IA, Robolution, ces emplois qui ne seront pas perdus

Publié le 31 janvier 2016 par H16

Tiens, ça y est : après le jeu d’échec en 1997 avec Deep Blue, c’est au tour du jeu de go de compter DeepMind, un autre ordinateur, parmi ses maîtres : le 27 janvier, un programme informatique vient de battre un joueur professionnel de go. Au-delà de l’aspect ludique, on comprend qu’une nouvelle étape dans l’intelligence artificielle est franchie. D’ailleurs, s’agit-il encore vraiment de jeu ?

En réalité, la victoire de DeepMind (qui avait déjà amusé le monde en écrasant il y a quelques mois toute une série de jeux vidéos ‘Atari’) est tout sauf anecdotique puisque, de l’aveu même d’experts du domaine, on n’attendait pas ce moment avant encore une décennie. Peut-être la rivalité commerciale entre Facebook et Google (dont est issu ce dernier calculateur prodige) a-t-elle permis un gain de temps considérable, et peut-être les estimations du progrès permanent en intelligence artificielle ont été un peu trop pessimistes, ou ont sous-évalué le caractère exponentiel des gains de performance et de finesse des mécanismes mis en place…

Et même si battre le meilleur joueur mondial de go reste encore à faire, il n’en reste pas moins que les premiers retours d’expérience de cette confrontation donnent des perspectives intéressantes : pour Fan Hui, le joueur qui a joué contre DeepMind, « l’ordinateur joue comme un humain », ce qui révèle un changement profond dans la façon dont les programmes de ce genre sont maintenant conçus : il ne s’agit plus d’opposer une sèche et phénoménale puissance de calcul à l’intuition humide et l’approximation toute biologique dont font preuve les humains. Pour qu’un professionnel ne voie plus la différence entre un programme et un joueur humain, c’est bien que les concepteurs de DeepMind ont réussi à simuler ou programmer de façon convaincante les caractéristiques essentielles d’un comportement humain, dans un cadre certes extrêmement borné, mais néanmoins suffisamment complexe pour qu’on ne puisse plus évacuer la réussite d’un revers de la main en la réduisant à une simple utilisation de la force brute.

Du reste, cette prouesse vient confirmer les avancées énormes des ordinateurs dans le domaine de l’intelligence artificielle et dans leurs progrès en matière d’ « apprentissage profond« , de mise en relation de différentes informations dans leur contexte et une certaine forme d’intuition. Watson, d’IBM, avait ainsi prouvé une capacité remarquable à mettre en rapport de vastes quantités d’informations pour répondre aux questions du jeu Jeopardy dans lequel il avait battu de façon presque humiliante ses opposants humains.

À l’évidence donc, l’intelligence artificielle progresse. Et c’est donc sans surprise qu’il ne se passe plus guère un mois sans qu’un nouvel article ne pointe les évidents problèmes que ces progrès, ainsi que ceux concernant la robotisation, vont provoquer dans les sociétés humaines : c’est sûr, avec tous ces robots qui font le travail pénible et toutes ces intelligences artificielles qui feront le reste, l’humain n’aura plus qu’à disparaître tristement dans un bain de larmes amères. Forcément.

J’exagère ? À peine. Pour certains, l’arrivée des robots, de l’intelligence artificielle, de l’impression 3D va provoquer la disparition de 5 millions d’emplois dans le monde. Pour d’autres, à commencer par Stephen Hawking lui-même, l’humanité est en train de signer sa perte avec ces inventions diabolique. Ou quasiment.

Mais voilà : aussi effrayantes, et, sur le plan journalistique, aussi médiatiques soient ces funestes prédictions, elles sont globalement fausses. Sur le plan économique, l’intelligence artificielle et la robotisation apporteront, comme les précédentes révolutions, de vrais bénéfices palpables à toute l’humanité. Oh, bien sûr, dans le cauchemar des experts, les robots, devenus intelligents, peuvent réaliser toutes les tâches que les humains réclament ; le chômage explose, et les humains, n’ayant plus rien à faire, deviennent fou après une partie de scrabble de trop ou meurent neurasthéniques.

Ce cauchemar est bien évidemment à côté de la plaque. En effet, en substance, trois grandes directions peuvent apparaître.

