane d’eau  de l’exposition de 2011.

Jérémie Paul Toupies réalisées à la Bauhaus Universität

Jérémie Paul Toupies réalisées à la Bauhaus Universität

Chaque technique, aquarelle, peinture, installation, semble générer un imaginaire différent (associations insolites et monstres composites pour les aquarelles, emprunts à la BD et aux Comics pour la peinture, création de paysages sonores à partir d’objets aux formes épurées), la conjugaison de l’hétéroclite est-elle une constante de votre travail et comment l’expliquez-vous? Comment s’articulent ces différentes pratiques entre elles ?

Je me sens proche d’une écriture poétique plus que d’une démonstration esthétique. Je vois mon travail comme un assemblage de qualités créant une phrase. Ainsi, au-delà de chacune des techniques  hétéroclites , comme au-delà du sens propre à chacun des mots d’une phrase, émerge un sens que je définirai en l’occurrence comme une ambiance onirique où se mêlent les formes les couleurs et les sons. Mes pratiques s’articulent par rapport à une appréhension empirique des médiums, elles me permettent de m’approprier des idées. Vous notez par exemple l’épuration de mes formes sonores dans les années 2010-2011 (elles sont plus figuratives actuellement), cette épuration me permettait d’investir le champ de l’abstrait, de le caresser en me libérant le plus possible de l’idée de figure. Je réfléchissais à ce moment-là, tel un prisme, les formes en qualité de rythme, de tonalités et d’efficacité acoustique. Mon but dans Peu importe le lieu importe le rythme  n’était évidemment pas de présenter côte à côte une plaque d’aluminium emboutie de telle sorte qu’elle sonne un DO, une bassine zinc, récupérée dans les collines du Lamentin, et suspendu par des tendeurs pour qu’elle fasse caisse de résonance, des alvéoles en porcelaine s’entrechoquant, le bourdonnement de cordes de guitares. Mon but était de présenter l’espace qui séparait ces objets et la manière dont leur  mise en son  remplissait cet espace et transfigurait la distance en relation sonore et rythmique. Je voulais conduire ainsi le regardeur à osciller entre ces nuances de mélodies, de résonances et de mouvements. C’était une balade dans le sensible que je lui proposais.

Jérémie Paul Vue d'exposition Peu importe le lieu importe le rythme

Jérémie Paul
Vue d’exposition Peu importe le lieu importe le rythme

Le travail sur soie s’effectue-t-il dans le cadre d’un projet personnel ou dans celui d’une collaboration commerciale ? Que vous apportent ce support et cette technique ? Comment le public s’approprie-t-il cette production ?

Au sens d’une production textile appliqué à l’industrie de la mode, même si certaines soies se rapprochent des dimensions de foulards, mes oeuvres s’inscrivent dans une dimension de pièces autonomes, elles sont le reflet d’une nécessité personnelle. Quant à la question du support, la soie est une technique relativement récente pour moi. Fin 2014, je passe par hasard chez un marchand de teinture et nous engageons la discussion. Il me présente la technique et je tombe amoureux de la douceur et de la délicatesse du support. Je réalise qu’il me permet de donner à mon geste pictural une notion d’espace et de légèreté encore plus immédiate. Mes premières soie sont proches des dimensions d’un foulard, elles sont accrochées dans l’espace, flottantes. La série sur laquelle je travaille actuellement est constitués de grands pans de tissus jouant de l’idée de opacité / transparence et créant des espaces à l’intérieur du  White Cube

Quels sont vos projets pour 2016 ? Comment envisagez-vous votre insertion professionnelle ? Qu’attendez-vous de cette exposition à Paris ?

J’ai la chance d’être invité à exposer, en février, un mois après l’exposition à la Maelle Galerie, au Palais de Tokyo dans  La redite en somme ne s’amuse pas de sa répétition singulière . Sara Favrio a été touchée par l’histoire de la création de ma première tapisserie et elle m’a demandé de réaliser trois  soies qui prendraient place dans son installation. Parallèlement, je termine des soies qui seront présentées dans le cadre du festival off Material Art Fair 2016 à Mexico city.

Interview réaliée par Dominique Brebion


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Aicasc 12249 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte