Une start-up canadienne développe un véhicule hybride mariant huile de coude, assistance électrique et carrosserie aérodynamique protégeant le pilote contre les chocs et intempéries.
Durant les années folles, en France, l’automobile, qui se développe à vitesse grand V outre-Atlantique avec l’avènement de la Ford T, demeure inaccessible pour de nombreux ménages. Un inventeur passionné, nommé Charles Mochet, souhaite permettre à ses compatriotes de rouler à moindre coût : il invente alors un curieux véhicule hybride, une voiture à pédale, comportant deux, trois ou quatre roues et une ou deux places selon les modèles, qu’il fait fabriquer dans son usine de Puteau. Confortables, rapides (grâce notamment à une carosserie aérodynamique), peu coûteuses à l’achat et à l’entretien, ces véhicules, nommés « vélocars » remportent un franc succès, au point que Charles Mochet ajoute au modèle initial, conçu par un ou deux passagers, une version familiale à six places, et même une fourgonnette de livraison. Après la seconde guerre mondiale, les années de crises et de conflit font place à une fringuante prospérité économique, et le vélocar, associé aux temps de vache maigre, s’estompe pour laisser place à l’automobile, et tombe peu à peu dans l’oubli.
Un vélomobile dans la France des années 1930. Crédit : Pierre Jahan
Démocratiser le véhicule électrique
Aujourd’hui, pourtant, une jeune pousse québécoise désirant changer la manière dont nous nous déplaçons en milieu urbain redonne une seconde vie à ce curieux véhicule. « Nous développons un réseau de « vélomobiles » adaptés à l’environnement urbain. » explique Cody Baker, l’un des co-fondateur de la start-up VeloMetro. « Le vélomobile est une bicyclette à trois roues, protégée par une carrosserie et dotée d’une assistance électrique. Il peut emprunter la route ou les pistes cyclables. » Avec son lointain cousin hexagonal, le vélocar, il partage le châssis aérodynamique qui évoque les tous premiers modèles de voitures de course. A l’origine de ce projet, la volonté de créer un véhicule électrique accessible à tous, explique Cody Baker : « Tesla et Nissan font un superbe travail, mais tout le monde n’a pas les moyens de troquer son véhicule à essence pour un de leurs modèles. De notre côté, nous avons voulu créer un véhicule peu cher, écologique et agréable à conduire pour se déplacer en ville, en capitalisant sur plusieurs tendances : la propension croissante de la génération Y à ne pas avoir de permis de conduire ; la nécessité de trouver des alternatives au véhicule individuel pour se déplacer en ville ; et enfin la popularité croissante de l’autopartage. »
Le vélomobile, version VeloMetro.
Un véhicule partagé
Car le véhicule hybride développé par VeloMetro n’est pas destiné au consommateur individuel, mais bien à constituer un réseau de transport partagé en environnement urbain, afin de réinventer la mobilité dans la ville de demain. Chaque individu pourra ainsi se connecter à l’application correspondante pour trouver le véhicule le plus proche, le déverrouiller et accomplir son trajet. Il sera ensuite facturé en fonction du temps d’utilisation. Une équipe de maintenance assurera le remplacement des batteries en bout de course par de nouvelles. « La manière dont nous nous déplaçons en ville va changer radicalement : les véhicules autonomes vont devenir de plus en plus présents, des entreprises comme Uber révolutionnent le modèle du taxi, l’hyperloop permettra bientôt d’aller d’une ville à l’autre en un temps record… Si les voitures autonomes en viennent à remplacer complètement la voiture individuelle, les citadins pourraient apprécier de retrouver le plaisir de conduire, au travers du vélo électrique. » analyse-t-il. L’entreprise prévoit de lancer un projet pilote à l’Université de Vancouver cet été, afin de tester et d’améliorer le dispositif avant de l’implanter dans d’autres villes. « Nous souhaitons en particulier séduire des villes où le vélo est peu en vogue, où les citadins aimeraient avoir d’avantage recours mais n’en ont pas la possibilité pour différentes raisons. »
Le vélomobile est aujourd'hui plutôt répandu en Europe du nord. Ce cliché a été pris en Hollande.
Un intéressant compromis entre le vélo et l’automobile
Le vélomobile possède en effet plusieurs avantages par rapport à son homologue traditionnel, selon Cody Baker : « L’assistance électrique rend la conduite plus facile et moins éreintante ; l’habitacle offre une protection contre les intempéries, un bonne visibilité aux yeux des automobilistes et une protection en cas d’impact, ainsi qu’un espace de stockage pour transporter des affaires ; enfin, le fait qu’il s’agisse d’un véhicule partagé fait disparaître les craintes de vol ou de vandalisme. » Les avantages du déplacement à vélo par rapport au véhicule à essence sont quant à eux bien connus : empreinte écologique, vertus thérapeutiques, désengorgement des routes… Ces divers atouts permettront-ils au vélomobile de s’imposer au sein de l’écosystème de des smart cities, et de donner une seconde vie au rêve de Charles Mochet ?