Dans le premier cas, ces IA continuent à servir les humains. Tant que les humains ont la possibilité de commercer entre eux, la nature et la puissance des IA n’entre pas en jeu directement. Tout au plus, ces mécanismes subtils influeront sur le type de commerces, leur fluidité ou les modalités qu’ils prendront à l’aune de cette ère nouvelle. Autrement dit, la nature des travaux, des emplois, des biens et des services change profondément, mais le commerce et les emplois existeront toujours.

Dans le second cas, la distinction même entre humains et IA tend à disparaître progressivement (par couplage de l’un et l’autre). Autrement dit, la distance entre les ordinateurs et ceux qui les pilotent, qui n’a cessé de se réduire depuis le milieu du XXème siècle en passant de milliers de kilomètres à quelques centimètres avec nos smartphones et autres tablettes, finit par se réduire à zéro. Dans cette hypothèse, la distinction entre IA et humain est inutile puisque, assez rapidement, un humain ne sera considéré fonctionnel que s’il dispose d’une interface avec une ou plusieurs IA.

Ceci peut paraître très futuriste, mais notez que de plus en plus de voix s’élèvent déjà pour faire passer internet dans les droits fondamentaux. Or, aussi mièvre cette proposition puisse-t-elle être, elle démontre cependant qu’un nombre croissant de personnes a pris conscience de l’importance d’être connecté. Au passage, les éternels pessimistes qui pleureront sur le sort des plus pauvres qui ne pourraient pas se connecter devront noter la pénétration remarquable des téléphones portables et des liaisons internet même dans les pays les plus pauvres ou dans les peuplades les plus reculées. Une humanité entièrement connectée n’a d’ores et déjà rien d’utopique.

Mais en tout cas, dans ce cadre, on voit mal pourquoi les différences de comportements, de besoins, d’envies qui forment la base du commerce et donc, de l’emploi, viendraient subitement à disparaître. Des humains « augmentés » ne seront pas moins demandeurs de produits et de services spécifiques à leurs désirs aussi variés qu’eux-mêmes.

Le dernier cas est la suite logique du premier : les IA, augmentant en puissance, gagnent finalement en autonomie pour se détacher complètement des humains (si tant est que le second cas, le mélange homme/machine, n’a pas déjà pris le pas). On peut alors verser dans le pessimisme facile de l’écrasante majorité des dystopies de science-fiction et croire que le premier but des IA sera de réduire l’humanité en esclavage. On peut aussi se demander pourquoi diable des IA qui nous auraient tant dépassé intellectuellement s’embarrasseront de nos petits problèmes alors que l’univers est vaste et n’attend qu’elles. Prêter aux IA les mêmes goûts du pouvoir, de la recherche de la perfection, du désir de destruction que nous, c’est leur accorder non pas des pouvoirs intellectuels supérieurs, mais plutôt égaux voire inférieurs.

Plus logiquement, des créations douées d’une intelligence si supérieure à la nôtre n’auront probablement pas ni envie, ni besoin de commercer avec nous. Et dans ce cas, nous continuerons, humains, à remplir nos besoins et nos désirs humains au travers des méthodes qui ont fonctionné depuis la nuit des temps. Là encore, on voit mal pourquoi l’emploi disparaîtrait. En pratique, ce dernier cas a peu de chance d’arriver tant le second paraît bien plus probable.

Enfin, il reste le cas que certains croient délicat de la transition entre la société industrielle du XXème siècle et cette ère nouvelle de robots intelligents à gogo. D’après ceux-là, le choc sera trop dur : trop de robots, trop intelligents, trop vite, et donc du chômage, des frictions, des Luddites et la misère pour tous… Comme je l’expliquais dans un précédent article, il n’en sera probablement rien : cette révolution a déjà commencé, depuis un moment même, et tout montre qu’on la vit d’autant mieux qu’on fait confiance aux individus plutôt qu’aux structures étatiques pour s’adapter.

Évidemment, là, la France et, de façon générale, les sociale-démocraties obèses ont un gros handicap. Mais le problème, on le comprend, vient de ces structures de sociétés, pas de la technologie en elle-même.

Et quelque chose me dit que c’est même cette technologie qui nous affranchira des lourdeurs de ces mammouths.

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