CEDH, 5ème Section, Aff. de Carolis et France Télévisions c. France, requête n°29313/10
La Cour européenne des droits de l’homme a, le 21 janvier dernier, dit pour droit qu’il y a eu
Violation de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme relatif au droit à la liberté d’expression
En 2006, France Télévisions a diffusé un reportage sur le réseau d’Al-Qaïda qui traitait de la plainte déposée par des familles de victimes des attentats du 11 septembre 2001 aux fins d’obtenir la condamnation des principaux soutiens financiers du réseau terroriste. L’une des personnes interrogées dans le reportage a porté plainte, estimant qu’elle était présentée, à tort, comme étant impliquée dans le financement d’Al-Qaïda.
La chaine de télévision française a donc été condamnée à verser une amende de 1000 euro pour diffamation ainsi qu’au paiement des frais de justice de la partie civile. La Cour estime que cette condamnation est certes une ingérence à l’exercice de la liberté d’expression des journalistes mais que cette ingérence est néanmoins prévue par la loi et poursuit un but légitime.
Dès lors, elle examine le point de savoir si cette ingérence est proportionnée et si les motifs invoqués par les juridictions internes, à savoir que la journaliste avait manqué de prudence et d’une réelle objectivité à l’égard des accusations contre une des personnes visée par la plainte, étaient pertinents et suffisants.
La Cour affirme que, le sujet du reportage relevant de l’intérêt général et le plaignant occupant une position éminente, la marge d’appréciation de l’Etat était réduite. En outre, selon la Cour, les journalistes n’ont pas à se distancer systématiquement du contenu d’une citation pouvant porter atteinte à un tiers, et qu’en l’espèce les requérants n’ont pas cherché à tromper le public, le reportage ayant été traité de manière responsable.
Enfin, la Cour juge les sanctions disproportionnées, car le montant même faible d’une amende ne constitue pas moins une sanction pénale qui peut avoir un effet dissuasif sur l’exercice de la liberté d’expression. Partant, elle conclut à la violation de l’article 10 de la Convention.
Pour en savoir plus: Affaire De Carolis et France Télévision contre France
+Elisa VIGANOTTIAvocat de la famille internationale